Le chaland fait du lèche-vitrine puis achète sur Internet. Cette pratique, baptisée showrooming, conduit les commerçants à rivaliser d’ingéniosité pour favoriser le passage en caisse.

Article paru dans le supplément Shopper Marketing de Stratégies le 29 juin 2014.

 

Alors que la concurrence fait rage entre les différents canaux de distribution, déclencher l’acte d’achat dans les lieux de vente physiques est plus que jamais une priorité. Notamment à l’heure du showrooming, nom donné à cette pratique consistant à découvrir ou à tester un produit en boutique avant de l’acheter sur le Web. « Dans l’automobile, le showrooming a toujours existé, rappelle Rodolphe Bonnasse, DG de CA Com, groupe de communication spécialisé dans la distribution. Plus l’achat est impliquant, plus le risque est élevé. » Mais, in fine, la marque fait toujours la vente, quel que soit le canal de distribution. En revanche, le distributeur risque de pâtir de cette situation. À moins qu’il n’en profite. C’est le cas d’Amazon. L’e-commerçant a lancé en novembre 2011 son application « price check Amazon » à utiliser dans les magasins de ses concurrents (Best Buy, Target, Walmart…). Avec elle, ses clients internautes sont invités à commander un produit sur Amazon, une fois vu et testé en boutique. Ils sont livrés sous 48 heures avec 5 % de réduction sur le prix Amazon. De quoi donner des ailes au showrooming.


Comment lutter ? Aux États-Unis, Best Buy, leader américain du marché des produits électroniques, n’a pas hésité, lors des fêtes de Noël de 2013, à mettre le doigt là où ça fait mal. À la télévision, comme dans ses boutiques, une campagne de publicité télévisuelle déclarait : « Venez chez nous, c’est le meilleur showroom pour faire ses courses de Noël. » Provocateurs mais efficaces, les spots mettaient en scène les vendeurs avec leur « blue shirt » comme élément humain de réassurance, de conseil et d’expertise, incarnation de la véritable relation client. L’élément prix n’a pas été oublié. La promesse était en effet de s’aligner en magasin sur les prix de l’ensemble de ses concurrents, quel que soit le canal, Amazon compris. « Cette riposte jusqu’au-boutiste à la problématique du showrooming démontre le grand enjeu auquel est confronté le réseau physique de ventes, à savoir redécouvrir son métier de commerçant », explique Vincent Teillet, directeur associé de Care, agence de communication digitale spécialisée dans les stratégies de marques. Et Catherine Michaud, CEO d’Integer France, agence experte en shopper et retail marketing (groupe TBWA), de préciser : « Les nouveaux canaux de vente ont mis à mal les plus anciens, mais comme l’indique l’économiste Schumpeter, c’est un processus de destruction créatrice. Il implique des réformes et des innovations de la part du commerce traditionnel pour mieux contrer son nouvel univers concurrentiel. » Catherine Michaud défend les évolutions nécessaires qui supposent un changement en profondeur du marketing client. « En premier lieu, il faut accepter que dorénavant le consommateur choisisse où, quand et comment il achète un produit.

 

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À partir de ce constat, les magasins doivent se donner les moyens d’être au même niveau d’expertise produit que le consommateur, par le biais d’investissements en équipements digitaux et en formation des vendeurs », explique-t-elle. Ensuite, le consommateur doit pouvoir acheter sur les différents canaux où qu’il se trouve. Cela suppose une véritable agilité entre ces canaux. Proposer sur le site le « click and collect » est intéressant car le passage en magasin génère souvent du chiffre d’affaires additionnel. Enfin, l’approche multicanal est une ouverture de choix que le client attend. Il faut avoir une vision du shopper qui englobe l’avant, le pendant et l’après vente, quel que soit le dernier endroit où le client effectue sa transaction. Parce qu’au final, la trace laissée reste la marque. Cette relation entre cette dernière, le shopper et le distributeur va s’enrichir prochainement des objets connectés, autres que des smartphones, qui vont permettre au distributeur de s’inscrire dans l’ensemble de la relation client en apportant une valeur ajoutée concurrentielle majeure sur le marché.


Des lieux de plaisir


Le magasin a énormément d’atouts à mettre en avant. Les Français préfèrent encore à 72 % faire leur shopping en magasin plutôt que sur Internet, comme l’indique un sondage Ipsos réalisé en février 2013. Les raisons ? L’aspect vivant, avant tout (92 % des sondés), la dimension humaine (91 %), l’accueil (88 %), mais aussi la possibilité de toucher et de tester les produits (78 %). C’est donc sur ses fondamentaux que le commerce traditionnel doit travailler pour attirer et retenir le chaland. Sa mission : offrir une expérience enrichie, apporter du plaisir. Ce qui passe, pour les marques, par des vendeurs experts et formés, par toujours plus d’informations sur les produits, sans oublier le service après-vente : échange, livraison et mise en œuvre à domicile… « Les centres commerciaux deviennent de vrais lieux de plaisir, constate Alain Doré, président de Brandimage, l’agence qui a réalisé le design du centre commercial de Beaugrenelle. Afin de rendre propice le shopping en leur sein, ils doivent offrir de la mise en scène mais également de la fluidité et insuffler une relation plus complice et personnalisée. » Pour Rodolphe Bonnasse, le consommateur comprend parfaitement qu’il est tracé sur Internet et « les boutiques doivent faire la même chose grâce à une base de données consommateurs qui consacre un traitement totalement personnalisé à chacun. Finalement, ce sont des règles très simples qui préexistaient à l’origine du commerce, il y a 2 000 ans, et que l’on retrouve dans l’expression du xixe siècle "être d’un commerce agréable". Il faut balayer la notion de distribution pour revenir à cette notion ».
Pour pousser à l’acte d’achat en boutique, les agences ont leurs secrets, leurs méthodes.

 

Pour Philippe de Mareilhac, CEO de Market Value, agence de retail design, au-delà des fondamentaux que les points de vente physiques doivent repenser – l’expérience produit, la simplification de l’acte d’achat – un véritable travail de sélection d’offres produits doit être réalisé. « Internet a d’ores et déjà gagné la bataille du choix, donc le magasin ne doit plus se battre sur ce terrain. Au contraire, c’est un véritable travail d’assortiment qu‘il doit effectuer, afin d’être plus efficace. La révolution du libre-service dans les années soixante a mis en avant l’aspect supply chain, plus que celui de commerçant », déclare-t-il. Revenir à un commerce plus traditionnel avec une simplification de l’offre suppose des vendeurs bien formés. « Décathlon l’a bien compris en revenant à un véritable conseil mais avec une offre plus restreinte. Certaines enseignes comme Kiko, la petite marque italienne de cosmétiques, ou bien encore Hema pour la décoration, font un carton en proposant des plans de collection qui changent régulièrement. Il faut également réinventer les ventes flash en magasin, afin de démontrer au consommateur l’intérêt d’y être et d’y faire une bonne affaire ! »


Agence de live marketing, Malls, entité du groupe Usyne, accompagne les marques sur les territoires de vie afin de réenchanter le parcours shopper et de déclencher l’acte d’achat. « Il faut créer de la surprise et offrir une véritable expérience face-to-face entre la marque et le consommateur, explique Frédéric Giraud, directeur associé de Malls. Ainsi, l’animation Badoit, menée au printemps dernier dans différentes enseignes alimentaires à l’occasion du lancement d’une nouvelle saveur créée par le chef Thierry Marx, est un exemple typique d’une expérience de live marketing. Au Monoprix de Saint-Germain-des-Prés, par exemple, une séance de dédicace des bouteilles de cette nouvelle saveur par Thierry Marx était organisée. L’ensemble du magasin avait revêtu les couleurs Badoit avec tapis vert au sol et les consommateurs étaient accueillis par une vingtaine de serveurs professionnels qui leur proposaient de goûter la nouvelle Badoit aromatisée dans une flûte à champagne. « La présence de Badoit était théâtralisée avec plusieurs îlots de produits dans le magasin. Une opération de ce type permet de multiplier par trois, quatre ou cinq le chiffre d’affaires de la marque durant l’animation. Sur le long terme, c’est un véritable bénéfice d’image pour la marque », dit-il.


Le marché dispose aussi de nombreux outils, comme ceux de Médiaperformances avec Affichariot, une offre de publicités posées à l’avant ou sur les côtés du chariot, qualifiée de « dernier média avant l’acte d’achat ». Existant depuis une vingtaine d’années, cette solution couvre le parcours shopper en mettant en avant des produits de grande consommation, notamment l’alimentaire. Dans ce contexte, en effet, 54 % des achats se décident sur le point de vente (source IRI Shopper Insight). « Il est important que les marques prennent la parole vis-à-vis du consommateur en situation d’achat », commente Pascal Vegh, directeur marketing de Médiaperformances qui vient de lancer une nouvelle offre, Creascope, à destination cette fois des créatifs (lire plus bas).

 

 

ZOOM

Médiaperformances du côté des créatifs
Affichariot impacte d’ores et déjà les ventes de +33 points en moyenne. Afin d’augmenter ces résultats, Médiaperformances s’est associé à Ipsos pour accompagner les marques dans leur choix créatif. Creascope est un nouvel outil qui permet de tester deux pistes créatives auprès d’un panel on-line selon différents critères : souvenir publicitaire, reconnaissance, intention d’achat… À l’issue des résultats obtenus, la marque peut alors décider du choix de la création à diffuser en magasin.

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