Audiovisuel
La plateforme de SVOD organisera mi-octobre à Paris un festival de films, séries et documentaires. Une opération d'image pour la marque qui célèbre sa première année en France.

«Very specific festival», «festival ultra-précis» en français dans le texte. Précis, à l’image des algorithmes qui guident les recherches de ses utilisateurs? Tel était en tout cas, à l’origine, le nom de code employé par Netflix et son agence, Ogilvy & Mather, pour désigner le nouvel événement inventé par la marque, en mai dernier. Il y a «presque une éternité en temps netflixien», s’amuse Xavier Albert, directeur marketing France. Le Netflix Fest, puisque telle est in fine l’appellation retenue, se tiendra à Paris du 15 au 19 octobre dans quinze lieux insolites, déclinés en quinze genres ultra-spécifiques, en effet: «festival des séries qui vont te faire traverser l’Atlantique», «festival du film où la vie du héros ne tient qu’à un fil»...

«Notre équipe marque, la "brand team" basée à Beverly Hills, a été séduite par le projet d’Ogilvy France et le fait qu’il se déroule à Paris», raconte Xavier Albert, qui dirigeait le marketing de The Walt Disney Company France avant de rejoindre Netflix. «La programmation du festival, du documentaire au film d’horreur, entend toucher tous les consommateurs, résume Nicolas Lautier, directeur de création chez Ogilvy & Mather. Tout en créant un rendez-vous populaire et culturel à Paris et en montrant l’étendue du catalogue Netflix.»

Offre enrichie

Le catalogue de programmes fut, à ses débuts, considéré comme décevant par ceux qui l’attendaient comme le lait sur le feu. «Les critiques ont pu être fondées, reconnaît Xavier Albert, mais notre offre s’est depuis améliorée, que ce soit en volume, ou en qualité, grâce à notre politique de créations originales notamment.» Selon les experts, comme Philippe Guedj, rédacteur en chef du site Daily Mars, «on sent un frémissement de la qualité de l’offre depuis cet été, avec un enrichissement des films proposés dans la contrainte de la chronologie des médias, mais aussi, bien sûr, les séries originales comme Narcos, Daredevil ou encore Sense 8, des frères Wachowski».

Au-delà de la mise en avant des appâts de Netflix, le festival sera aussi l'occasion, selon Xavier Albert, de «célébrer la première année de Netflix en France». Une année durant laquelle le service de SVOD créé en 1997 par Reed Hastings a eu à cœur d’imposer les valeurs de sa marque: «L’humilité, notre volonté de nous placer du côté du consommateur et notre côté disrupteur, surprenant», énumère son directeur marketing.

Culte du secret

De l’humilité, il fallait sans doute en afficher pour désamorcer les craintes et les fantasmes entourant le débarquement de l’Américain. «Nous ne sommes pas une marque américaine qui arrive pour tout écraser», lâche Xavier Albert. Pourtant, à son arrivée, la marque pratiquait avec les journalistes des méthodes de «press junkets» qui n’avaient rien à envier... à Hollywood. Avec à la clé, racontait-on, des contrats de confidentialité à signer.

Depuis, la marque reste également coite sur son nombre d’abonnés, qui varierait de 750 000 selon le cabinet d’études britannique Future Source Consulting à 250 000 selon le ministère de la Culture. Et ne révèle pas, non plus, le montant de ses investissements publicitaires.

Netflix ou le culte du secret? «Nous sommes très transparents sur bon nombre de sujets», se défend Xavier Albert. Comme sur la polémique suscitée par le supplément du Parisien, un cahier spécial de huit pages sur Netflix et l'arrivée en France de sa série Orange is the New Black. Publié cet été, il avait provoqué l’ire de la Société des journalistes du quotidien, qui y voyait de la publicité déguisée. «C’est un débat très parisien, microcosmique…», lâche Xavier Albert.

«Si les consommateurs s’étaient plaints, nous nous défendrions, mais là, il n’y a pas lieu, nous sommes très fiers de cette collaboration avec la rédaction du Parisien. Nous ne sommes pas là pour acheter les médias.» Mais plutôt, poursuit le directeur marketing, «pour envoyer le bon message au bon moment à la bonne personne, et pousser les limites de la créativité, en produisant des contenus divertissants, pas subis par le consommateur».

Mise en scène marketing

Les contenus produits par les consommateurs sur les réseaux sociaux seront d’ailleurs eux aussi les bienvenus pendant le festival, auxquels ont été conviés influenceurs, blogueurs et autres «instagrameurs». «Les premières retombées presse ont été très fortes, tout autant que sur les réseaux sociaux», se félicite Xavier Albert.

Rien d’étonnant, selon Pascal Lechevallier, président de l’agence de nouveaux médias What’s hot et fin connaisseur du cas Netflix. «Netflix n’a pas inventé la SVOD mais a inventé le marketing de la SVOD –et la manière d’en parler, estime-t-il. Dès que Netflix balance une information, que ce soit un accord avec un réalisateur, une petite phrase de Reed Hastings ou de son directeur des algorithmes, elle est immédiatement reprise dans le monde entier. La marque a complètement réussi à sublimer son activité poussiéreuse (et principale) de distributeur/diffuseur en mettant l’accent sur ses activités de producteur, comme avec Marseille, première production française de Netflix, qui s’offre Gérard Depardieu. Une excellente mise en scène marketing de son activité, favorisée par un vaste plan de redéploiement mondial.»

Ville test

Cette mise en scène pourrait bien s’affiner au niveau local. «Il existe une culture très "test and learn" chez Netflix, et Paris est un test pour le festival», souligne Xavier Albert. Ce dernier, au fil de la conversation, indique que l’un des autres leitmotivs de la marque est «See what’s next».

Justement, quelle sera la prochaine étape du Netflix Fest? «Une deuxième édition, si l’événement est un succès… Nous verrions bien, également, un développement en région, à Bordeaux, Lille…» «Et aussi à Marseille!», glisse le directeur de création d'Ogilvy, Nicolas Lautier. «C’est vrai que Marseille aurait du sens», s’amuse Xavier Albert. L’ultra-ciblage, toujours.

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