création
La publicité sur ce média est de moins en moins valorisée. L’absence de trophée professionnel et les contraintes de la mention légale ont, de fait, tari l’intérêt des créatifs.

Imaginer une série d'appels entre D'Artagnan, Athos, Aramis et Portos pour récupérer leurs épées, c'était l'idée originale de la campagne radio «Les Mousquetaires» conçue par Publicis Conseil pour Orange en octobre dernier. Autre campagne remarquée, celle de La Poste signée BETC Euro RSCG avec cette saynète amusante et «sonore»: «Le recommandé qui revient chez toi une deuxième fois… (Flap flap flap) Il revient le pélican… Oui (flap flap flap), le recommandé…»

Être créatif en radio serait donc encore possible dans la publicité française. Et pourtant, la fréquence de spots réussis et drôles se fait de plus en plus rare, ceux-ci étant désormais écrasés par des publicités où domine le message purement «promo». Pourquoi la publicité radio a-t-elle si mal viré? Comment expliquer ce manque de créativité audible, qui, du coup, écorche les oreilles de l'auditeur, parfois jusqu'à l'insupportable, durant les tunnels de publicité de certaines stations? «L'absence d'un grand prix radio récompensant les créations a fait perdre au métier l'émulation qui lui donnait toute sa saveur», estime Éric Tong Cuong, cofondateur de La Chose. Il y a bien le jury radio du Club des directeurs artistiques ou celui des Cannes Lions, mais cela ne semble plus suffisant pour réveiller l'appétit des créatifs, en particulier les jeunes. «Réaliser un film ou créer un buzz sur Internet, voilà ce qui intéresse à l'heure actuelle les gens du métier», estime François Barbe, fondateur de la société de production Men at Work. «Il y a de moins moins de créatifs doués pour la radio, autrement dit munis de cette habilité d'écriture qu'exige ce média», indique Éric Tong Cuong. «Une bonne publicité radio nécessite en effet un dialogue ciselé, jouant souvent sur le registre de la comédie», confirme Olivier Desmettre, directeur de création chez Publicis Conseil. Résultat, la pub radio reste souvent le fait d'un petit nombre de «seniors» confirmés. «Certaines grandes agences n'hésitent pas non plus à externaliser leurs créations radios. Chez DDB, nous avons la chance d'avoir encore un studio d'enregistrement à domicile», confie Olivier Lefebvre, créatif chez DDB Paris.

Une mention légale réduite

Autre frein, la mention légale obligatoire, qui ne favorise pas la créativité. «Quand cela prend la moitié du temps d'un spot de 30 secondes, ça limite d'emblée le discours et les blagues», ajoute Benjamin Sanial, concepteur-rédacteur chez Publicis Conseil. La mention légale devrait toutefois être prochainement réduite à dix secondes maximum.

La radio serait-elle donc un média condamné? «Beaucoup d'annonceurs n'ont plus très envie d'y prendre des risques», souligne Vincent Malone, vice-président de BETC Euro RSCG. «C'est devenu un média servant à créer du trafic et de la présence à moindre coût plutôt qu'un lieu de création», constate Benjamin Sanial.

Les régies iraient aussi dans le sens de ce ronronnement ambiant. Et pourtant, arrivent parfois sur les ondes des perles, comme la campagne «La rentrée, même pas mal» pour le distributeur Saturn, créée par La Chose, qui joue notamment sur les multiples sens du mot «bourse».

S'amuser en radio, c'est justement le propos de Radio Factory, «le club des créatifs qui aiment la publicité radio» créé en mai 2010. Son but: encourager la création lors de soirées où la trentaine de membres enregistre des spots fictifs. Tout n'est donc pas perdu pour les ondes… Certains leur dessinent même un avenir radieux. «La création radio va redevenir le cœur de l'écriture publicitaire en ce sens qu'elle est la plus proche de celle des scénarios de marque, des sagas ou feuilletons publicitaires», estime Vincent Malone.

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