Marketing opérationnel
Radins.com, Ma Reduc, I Graal, Cuponation... les agrégateurs de bons plans se développent à tout va. Et les médias en profitent pour trouver de nouvelles sources de revenus.

Ils font le plus souvent entre six et huit lettres, et sont le fruit d’une grande bataille sur internet. Consommateurs, agrégateurs ou encore médias, les codes promo affolent le web. Dans les prochaines semaines, Le Monde et Ouest-France lanceront leur propre plateforme de «bons plans 2.0» avec la société Cuponation. Un site web ad hoc, aux couleurs du média, où l’internaute trouve tout ce qu’il veut pour réduire la douloureuse. «Le web a multiplié la concurrence et donc la possibilité de comparer les prix. Résultat, neuf français sur dix ont l’impression d’acheter trop cher quand ils n’achètent pas sans réduction», affirme Giulio Montemagno, vice-président senior international de Retail Me Not, la société américaine éditrice du site Ma Reduc, qu’elle a racheté en 2013.

Cette tendance explique les faibles résultats des périodes de soldes depuis quelques années. Les consommateurs trouvent des prix bas tous les jours. Ma Reduc comptabilise 5,5 millions de visites par mois et trois millions d’abonnés à sa newsletter. Les internautes y trouvent réductions en magasin, ristournes sur les livraisons, remboursements, cashback... mais aussi ces fameux codes promo. Un mot de passe à rentrer avant la validation du panier sur les sites e-commerce, pour obtenir ensuite dix, vingt, trente pour cent de réduction, voire plus.

Initialement développé pour les programmes CRM, des communautés restreintes d’internautes ont commencé à s’échanger ces codes sur des forums. C’était le cas de Radins.com, lancé en 2001, qui a été racheté en 2008 par la société Oxygem. Le site a commencé à s’éditorialiser, à proposer des articles, des astuces de consommation... Début 2015, ce média d’un nouveau genre est tombé dans le giron du groupe M6 et fait depuis la fierté de Nicolas de Tavernost, le président du directoire du groupe média.

Pour les e-commerçants, les codes promo boostent le taux de conversion du panier. À tel point qu’ils en deviendraient presque dépendants... «Un internaute ne valide son panier d’achat que dans un tiers des cas, note Denis Houdet, le fondateur et directeur général de Cuponation. Quand il existe un code promo, il est validé dans deux tiers des cas. Mais ce n’est pas tout: beaucoup d’internautes, lorsqu’ils ont un code promo à portée, augmentent leur panier et rajoutent un produit ou deux.» Plus qu’un moyen d’augmenter leur taux de conversion, ils augmentent aussi le panier moyen…

Tests titanesques

C’est pourquoi ces offres sont le fruit de partenariats avec les Asos, Amazon ou autres Vente-privee. Ces partenariats sont aussi le moyen pour les plateformes de codes promo d’obtenir du contenu exclusif. Les autres ristournes viennent soit des utilisateurs, soit d'équipes de dénicheurs de bons plans qui «pigent» sur internet. «Le plus dur est de vérifier qu’ils sont toujours valides», explique Renaud Vaillant, le directeur général de Radins.com. Dans ce type d'entreprise, un groupe d’employés est chargé de tester les codes promo, un travail titanesque qui peut concerner jusqu’à 23000 offres…

À la différence de Ma Reduc ou de Radins.com, Cuponation n’officie pas avec sa propre plateforme. «Nous avons opté pour un modèle à marque blanche et développons le site pour des médias», explique Denis Houdet. Après avoir lancé celui de L’Express en août 2014, c’est sa société qui a été choisie pour ceux du Monde et d’Ouest-France. Sur le même modèle qu’I Graal, qui, en plus de son propre site, gère ceux de BFM, du Parisien ou du Figaro.

Pour les médias, ces sites de bons plans augmentent le trafic du groupe sur internet, et permettent surtout d’être mieux référencé sur Google. «Le moteur de recherche préfère les sites diversifiés, explique une source experte en SEO. Et les articles journalistiques s’en retrouveront en retour mieux référencés grâce aux audiences générées.» D’autre part, pour tous les codes exclusifs à la plateforme, il est possible de tracer l’origine de la promotion. Et ainsi d’établir une commission –dont la moyenne est comprise 5 et 7%– et de la partager avec le média. Les journaux en ligne trouvent ainsi, plus qu’une audience, une source de revenu sonnante et trébuchante. Selon nos informations, pour le site de l’Express, ce sont 100 millions d’euros de volume d’affaires qui ont été générés pour les e-commerçants. Un rapide calcul permet d’estimer que le revenu du journal est de l’ordre du million d’euros.

Creuser le cross-canal

Et la tendance ne devrait pas s’arrêter là. Le rachat de Radins.com par M6 lui a permis de s’offrir gratuitement de la publicité en télé en janvier dernier –publicité conçue par l’Agence 19. «Maintenant que nous avons bien développé notre nombre d’utilisateurs, nous cherchons à les fidéliser. Notre objectif est de multiplier par deux le nombre de codes exclusifs», détaille Renaud Vaillant. Radins.com pense aussi à développer des offres conjointes avec la régie de M6. Idem pour les autres sites médias avec des offres packagées «code promo+bannière sur la page d’accueil».

De son côté, Ma Reduc a développé un partenariat avec le spécialiste des bons plans de restaurants La Fourchette pour diversifier son offre. Mais l’avenir est surtout au cross-canal. «Un client ne va pas comprendre pourquoi il peut avoir une réduction de 20% en ligne, qui ne fonctionne pas en magasin», estime Giulio Montemagno. Nous voulons accompagner les marques sur tout le parcours cross-canal.» En développant le mobile... Radins.com lancera son application au mois d’avril. Un bon moyen de récupérer de la data géolocalisée, par exemple.

Le cashback ne casse pas la baraque

Si les codes promo sont en pleine expansion, le cashback, lui, peine encore à pénétrer le marché français. Il avait généré 600 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2014, selon le Syndicat du marketing à la performance. Mais aux dires des experts, il ne tient pas ses promesses. Le principe de la commission reversée directement sur le compte du consommateur pour chaque achat, en contrepartie d'un abonnement payant mensuel, n'attire pas. En cause, l'image négative due à certaines arnaques, comparée à des pyramides de Ponzi, et le volet payant qui rebute.

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