Grand Prix Stratégies du design 2011
Clarins, première marque de soin en Europe, remporte le Grand Prix Stratégies du design 2011 pour la refonte des packagings de l'ensemble de ses produits. Un travail tout en élégance et modernité, signé de l'agence Desdoigts et Associés.

À Neuilly-sur-Seine, siège de l'entreprise, le bureau d'Isabelle Delort, directrice du marketing et du développement international de Clarins, recrée l'intérieur d'une parfumerie sélective: des présentoirs exposent les pots et crèmes des marques concurrentes, Clinic, Lancôme, Dior, Chanel, Biotherm, Estée Lauder, mais aussi de plusieurs produits maison. Les anciens et les nouveaux. La différence est frappante. Avec ses volumes plus actuels, associant élégance et pureté, toute la valeur des packagings revus et corrigés par Desdoigts & Associés, saute aux yeux. La marque gagne en modernité et en clarté grâce au travail mené avec sa fidèle agence. Un duo gagnant qui remporte, haut la main, le Grand Prix Stratégies du design 2011. (Voir le palmarès complet)


Cette cure de jouvence remonte à 2008. Le groupe est alors malmené. Jacques Courtin, fondateur en 1954 de Clarins, décède en 2007, laissant place à des rumeurs de rachats de multiples prédateurs: L'Oréal, Estée Lauder, Procter & Gamble, PPR... Déstabilisant et insupportable pour ses fils, Olivier et Christian Courtin, actionnaires à hauteur de 64,9%, qui entendent garder le contrôle du groupe. En 2008, ils rachètent donc l'intégralité de ses parts, retire Clarins de la Bourse, et nomme Philip Shearer, président du directoire. Objectif de ce spécialiste international de la beauté, venu de L'Oréal et d'Estée Lauder: faire de Clarins une grande marque contemporaine, leader à l'échelle mondiale (voir interview). Depuis, un développement par croissance interne est mené sur tous les fronts: lancement de formules et de produits inédits, augmentation des budgets publicitaires concentrés sur quelques produits phares, déploiement sur le Web, refonte et modernisation du packaging. Comment procéder? Clarins, depuis toujours à l'écoute des femmes via sa fameuse «carte client» insérée dans ses packs, décide de sonder utilisatrices et non-consommatrices dans plusieurs pays. Résultat: si la marque est perçue comme sérieuse, experte, haut de gamme, avec des textures appréciées, elle apparaît néanmoins statique, vieillissante. Le segment anti-âge est jugé peu attractif, pas assez luxueux. Les clientes ont par ailleurs du mal à se repérer dans l'offre très étendue de la marque.


Pas de doute : pour séduire les nouvelles générations et conquérir le monde Clarins doit revoir l'image de ses produits. Plusieurs agences sont alors consultées, notamment Desdoigts et Associés, partenaire de longue date. L'agence indépendante, fondée en 1989 par Olivier Desdoigts, connaît bien la maison. C'est elle qui a conçu en 2002 la ligne de cosmétiques pour hommes Clarinsmen. Un véritable succès commercial. «Cela fait dix ans que j'ai une équipe Clarins à l'agence et une même directrice de création, Marie-Laurence Aubin, pour s'en occuper,commente Olivier Desdoigts. À une époque qui vit au rythme des compétitions, cette fidélité permet de travailler mieux et de manière plus efficace dans une relation de confiance.»

Par souci de fraîcheur et vu l'importance du chantier, Isabelle Delort décide toutefois d'associer une autre agence à l'aventure. À Carré Basset, l'identité visuelle et la refonte du logo. À Desdoigts & Associés, le travail sur les volumes. Commence alors un long travail d'harmonisation et de mise en cohérence des signes de la marque. «Jusqu'à présent, Clarins procédait produit par produit pour faire évoluer ses gammes. Du coup, plusieurs générations de logos, de codes couleurs, de matières, de volumes ou d'étuis se côtoyaient dans une grande confusion», explique-t-elle. Tous sont dorénavant signés d'un «Clarins» dépourvu de ses traditionnelles ellipses entourant le nom. Avantage: un gain de lisibilité, mais aussi de place, le mot «Paris» pouvant figurer sur l'ensemble des packs. Les mentions légales qui s'estompent dans un gris clair font également ressortir les signes de la marque. Les textes sont, eux, ferrés à gauche pour une meilleure lecture. Enfin, le nom de la marque, excentré, vient parer de rouge des couvercles blanc immaculé. Un décalage qui confère d'emblée toute sa personnalité au produit: plus actuel, il devient aussi moins standard.


«Dans l'ensemble, nous avons cherché à préserver l'histoire de la marque, à la moderniser sans balayer son passé d'un revers de main», commente Olivier Desdoigts. La nouvelle ligne reprend ainsi les couleurs de la marque, le blanc et le rouge, mais aussi l'ovale, une forme originelle et culte chez Clarins, adoptée pour les nouveaux pots. Elle est toutefois combinée avec le rond, forme appliquée aux bouchons et couvercles. Un décalage, là encore, conférant force et distinction aux produits.


Afin de mieux guider la consommatrice, Clarins a également mis de l'ordre dans ses quelque deux cent vingt références. Un code couleurs sur les étuis marque les différentes familles de produits: bleu pour les soins hydratants, vert pour les soins rééquilibrants... «En travaillant les matières, nous nous sommes attachés à reconstruire la valeur émotionnelle de la marque», ajoute Olivier Desdoigts. Vernis, finitions, aspects translucides et colorés de certains pots, tout a été fait pour rendre les surfaces plus féminines, sensuelles et désirables. «Nous avons aussi recherché un son doux et agréable pour la fermeture des produits solaires pour éviter le bruit de plastique qui claque ou qui grince», explique-t-il. L'ensemble devait aussi mieux valoriser cette marque technique, notamment sur les soins anti-âge. Ici il fallait faire ressortir le côté prémium et luxe de la gamme: le liseré or des pots, un peu trop vieillot, ayant été retiré, tout comme l'ellipse dorée du logo, l'agence a misé sur une couleur champagne métallisé, un or blanchi plus actuel, travaillé sur des surfaces complètes et non sur un filet. Enfin, l'enjeu de cette refonte était de rationaliser la gamme en dégageant des économies de coûts. Clarins et son agence ont ainsi cherché à réduire au maximum le nombre de formes et de pièces. Les aspects développement durable n'ont pas été oubliés. «Il était important de marier marque de luxe et marque nature, d'aller un peu plus loin dans la démarche verte de Clarins en répondant aux attentes de nos clientes sensibles à l'environnement», ajoute Isabelle Delort.

La marque a donc aussi cherché à diminuer son empreinte écologique. Les étuis de quatorze de ses références ont été enlevés, comme sur les démaquillants. Pour les solaires, les notices explicatives sont aujourd'hui imprimées à l'intérieur du pack et non plus sur une feuille à part. Le déploiement sur le Web de cette marque très bavarde et la connexion progressive de l'ensemble des femmes devrait lui permettre à terme de se passer de papier tout en continuant à dialoguer avec ses clientes.

Ce travail de longue haleine qui a vu se succéder sur plusieurs mois tests, réunions, prototypes et essais en usine, est aujourd'hui visible sur le dernier lancement de la marque, le soin anti-âge Capital Lumière en rayon depuis fin 2010... Pour parachever cette cure de jouvence, Clarins va également lancer une référence spéciale jeune fille. Objectif: faire entrer les jeunes dans les circuits sélectifs. Il faudra attendre fin 2012 pour que l'ensemble de la gamme soit renouvelé. En attendant, Clarins a réussi à changer son image. Là encore ce sont les tests réalisés auprès de ses clientes qui le disent: la marque a retrouvé modernité, prestige et lettres de noblesse. Sa pureté est appréciée notamment par les jeunes, tout comme son luxe non ostentatoire qui colle à l'ère du temps, anti-bling-bling. Mission accomplie.

(entretien)

 

Philip Shearer, président du directoire

 

«Clarins doit grandir à l'international»


Quelles sont vos ambitions sur la marque Clarins?

Philip Shearer. Elles sont plus globales. Clarins est leader européen du soin dans le circuit du sélectif, mais aussi numéro un en France et en Grande-Bretagne. La marque réalise un peu moins de 50% de son chiffre d'affaires sur le Vieux Continent. Elle doit grandir à l'international. Nous souhaitons notamment conquérir de nouveaux marchés en Asie, aux États-Unis et en Amérique latine.


Vos investissements publicitaires ont-ils été revus à la hausse?

Ph.S. Oui, ils ont augmenté de 50% pour s'établir à 90 millions d'euros annuels en achat d'espace. Dans chaque pays, nous cherchons une part de voix égale à notre part de marché. Et nous concentrons nos investissements sur nos grands lancements, comme Capital Lumière. La campagne de publicité de ce nouveau soin a été réalisée en interne par le photographe suisse Guido Mocafico. Nos produits sont proches de la nature. Nous montrons des portraits de femmes qui ne prennent pas trop la pose. La beauté de la femme doit être aussi naturelle.


Et sur la Toile?

Ph.S. Nous augmentons globalement notre présence sur Internet avec des sites plus performants, un meilleur référencement, une présence sur les réseaux sociaux. Clarins a été la première marque à dialoguer avec ses clientes et à se mettre à leur écoute via une carte accompagnant ses produits. Il s'agit de numériser cette démarche. Les valeurs de Clarins, la proximité, la communication et la sincérité, sont particulièrement en phase avec l'ère du digital.

 

Entretien: Delphine Masson

 

Voir le palmarés complet  2011

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