L'actu vue par...
Gabriel Gaultier, fondateur et président de l'agence Jésus & Gabriel, commente pour Stratégies l'actualité sous l'angle de l'humour.

Le traitement de l’actualité par les humoristes dans les médias.
Je dirais qu’il y en a trop. Les humoristes sont partout, le format court règne et la pensée facile qui va avec. Le temps long, l’analyse reste le format de l’information. Ce n’est pas par hasard qu’il n’y a pas d’humour sur France Culture. Je suis bien content par exemple que Plantu soit enfin parti de la une du Monde avec ses dessins pleurnichards à la symbolique démago. L’ironie, c’est autre chose : c’est faire comprendre qu’il y a une face cachée dérrière les faits et Libération dans ses titres est souvent très bon dans cet exercice. Mais attention : quand ils représentent Fillon en Margaret Thatcher, on retombe dans la pensée facile, déja acceptée par le public du journal, on n’est pas loin de la propagande. Le contraire de la vérité n’est pas le mensonge, mais la certitude. L’information doit se battre en permanence contre les certitudes en vérifiant par trois fois les faits et en allant voir ce qui se passe derrière eux. L’humour n’a rien à faire là-dedans. Sa place est au bistrot, loin des micros.


Eden Hazard fait le bad buzz en jouant l'égérie d'un burger pour McDonald's. Peut-on encore faire de l'autodérision en publicité ? 
L'autodérision en publicité, c’est une forme de politesse. Une façon de dire : ok, on vous dérange sur votre trajet ou avant votre vidéo, alors on va prendre le risque de vous amuser. Ce sont plutôt les grand sentiments qui trouvent difficilement leur place dans la pub. La vertu et l’argent, cela reste un mariage difficile.

Le climat de censure des humoristes qui sévit sur Europe 1 et dans les médias du groupe de Bolloré.
Les humoristes me font chier à la radio comme à la télé. J’écoute France Inter à 7 heures pile pour ne pas me taper un abruti content de ses blagues satisfaites juste avant. Le problème, ce n’est pas ce que Bolloré fait des humoristes, mais ce qu’il veut faire de l’information. Posez-lui la question.

 

L’humour présidentiel, de Chirac à Macron, en passant par Hollande. Une désacralisation du statut du président, notamment dans le cadre du traditionnel défilé militaire de la fête nationale du 14 juillet.

L’erreur fondamentale du quinquennat de Macron a été de ne pas parler aux Français le 14 Juillet 2017. Il y en a eu d’autres, mais celle-là reste lourde de conséquences parce que c’était le début. Aucune blague ne rattrapera ça. C’est dommage parce que dans le dialogue, c’est là qu’il est le meilleur. Il pouvait décoincer le pays. Il aurait pu être le Tony Blair français au moins pour cent jours, il a préféré devenir Lecanuet.

Les influenceurs de l’ultra-droite qui envahissent les réseaux sociaux, et utilisent les mêmes codes que les humoristes/youtubeurs classiques.
Vous vous attendiez à quoi ? Un bateleur reste un bateleur. Je n’ai jamais aimé ni Coluche ni Desproges dans leur façon de caricaturer les braves gens ou de cracher sur la politique. Passé le rire, restent les mots. Quand Blanche Gardin dit d’un humoriste noir : « Mes grands parents possédaient ses grands parents », on rit bien, c’est très « politiquement incorrect ». Je suis sûr qu’à Valeurs Actuelles, ils se passent la blague.

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