Classement
Les médias traditionnels sont de plus en plus confrontés à des acteurs technologiques ou de taille mondiale contre lesquels il est difficile de résister à l’échelle de l’Hexagone.

«Des médias à plusieurs vitesses», c'est par ces mots que Jean-Clément Texier, président de la Compagnie financière de communication, résume la projection induite par notre classement des groupes médias en France en 2013. Un classement toujours dominé par le groupe Canal+, avec 5,3 milliards d'euros de chiffre d'affaires (+5,9%), qui profite de son expansion internationale et de sa bonne tenue sur son marché domestique – en l'absence de Netflix –, alors même que le groupe TF1 recule de façon significative (–20,4%), à près de 2,1 milliards d'euros, avant même de céder le contrôle d'Eurosport à Discovery, en janvier 2014. Un signe supplémentaire de la crise publicitaire qui affecte les chaînes historiques en clair, en pleine guerre des prix en 2013.

De telles disparités dans l'évolution de l'activité se constatent dans tous les médias: la communication extérieure si l'on compare JC Decaux (+2,1%) et Clear Channel (–7,9%) ; l'audiovisuel si l'on rapproche NRJ Group (+4,3%) de M6 (–8,7%); et la presse qui, à des rares exceptions, tel Condé Nast (+7,6%), pâtit d'un recul général, notamment au sein des groupes de presse quotidienne (–12,7% pour L'Equipe) voire magazine (–7,1% pour Hachette Filipacchi).

 

Quelques pépites

 

Plus on est un acteur ancien des médias, plus il semble difficile de conserver ses positions. Le groupe Pages jaunes (–4,8%) passe ainsi en dessous du milliard de chiffre d'affaires tandis que Google France (+19,9%) impose son dynamisme, avec un montant qui n'est pas représentatif de sa véritable activité dans l'Hexagone: «Comme tous les GAFA, son modèle consiste à faire abriter son chiffre d'affaires dans des lieux fiscalement plus cléments», rappelle Jean-Clément Texier. Plutôt que 230 millions d'euros déclarés en France, il faut donc tabler sur sept à huit fois plus pour ce qui apparaît désormais comme la première régie de France. A noter l'apparition, à la 66e place, juste devant Télérama, d'Affiperf, le trading desk d'Havas Media, signe d'un marché des régies publicitaires en train de se recomposer sous l'influence du programmatique.

A l'heure de l'évolution des usages et de la convergence médias-télécoms, l'essor des nouvelles technologies se fait globalement au détriment des acteurs traditionnels. D'autant que pour affronter les enjeux du futur, ces derniers ne sont pas en mesure d'investir suffisamment pour résister au rouleau compresseur de géants transversaux. Conséquences, de drastiques logiques de rationalisation sont à l'œuvre. Dans la PQR, le Crédit mutuel pèse pour favoriser les mutualisations quand Sud-Ouest ou Hersant Média peinent à faire face à leurs engagements financiers. Du côté des magazines, Lagardère Active s'est délesté de dix titres de presse en 2014.

Cela n'empêche pas qu'ils restent quelques pépites, notamment dans la presse spécialisée. Le groupe Infopro (non consolidé dans notre classement) peut afficher de belles marges à deux chiffres, dont témoigne le très rentable groupe Moniteur, racheté fin 2013. «Il pèse près d'un demi-milliard de chiffre d'affaires», estime Jean-Clément Texier. Les éditions législatives, France agricole, Uni Editions ou Intescia [auquel appartient Stratégies] présentent aussi de confortables rentabilités. «Le pessimisme ambiant résulte-t-il de 2013, de la projection d'un marché beaucoup plus dur en 2014 ou d'une absence de confiance pour 2015-2016?», s'interroge l'expert.

 

Vivendi en chasse d'actifs

 

Reste maintenant à savoir comment évoluera Vivendi, qui projette de se recentrer sur les contenus et qui dispose d'un trésor de guerre tiré de la vente de SFR ou de Maroc Telecom. En se mettant en chasse d'actifs, son principal actionnaire, Vincent Bolloré, va-t-il contribuer à revaloriser certains groupes médias? Peu probable, selon Jean-Clément Texier, qui rappelle que l'ex-petit prince du cash-flow a toujours cherché à tirer parti de dépréciations: «Ce n'est pas dans sa nature de signer des chèques en blanc ni même de gros chèques.»

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