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Éric Giuily, président de Clai, cabinet-conseil en communication corporate et ancien patron de Publicis Consultants, publie, aux Éditions Odile Jacob, Affaire de com. Stratégies gagnantes, stratégies perdantes. Actualité aidant, l'auteur passe aux travaux pratiques pour Stratégies.

Quelles sont donc ces règles d'or que vous prônez dans votre ouvrage pour réussir sa communication?

Éric Giuily. D'abord, contrairement aux apparences, la communication est un métier et non une affaire de gourou. Il existe quelques règles simples qu'il faut savoir adapter au contexte. La première consiste à ne pas se tromper de terrain, par exemple en adoptant une communication inadaptée, comme ce fut le cas de Sanofi lors de son OPA sur Aventis avec sa campagne «Pour raison de santé» ou encore d'Arcelor avec les bévues de son président face à l'offre hostile de Mittal. Deuxième règle: préparer le terrain en instillant progressivement l'idée que l'on défend. En cela, la réforme des retraites est emblématique. Il faut aussi occuper la place au-delà du coup initial. Alcan l'a appris à ses dépens suite à son OPA réussie sur Pechiney. S'adapter à de nouveaux domaines, à commencer par celui d'Internet, s'impose également, mais il faut connaître l'attente de ses publics et utiliser l'outil à bon escient. La cinquième règle est de savoir changer de terrain quand le contexte l'impose, comme je le montre avec l'exemple des syndicats de l'AFP qui, en 1999, ont su renverser le cours de la bataille sur la réforme de l'Agence que je présidais alors en passant de l'interne au politique. Enfin, il faut savoir traverser les terrains minés, c'est le propre de la communication de crise où la préparation et la transparence sont essentielles.

 

En matière de crise justement, quels enseignements tirez-vous de l'affaire DSK?

E.G. La communication de Dominique Strauss-Kahn dans cette affaire est difficilement transposable en France compte tenu de la spécificité du droit américain. Mais, au-delà de tout ce qui a déjà été dit sur le sujet, je pense que son vrai problème de communication est à venir, surtout si sa volonté est de revenir sur la scène politique. Dans ce cas, après une phase d'explication, il a intérêt à ne parler que des problèmes de fond relatifs à l'état de la France et du monde, sur lesquels il reste légitime.

 

Vous évoquiez plus haut les «stratégies perdantes» de Sanofi et Arcelor, conseillés alors respectivement par Christophe Lambert et Jean-Yves Naouri avec lesquels vous collaboriez pourtant à l'époque chez Publicis. Réglez-vous ainsi quelques comptes?

E.G. Ce sont des faits. La campagne publicitaire de Sanofi s'est faite contre mon avis. D'ailleurs, Christophe Lambert [alors président de Publicis Conseil] l'a tout à fait revendiquée. Concernant Arcelor, je ne fais que constater que, malgré les conseils de Jean-Yves Naouri [à l'époque directeur général adjoint de Publicis Groupe], qui avait la main sur ce dossier, il y a eu des déclarations malheureuses. Mais je sais que les clients ne font pas toujours ce qu'on leur conseille.

 

Autre affaire que vous relatez, la gestion par Didier Lombard des suicides à France Télécom. Quel jugement portez-vous sur l'action de son successeur, Stéphane Richard, à la tête du groupe?

E.G. Ce qu'a fait ce dernier illustre très bien l'importance de la communication. Alors que le nombre de suicides n'a pas réellement baissé à France Télécom, le lien entre ces drames et les conditions de travail n'est plus d'actualité. Stéphane Richard a su préparer le terrain en amont en multipliant les déplacements et les occasions de dialogue, il a su ensuite occuper la place en annonçant des changements notamment sur la mobilité forcée allant même jusqu'à reconnaître au moins un suicide comme accident du travail, signe d'ouverture. Sa seule erreur est d'avoir offert à Didier Lombard un poste au sein du groupe avec une très forte rémunération qui a inévitablement provoqué une polémique.

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