Diagnostic
Invité à dévoiler les ingrédients de ses tampons, Tampax n’a répondu que de manière évasive, s’attirant les foudres de ses utilisatrices. Comment la marque doit-elle faire face à cette crise de confiance ?

Après le témoignage d’une mannequin américaine, amputée d’une jambe à la suite du syndrome du choc toxique engendré par le port d’un tampon, une étudiante française a lancé en août dernier une pétition en ligne pour inciter Tampax (Procter & Gamble) à en dévoiler la composition. Car si ces produits sont utilisés de manière très périodique par la gent féminine, la réglementation française n’oblige pas leurs fabricants à fournir la liste complète des ingrédients utilisés.

Grâce à la mobilisation des quelque 70 000 signataires, Procter & Gamble a répondu cet automne, d’après 60 Millions de consommateurs: «Les fibres absorbantes de nos tampons Tampax sont principalement en coton, en rayonne [de la viscose] ou un mélange de coton et de rayonne et peuvent contenir du polyéthylène, du polypropylène et du polyester.» À savoir des plastiques mélangés à d’autres produits de synthèse…

Quelques semaines plus tard, une étude argentine révélait la présence de glyphosate, soit un produit herbicide classé «probablement cancérogène» par l’OMS, dans 85% des protections intimes commercialisées. Pour autant, Tampax n’a pas repris la parole. Un silence critiqué en ligne par les utilisatrices de tampons inquiètes pour leur santé, mais également commenté dans la presse. De quoi entacher la réputation de la marque. Même si, selon des experts du secteur, les ventes de Tampax n’ont pas été véritablement impactées pour l’instant. Mais le numéro 1 du secteur peut-il se permettre d'être absent du débat encore longtemps?



Reco n° 1 «Tampax doit rester dans l’émotionnel»

Caroline Marchetti, associée fondatrice de l’agence Maarc

«Le problème principal, c’est que Tampax ne prend pas en compte l’émotion de ses utilisatrices. Cette non-réaction peut être considérée comme du mépris, d’autant plus que ces questions touchent une population féminine déjà ébranlée par l’affaire des pilules de troisième génération. Or, étant donné que c’est un sujet extrêmement intime, Tampax doit rester dans l’émotionnel et répondre aux questionnements des utilisatrices via les réseaux sociaux. La marque doit aussi leur répondre par la voix de consommatrices influentes. Comme Blédina ou Fleury Michon, Tampax doit engager une démarche de transparence pour inviter des femmes à venir visiter ses usines pour ensuite témoigner de la façon dont les tampons sont fabriqués. La marque doit en effet comprendre que ce n’est pas tant la composition des tampons qui est au cœur des inquiétudes, mais la façon dont ils sont faits et surtout les contrôles sanitaires engagés. Si Tampax donne finalement la liste de ses ingrédients, elle devra l’accompagner d’une explication de texte par un scientifique indépendant, au-dessus de tout soupçon.»



Reco n°2 «Communiquer a minima le temps de trouver un substitut»

Vincent Dujardin, directeur-conseil chez Alquier Communication

«La solution de facilité serait de dévoiler la liste des ingrédients. Mais si ces composites sont effectivement dangereux, Tampax ouvrirait la voie à toujours plus de questions et encore plus de polémiques. Et ça pourrait alors être risqué d’un point de vue du business. Je pense qu’en fait, c’est plus un sujet technique et de R&D qu’un sujet de communication. Tant que des substituts aux composites actuels des Tampax n’auront pas été trouvés, la marque ne peut pas communiquer. Tant que Tampax est dans l’impossibilité de donner des explications rassurantes, mieux vaut qu’elle reste dans le contrôle en répondant a minima aux sollicitations des utilisatrices. En revanche, il y aura une prime au premier acteur du secteur qui pourra communiquer sur des composés sûrs pour la santé. Cet acteur devra alors communiquer massivement sur ces solutions techniques.»

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