Crise
Le scandale qui frappe le groupe automobile allemand, accusé d'équiper ses voitures d'un logiciel qui déjouait les tests antipollution, le plonge dans une crise sans précédent. Gilles Wybo avec Alain Delcayre @GillesWybo @adelcayre

Petit logiciel, énormes conséquences. En dissimulant dans ses véhicules de marque Volkswagen et Audi au cours des années 2009 à 2015 un petit logiciel capable de déjouer les tests antipollution, le groupe automobile allemand, qui a beaucoup misé sur la communicatuon autour de ses véhicules «propres», a joué très gros... et est en train de perdre. Onze millions de véhicules dans le monde seraient concernés (Golf, Audi A3, Passat, Beetle...). 

Les conséquences pour l'entreprise sont catastrophiques. Le coût des rappels de véhicules s'annonce astronomique. A cela va s'ajouter une amende probablement record (18 milliards de dollars au maximum) et la menace d'un krach boursier (l’action Volkswagen a déjà dévissé de 35% sur les deux premiers jours de la crise). Cette image de constructeur de «fausses voitures vertes» risque de coller pendant un moment à l'industriel allemand. 

Dès dimanche 20 septembre, le PDG de Volkswagen Martin Winterkorn, qui annonçait sa démission trois jours plus tard, déclarait: «Nous avons reconnu les faits devant les autorités. Les accusations sont justifiées. Nous collaborons activement  [...] pour établir les faits rapidement et de façon transparente.» Mais la spirale ne fait que commencer. Après les États-Unis, l'Allemagne et la Corée du Sud, le gouvernement français réclame à son tour des contrôles «au niveau européen» sur tous les constructeurs.

Discrédit mondial

«On se situe là dans la pire des situations. Il ne s'agit pas d'un problème mécanique ou d'une erreur de gestion, mais bien d'une tricherie, et sur un sujet sensible, la protection de l'environnement», constate Cyrille Arcamone, associé chez l'agence corporate Maarc et expert en communication de crise. «Le discrédit est d'autant plus fort qu'il s'agit d'une marque mondiale touchant toutes les catégories de la population compte tenu de l'étendue de sa gamme», ajoute-t-il. 

Du côté de la filiale française, c'est un silence radio gêné. «Nous n'avons pas d'information à notre niveau. Nous sommes dans l'attente d'éléments de l'Allemagne», indique-t-on chez le constructeur qui a suspendu ses investissements publicitaires en France jusqu'à nouvel ordre. Douzième annonceur français en 2014, Volkswagen a investi 232,8 millions d'euros dans les médias. 

Sur le fond, le problème d'image et de réputation pour le groupe, emblème du «made in Germany», reste entier. Dans un premier temps, les mesures d'urgence s'imposent, selon Cyrille Arcamone: «Faire d'abord amende honorable, puis enquêter en interne et désigner les fautifs, enfin mettre rapidement en place des dispositifs pour éviter de telles dérives».

Chaotique

Mais pour Patrick Lagadec, consultant et auteur du Continent des imprévus. Journal de bord des temps chaotiques (Les Belles Lettres, octobre 2015), «nous sommes bien au-delà de la gestion de crise. Or, nos cultures d'entreprise ne sont pas faites pour ces crises en milieu totalement instable que je qualifie de chaotiques».

Quoi qu'il en soit, le plus dur sera de restaurer la confiance. «Les consommateurs vont se dire à juste titre: s'ils nous mentent sur la performance environnementale de leurs véhicules, ils peuvent nous mentir sur leurs autres performances. En communication, la pire des choses est la manipulation», avance Cyrille Arcamone, qui souligne que le grand défi de Volkswagen sera de mener une communication de reconstrution à la hauteur de sa communication commerciale, souvent vantée pour sa qualité.

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