Boissons
L'enseigne française vient de remporter la communication outre-Manche de la marque de «soft drinks», qui n'a en France ni le même propriétaire ni le même positionnement. Delphine Le Goff @DelphineLeGoff1

Dans les agences, on évoque souvent les «murailles de Chine», censées garantir une parfaite étanchéité entre des budgets concurrents. Dans le cas de Schweppes, c’est le tunnel sous la Manche qui délimite les périmètres de ses deux propriétaires: Orangina et Coca-Cola, qui exploitent chacun la marque, l’un en France, l’autre en Grande-Bretagne. Le groupe Schweppes est la propriété de Cadbury depuis 1969, qui a cédé une partie de l’exploitation de sa marque Schweppes à The Coca-Cola Company en 1998. Le groupe d’Atlanta gère ainsi le «tonic» au Royaume-Uni, et vient de confier sa communication à une agence française, Herezie.

Dans l’Hexagone, c’est Fred & Farid qui gère la communication de Schweppes pour Orangina Schweppes, que le groupe japonais Suntory Group a racheté en 2009. «Les campagnes avec Uma Thurman et Penelope Cruz ont l’air de campagnes internationales alors qu’elles ne s’adressent qu’aux marchés français et belge», relève Julien Hayat, content excellence manager (responsable publicité) de Coca-Cola UK, qui n’a «aucun contact avec l’agence Fred & Farid».

Humour décalé

Julien Hayat a choisi l’agence Herezie «sans compétition». «Chez Coca-Cola, nous établissons des listes de partenaires créatifs à qui nous faisons ensuite appel: Herezie en faisait partie, qui avait déjà œuvré sur Cappy, la marque sous laquelle nous commercialisons Minute Maid en Europe de l’Est, explique-t-il. De plus, de par la personnalité de ses dirigeants, Luc Wise, qui est franco-anglais, et Andrea Stillacci, un Italien qui a beaucoup travaillé en Angleterre, le choix était naturel.» Herezie devrait d’ailleurs prochainement annoncer le gain d’eaux minérales du groupe Coca-Cola.

Le terrain de communication choisi outre-Manche diffère sensiblement des créations françaises de Fred & Farid. «A la fin des années 1980, John Cleese, des Monty Python, faisait la pub de Schweppes, rappelle Andrea Stillacci, cofondateur et directeur de la création d'Herezie. Nous avons voulu revenir à ce sens de l’ironie, à cette élégance décalée, en faisant incarner la marque par des personnages qui n’ont plus 18 ans, qui n’ont rien à prouver.» La campagne d’affichage, dans les rues britanniques depuis le 30 mars et conçue autour des plateformes «Separating women from girls» et «Separating men from boys», devrait être suivie d’un film au cinéma. «Nous nous adressons aux vrais adultes, qui ont assez d’expérience gustative pour apprécier l’amertume de Schweppes. Une vision assez disruptive dans l’univers des "soft drinks", souvent tournés vers les plus jeunes», ajoute le créatif.

Marketing schizophrènique

Un positionnement également retenu en France pour le lancement de Finley en février 2014, une boisson créée par Coca-Cola pour concurrencer... Schweppes. Schizo? «Du point de vue de la gestion de portefeuille, c’est imparable; d’un point de vue marketing, c’est effectivement schizophrénique», reconnaît Julien Hayat. Omar Sy est l’icône de cette nouvelle marque, dont la campagne a été créée par Publicis Conseil. Chez Coca-Cola, on a d’ailleurs envisagé un moment de confier la communication de Schweppes à Publicis… avant de se raviser. «En termes de gestion de marques, ça devenait un peu complexe», s’amuse Julien Hayat. It’s complicated indeed.

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