Dans la formation continue aussi, les cours continuent d’évoluer, en phase avec la digitalisation du secteur. L’IMM (Institut de l'internet et du multimédia, groupe Mediaschool, propriétaire de Stratégies) par exemple a modifié sa learning expedition (voyage d'études) en remplaçant l’étape de San Francisco par Seattle, berceau des acteurs de la nouvelle économie digitale. Media Institute a, de son côté, mis l’accent sur deux tendances. D’abord le questionnement de plus en plus précis sur le ROI digital (tracking, réconciliation des données du parcours client, pression publicitaire), avec « une remise en question peut-être provisoire de l'ultra-ciblage et des projets data internalisés qui peinent à prouver leur valeur en termes de retour sur investissement à court terme », explique Céline Gaude, directrice du Media Institute. Par ailleurs, face à une « publicité de plus en plus mal vécue par les individus », c’est toute une réflexion sur les formations innovantes qu’il s’agit de mener. De son côté, Comundi va lancer en 2020, avec la Toulouse Business School, une formation permettant de décrocher un executive MBA. Chacun des quatre cycles certifiants (management, stratégie et innovation, stratégie marketing et finance) exige dix jours de présentiel et l'obtention du diplôme peut s’étaler sur une durée maximale de cinq ans.
Cette évolution des cursus prend aussi parfois une tournure inattendue. Intuit Pro a ainsi intégré des cours de sémiologie et de sémantique dans sa formation à la direction artistique. « Cela permet d'apporter de l'innovation aux marques en aidant à définir un ADN de marque plus pertinent », estime Laurent Baley, directeur général d'Intuit Lab, école de design et communication visuelle dont dépend Intuit Pro. Dans une optique similaire, Intuit Lab a mis en place des séminaires de créativité associant culture générale et histoire de l'art. L’objectif est de répondre aux attentes des patrons d'agences. « La curiosité nourrie de ces matières permet de réouvrir les inspirations créatives nécessaires à la profession », précise Laurent Baley.
Intelligence collective
Côté outils, l’évolution se poursuit aussi. L’IMM s’est ainsi associée à Edflex, une plateforme d'apprentissage à distance, pour renforcer les sessions présentielles. Les participants accèdent à une série de mooc, articles, vidéos ou podcasts, et bénéficient d’un mentoring personnalisé pour le suivi de mooc certifiants sélectionnés par les équipes pédagogiques d'Edflex et de l’IMM. Cette partie distancielle représente un quart du temps total de la formation. L’IMM estime que cette « articulation de formats digitaux pour l'acquisition des compétences techniques et d'apprentissage présentiel » permet d’apporter « des compétences d'intelligence collective et de partage à appliquer sur des sujets vus à distance ». La partie présentielle se voit chargée de développer des savoir-faire déterminants à l’ère des algorithmes : l'intelligence collective, le réseau, le partage d'expériences, les méthodes, l'esprit critique et la créativité. Pour Rosa Luna-Palma, directrice générale du pôle formation continue de Mediaschool, « cette expérience personnalisée, compatible avec une activité professionnelle, permet d'expérimenter une pédagogie innovante avec des formations à suivre à son propre rythme, et d'assurer un socle commun de connaissances à toute la promotion. »
Cette année, Intuit Lab a aussi adopté le coaching avec des séances hebdomadaires de deux heures. « Ce dispositif assure une meilleure acquisition des compétences, une meilleure adhésion aux programmes pédagogiques et, au final, un meilleur succès des stagiaires », assure Laurent Baley, qui précise que le niveau obtenu par les apprenants a lui aussi progressé.
Gagner en autonomie
L’INA (Institut national de l'audiovisuel) mise sur le digital en déployant pour la première fois le blended learning sur les formations certifiantes longues, comme celle de photographe-vidéaste, d’une durée de six mois. « Ce dispositif de blended learning permet un approfondissement en proposant des compléments optionnels comme un perfectionnement sur une technique, que les apprenants peuvent suivre en partie seuls, précise Stéphane Chung, qui dirige la cellule de digital learning de l’INA. La logique en place est de faire gagner progressivement en autonomie les participants. » En captant un tiers de la durée totale, le distanciel réduit les coûts d’hébergement pour les participants venant de loin tout en libérant les locaux de l’INA. Cette transformation permet aussi de réduire les coûts de formation, soumis au cadre de la formation professionnelle, « sans sacrifier les compétences à transmettre », précise Stéphane Chung.
Le présentiel n'est pas en reste, avec des salles où se réunissent les apprenants qui sont désormais peuplées d’applis comme Klaxoon, Beekast… Un changement logique aux yeux de Stéphane Chung : « Ces évolutions répondent à celle des attentes et de la pédagogie. Les apprenants veulent être plus actifs, d’où l’importance croissante de la gamification. » Il note aussi que les outils actuels sont de plus en plus adaptés au digital learning alors que jusqu’à une époque récente étaient utilisés des outils détournés de leur usage initial.
Vers un TOEIC du digital
Comundi Formation propose a ses apprenants d’accéder à la plateforme Digitt, qui a l’ambition de devenir une certification standardisée sur le digital comme l'est aujourd'hui le TOEIC sur l'anglais. Ceux qui s’y inscrivent peuvent effectuer un auto-diagnostic puis recevoir une recommandation personnalisée pour une montée en compétence sur un maximum de neuf domaines (communication, web marketing, contenu, mobilité...). « Au terme de leur parcours, les apprenants passent un examen (QCM) de deux à trois heures pour valider leurs connaissances, explique Servane Guidou, en charge du développement. Ce dispositif est associé depuis début 2020 à une vingtaine de nos formations. »
