Étude
Selon une étude exclusive réalisée par Shefferd pour Stratégies, les rémunérations sont globalement orientées à la hausse. C’est souvent moins le résultat du dynamisme économique que de la pression sur les talents.

Avec une croissance du PIB ralentie à 1,5 % en 2018, la France a terminé l’année avec le sentiment d’un dynamisme économique modéré et de fortes tensions sociales dont atteste la mobilisation des Gilets jaunes. L’étude du cabinet Shefferd sur les salaires de la publicité, menée fin janvier auprès de 32 agences représentant 2247 salariés, s’inscrit dans ce contexte. « Globalement, la période est plutôt faste, note Marc de Torquat, cofondateur de Shefferd, et en même temps, on sent que le monde de l’agence fait face à des enjeux forts : outre l’exigence des clients, il doit affronter les groupes de conseil [Accenture, Deloitte, etc.]et les start-up sur des sujets comme la data ou l’IA. La guerre des talents fait rage, et pas seulement entre agences. L’agence a parfois pour compétiteur son propre client. »

De nettes hausses de rémunération

L’étude Shefferd, menée en partenariat avec Stratégies, rassemble toutes les spécialités d’agences (pub, interactive, corporate...). Elle montre d’abord une orientation générale à la hausse, surtout dans les fonctions commerciales. De nettes hausses de rémunération sont observables dans les métiers de directeur conseil (+7,7 %), mais aussi de social media strategist (+7,7 %) de directeur du planning (+5,3 %) ou de planneur stratégique (+5,8 %). Tous les salaires médians supérieurs à 50 000 euros bruts annuels sont en hausse, ou au moins stables. Et huit agences sur dix pensent, encore cette année, augmenter leurs rémunérations. « Après des années “flat”, explique Olivier Altmann, président de la délégation publicité de l’Association des agences-conseil en communication (AACC), il y a eu une certaine reprise de l’activité et un regain d’optimisme pendant les dix premiers mois de l’année. Un effet Macron qui a parfois obligé à s’aligner pour garder certains talents. »

Ce réajustement est toutefois en trompe-l’œil. D’abord, car il est souvent la conséquence de la pression financière sur les groupes (WPP, Publicis, Interpublic…). Il en résulte des réorganisations qui se traduisent le plus souvent par des départs qui sont autant de motifs de réévaluations des périmètres, et donc des salaires. « C’est tout le paradoxe, quand tu serres les boulons, tu dois aussi arrondir les angles », résume Olivier Altmann. Ensuite, car les plus faibles rémunérations sont moins orientées à la hausse, notamment dans les fonctions de la data, ce qui témoigne d’une difficulté à rester compétitif sur des métiers extrêmement demandés dans l’ensemble de l’écosystème digital.

Un manque de profils expérimentés

« Avec l’éclatement du paysage, les agences sont dans l’incapacité d’attirer des profils expérimentés, note Marc de Torquat. Elles misent sur le recrutement de jeunes et la formation, mais elles manquent parfois de profils capables de former. Les agences doivent se poser la question : quels avantages y a-t-il à les rejoindre. »  Sur les plus basses rémunérations, Publicis a fait un effort en fin d’année en concédant une prime pour ses 31 % de salariés gagnant moins de 2500 euros bruts par mois. « Les patrons ont vu qu’avec les Gilets jaunes, il y avait des risques à ne pas prendre en compte des situations individuelles, du moins j’ose espérer », conclut le fondateur de Altmann+Pacreau.

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