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Pour le lancement d’«Assassin’s Creed Unity», Sid Lee Paris a imaginé une campagne TV-cinéma réalisée de manière collaborative avec les fans du jeu d'Ubisoft. Ce mariage entre film classique et dispositif intégré a séduit le jury du Grand Prix Stratégies de la publicité.

A première vue, le trailer animé du jeu «Assassin’s Creed Unity», déjà primé à de nombreux festivals (D&AD, Eurobest, Club des directeur artistiques…) et qui remporte le Grand Prix Stratégies de la publicité 2015, est relativement simple. Au milieu de la crasse et de la pauvreté dans un Paris pré-révolutionnaire, alors que le petit peuple peine à survivre, surgissent des héros: les fameux «Assassins». Mi-Robins des bois mi-Zorros, ces justiciers luttent contre la tyrannie et l’oppression, envahissent les palais, s’élèvent contre les gardes armés et entraînent dans leur combat contre la royauté tous les opprimés. Diffusé en octobre 2014 sur les chaînes de télévision et dans les cinémas du monde entier (sauf les Etats-Unis), ce film publicitaire signé Sid Lee Paris (agence médias: Mindshare pour la France, le Royaume-Uni, l’Espagne et l’Allemagne) immerge les spectateurs dans l’univers temporel et spatial de ce jeu d’Ubisoft, septième opus de la série «Assassin's Creed», sorti en novembre 2014.

Mais derrière le classicisme apparent du trailer se cache une toute autre histoire: tous les «Assassins» révolutionnaires et avides de justice qui y apparaissent ne sont pas le fruit d’un logiciel ou d’un seul et même créatif. Ils ont été dessinés par les fans du jeu eux-mêmes, qui ont ainsi pu participer activement à la création de la publicité. «Nous avons d’abord travaillé deux mois sur une première piste avec un film et une opération digitale, raconte Sylvain Thirache, fondateur et directeur de la création de l'agence Sid Lee Paris. Puis, de débrief en débrief, nous avons revu la copie et nous nous sommes finalement inspirés du mode “coop” du jeu [pour la première fois sur la licence Assassin’s Creed, les joueurs peuvent jouer en coopération afin d’unir leurs forces dans un but commun] pour réaliser un trailer sur la même idée participative.» «Cette campagne est directement reliée à notre produit», renchérit Guillaume Carmona, directeur marketing d’Ubisoft pour la région EMEA (Europe, Moyen-Orient, Afrique).

1430 personnages

Pour rendre cette idée possible, Sid Lee Paris et la société de production Iconoclast ont créé un site internet ad hoc, acunity-unite.com, sur lequel les internautes pouvaient, à l’aide de 5 millions d’options différentes (!), créer et personnaliser leur personnage à leur image. Au moment du tournage du «case study» de l’opération (fin 2014), plus de 2 millions de visiteurs avaient été enregistrés sur le site, pour un temps moyen de visite supérieur à six minutes. «Le jeu bénéficie d’une grande communauté de fans qui cherchent toutes les informations possibles sur Assassin’s Creed sur internet. Trouver des internautes pour participer à l’opération a été facile», glisse Sylvain Thirache. «En termes d’engagement, les résultats ont été 20 à 30% supérieurs à nos campagnes précédentes», se félicite Guillaume Carmona, qui ajoute: «C’est la première fois qu’on réussit une campagne intégrée sur autant de temps [de juin à octobre 2014] et avec autant de personnes.» Au final, deux cent mille personnages customisés ont été créés virtuellement. A la suite d’un vote en ligne, les 1 430 plus appréciés ont été intégrés un par un au trailer réalisé par le réputé Joseph Kosinski (Tron et Oblivion). Pour relever ce challenge créatif, l’agence a travaillé avec Blur, un studio d’animation basé à Los Angeles.

Outre la version classique diffusée à la télévision et au cinéma, une version interactive a été mise en ligne. Les internautes pouvaient l’arrêter à tout moment pour zoomer et chercher leur avatar. Pour arriver à un tel degré de précision et de netteté, les équipes de Sid Lee Paris, d’Iconoclast et de Blur ont créé un Giga Pan (photos panoramiques composites à haute résolution) permettant d'entrer dans le film. Là encore, le succès semble a été au rendez-vous puisque cette vidéo interactive a déjà été partagée plus de 300 000 fois sur les réseaux sociaux. Dans cette campagne intégrée et collaborative, dont le budget de production était légèrement supérieur au million d’euros, «le film ne pouvait pas se passer du digital, et inversement», résume Sylvain Thirache. Sans oublier que les fans du jeu étaient aussi alpagués dans la rue. En effet, à Londres, Barcelone, Paris, Stockholm ou Amsterdam, des affiches digitales mettaient en avant des avatars réalisés par des internautes habitant ces villes.

Intégration à la mode?

Après Marcel et «Les Fruits et légumes moches» d'Intermarché, c’est donc la deuxième année consécutive que le jury du Grand Prix Stratégies de la publicité récompense une campagne intégrée. Une tendance? «C’est conjoncturel, assure le président du jury Alexandre Hervé, vice-président et directeur de la création de l’agence DDB Paris. C’est ce que recherchent les marques, mais nous n’avons pas fait de racisme anti-publicité classique.» D’ailleurs, si Marcel était à nouveau cette année dans le carré final pour son client Intermarché avec une nouvelle campagne intégrée pour «Le Jus le plus frais», s’y trouvaient également des campagnes plus traditionnelles que sont les affiches «Objets» du Musée de la Grande Guerre du Pays de Meaux (DDB Paris) et la saga télévisée «Electric» d’EDF (Havas Paris). Mais finalement, le jury a été séduit par «une opération complète et pertinente qui a bien pris en  compte les envies et les prérogatives des amateurs de jeux vidéo, tout en restant discrète et agréable à regarder» pour les néophytes, résume Alexandre Hervé. Le directeur marketing d'Ubisoft, Guillaume Carmona, y voit «en quelque sorte une reconnaissance de notre créativité [qui] nous permet de sortir du monde du jeu vidéo pour devenir un produit culturel grand public».

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