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Dans un cadre règlementaire plus restreint, les équipes des candidats ont tout de même tenté de mieux cibler les électeurs en multipliant les canaux, notamment au niveau régional. Mais le contexte géopolitique a rendu la campagne plus complexe.

Il est, pour l’instant, le seul candidat à se faire taper sur les doigts. Éric Zemmour est sous le coup d’une enquête de la Cnil après un démarchage par SMS de son parti, Reconquête, ciblant des Français de confession juive. Or « le traitement des données à caractère personnel qui révèle […] les convictions religieuses » est « interdit », indique la Cnil. Sauf si « la personne concernée a donné son consentement explicite au traitement de ces données ».

Globalement, les équipes ont amélioré leur niveau de technicité ces dernières années. La campagne de 2022 est la première élection présidentielle à se dérouler après l’arrivée du RGPD et après le scandale Cambridge Analytica, ce qui a imposé de nouvelles directives aux candidats. « Sur les réseaux sociaux, notamment, le potentiel est bien plus limité, explique Vincent Moncenis, patron de DigitalBox, éditeur d’une solution de communication politique omnicanale. Il est impossible de faire des post sponsorisés ciblés, six mois avant l’élection, et de faire remonter les données. Cela redistribue les cartes sur les autres canaux. »

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Code postal requis

Les réseaux sociaux vont ainsi chercher à récupérer des données via des formulaires, pour maintenir le contact. Parmi celles-ci, le code postal qui, croisé avec les listes électorales, permettra une régionalisation des stratégies. Loïc Péron, patron de l’éditeur de solution de CRM Validity, s’est abonné pendant un mois à tous les mailings des candidats. Après avoir reçu près de 200 mails, il en a tiré quelques conclusions. Seulement quatre d’entre eux utilisaient une solution d’e-mailing, mais toutes les contraintes du RGPD étaient respectées. « Les formulaires d’inscription contiennent surtout la rubrique “code postal” afin d’avoir un recensement pour les listes électorales. Il semblerait que les numéros de téléphone soient peu demandés, ce qui ne permet pas d’instaurer une campagne électorale par SMS », analyse-t-il.

Le but ? Amener les gens à participer à des événements locaux, pour pouvoir convaincre dans le dialogue. Idem pour les stratégies de porte-à-porte, « une technique qui reste assez porteuse », admet Loïc Péron. « L’enjeu consiste à toucher des personnes précises, et d’atteindre un niveau important de granularité, continue Vincent Moncenis. Notamment pour trouver les électeurs d’un ancien candidat, afin de les amener sur son terrain. De cibler un électorat précis qui correspond à un objectif dans les sondages. »

Mais il reste difficile de cibler précisément : il est interdit d’acheter une base de données commerciales pour l’utiliser à des fins politiques. « C’est donc en multipliant les canaux dans une même région – courrier, porte-à-porte, phoning, SMS, e-mail –, que vous arriverez à toucher, comme un rasoir à cinq lames qui finira bien par être efficace. » Sans avoir 100 % de la cible, au moins une ou deux lames peuvent atteindre l’objectif. Mais la complexité a été d’autant plus importante cette année que le public était moins réceptif. « La pandémie et surtout la guerre en Ukraine ont un peu détourné les Français du dialogue. On a vu que plusieurs opérations ont été annulées dès janvier. »

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