Web3

Lors d'une conférence sur les cryptomonnaies, organisée les 5 et 6 septembre, économistes, chercheurs et journalistes ont plaidé pour une régulation du secteur, pointé du doigt pour ses risques, comme le côté spéculatif, le manque d'information des populations défavorisées. 

Economistes, chercheurs et journalistes critiques des cryptomonnaies se réunissent à Londres et en ligne lundi 5 et mardi 6 septembre pour se faire entendre des régulateurs au sujet des cryptomonnaies, secteur en plein essor malgré un plongeon ces derniers mois.

Lire aussi : Les plateformes de cryptomonnaies dans la tourmente

« Quelques centaines de crypto-oligarques se font de l'argent en créant de l'argent », a dénoncé dans un message enregistré le premier intervenant de cette conférence, Brad Sherman, élu démocrate de la Chambre des représentants, qui donne le ton de l'évènement.

« Il y a tant de conférences sur les cryptomonnaies, mais elles sont financées par l'industrie », juge Martin Walker, un des organisateurs cette conférence baptisée Crypto Policy Symposium 2022.

« Inclusion prédatrice »

Martin Walker réfute le surnom donné par certains médias spécialisés de « conférence anti-crypto », et défend vouloir « casser certains mythes créés et propagés par l'industrie de la crypto, et pousser les législateurs à poser les bonnes questions », explique-t-il à l'AFP.

Lors de la première discussion en ligne de la conférence, des spécialistes des régulations ont plaidé pour une application des lois sur les titres financiers au marché des cryptomonnaies.

Lors de la seconde, des expertes de l'inclusion financière ont alerté contre le danger de
l'« inclusion prédatrice »: proposer des services financiers à des populations défavorisées à des coûts accrus et sans exposer clairement les risques représentés.

Un peu comme lors du scandale des prêts hypothécaires « subprime » lors de la crise financière, ou des prêts à la consommation à court terme à des taux usuriers.

Le prix du bitcoin a chuté d'un sommet à près de 69 000 dollars en octobre dernier à environ 20 000 dollars, laissant beaucoup d'investisseurs sur le carreau.

Désespoir

De nombreuses banques centrales et régulateurs des marchés financiers ont averti sur les dangers représentés par les cryptomonnaies, qu'elles décrivent volontiers comme des actifs spéculatifs plus que comme des monnaies, mais la régulation reste pour l'instant limitée.

En l'absence d'un cadre législatif clair, les utilisateurs sont rarement informés au moment d'effectuer leurs investissements.

La faillite de la plateforme de placements en cryptomonnaies Celsius a plongé des clients dans le désespoir, incapables de récupérer des placements qui représentaient parfois l'intégralité de leurs économies.

« Les gens ne comprenaient pas que leur argent n'est pas en sécurité, et ils ne comprennent toujours pas pourquoi ils ne peuvent pas le récupérer », explique à l'AFP Amy Castor, journaliste indépendante qui fait partie des critiques des cryptomonnaies les plus écoutées et virulentes.

« Arnaques inhérentes au système »

« Nous voulions que nos voix soient entendues car il est important que les régulateurs comprennent les risques, comment les cryptomonnaies fonctionnent et les arnaques qui sont inhérentes au système », tance-t-elle.

Ancienne journaliste pour des médias spécialisés sur les cryptomonnaies, elle s'est fait connaître pendant l'envolée des prix de 2017 et le crash qui a suivi pour ses critiques de Tether, ce stablecoin au cours arrimé au dollar mais dont la trésorerie reste obscure.

« Le problème, c'est que les cryptomonnaies ont pris une telle ampleur qu'il y a maintenant des sommes importantes qui passent dans le lobbying, beaucoup d'argent qui finance des campagnes électorales », notamment aux Etats-Unis, explique-t-elle.

Les maires enthousiastes

Le Représentant américain Brad Sherman s'est montré encore plus direct pendant la conférence en ligne: « Les fans de cryptos dépensent des dizaines de millions de dollars à Washington pour s'assurer que l'industrie soit régulée aussi peu que possible », accuse-t-il dans son message.

Certains élus affichent fièrement leur soutien au secteur: les maires de Miami et New York ont affirmé vouloir faire de leurs villes les capitales des cryptomonnaies, et des projets de devises propres à ces municipalités sont à des stades divers de développement.

« Des responsables font de grandes déclarations sur les bienfaits des cryptomonnaies en se focalisant sur les vertus théoriques de ces technologies mais ignorent leur effet réels », s'inquiète Tonantzin Carmona, chercheuse à la Brookings Institution.

En mars, elle a publié un article de recherche sur le danger potentiel représenté par l'enthousiasme des maires pour les cryptomonnaies.

Alors qu'elle craignait d'être attaquée sur les réseaux sociaux, elle a été bien reçue par la petite communauté des crypto-sceptiques, qui lui a permis de voir qu'elle n'était pas seule. « Il y a une différence entre être haineux et être critique », plaide-t-elle.

Lire aussi : Faut-il avoir peur du krach des cryptos ?

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.