Seuls au milieu de l’Atlantique, mais pas forcément seuls au monde. Les marins de la Transat AG2R La Mondiale filent actuellement tout droit vers l'île de Saint-Barthélemy, où est située la ligne d’arrivée de l’épreuve partie le 3 avril de Concarneau (Finistère). A terre, la famille, les proches, les sponsors des skippers et le grand public peuvent suivre, quasiment au quotidien, la course à bord des bateaux. Depuis cette édition, OC Sport Pen Duick, organisateur de la course, a équipé toute la flotte d’un système de transmission et imposé à tous les concurrents de transmettre une vidéo tous les deux jours.
Ainsi, la vie quotidienne des concurrents se dévoilent: sur Gedimat, ils se débarrassent des algues envahissantes, sur Agir, ils lancent une bouteille à la mer, sur Région Guadeloupe, ils sont envahis par du sable venu du Sahara, sur Cercle Vert, le duo est en pleine séance de bricolage… Ces instants de vie, et de course, créent une réelle proximité avec les skippeurs. Ils offrent surtout la visibilité nécessaire à une discipline impossible à suivre autrement.
«Oui, clairement, c’est du boulot supplémentaire pour nous», confie Tanguy Le Turquais, à la barre de Cuisine Ixina et joint par Stratégies alors que son bateau venait de croiser les îles du Cap-Vert. Avec son coéquipier Hervé Aubry, ils naviguent en queue de peloton, à cause de diverses avaries techniques. «Du coup, ces vidéos sont une chance pour nous, car elles nous permettent de faire parler de nous quand même, et de notre sponsor aussi», explique le navigateur.
La vidéo, compétence indispensable au skippeur d'aujourd'hui
Les vidéos du duo, pleines d’humour, tranchent avec celles des autres concurrents. Affublés de perruques de couleur, Tanguy Le Turquais et Hervé Aubry dansent sur le pont de leur bateau, cuisinent des… M&M’s ou jouent aux devinettes. «Une transat, ça peut être bien monotone par moment, s’excuse Tanguy Le Turquais. Les journées sont parfois longues.» Le jeune navigateur de 25 ans maîtrise la vidéo. Une obligation pour les marins professionnels, selon lui: «Cela fait partie du métier, c’est un plus pour trouver des sponsors. Pour moi, c’est assez naturel, car j’ai pris l’habitude de me filmer depuis que j’ai débuté la voile.»
Du côté de l’organisateur de la course, c’est une grande satisfaction: «Tous les skippeurs, même ceux qui étaient un peu réfractaires au départ, se prennent au jeu, indique Mathieu Sarrot, directeur des événements chez OC Sport Pen Duick. Ils nous demandent même des conseils. Cependant, il a fallu aussi les recadrer, car, parfois, cela pouvait tourner à La Croisière s’amuse.»
Un investissement conséquent en matériel et en formation
OC Sport Pen Duick a équipé les quinze bateaux d’un émetteur nouvelle génération: un modem Iridium Pilot (ex-Openport). Le premier challenge a été d’installer cette antenne satellite de près de 60 cm et pesant 11 kg sur un bateau relativement petit, le Classe Figaro Bénéteau (10 m de longueur et 3,4 m de largeur), où chaque espace est vital. «Il y avait beaucoup de contraintes, ce travail a duré six mois», rapporte Mathieu Sarrot. Il a fallu aussi installer un logiciel de montage sur les équipements informatiques des navires et envoyer tous les marins en formation technique et éditoriale. «Ils doivent apprendre les bons réflexes, comme filmer dans une tempête, par exemple», relève le dirigeant.
L’investissement de l’organisateur s’élève à 12 000 euros par bateau. «Mais le matériel nous appartient et nous pourrons le réutiliser pour d’autres courses», précise Mathieu Sarrot. Un savoir-faire et une valeur ajoutée intéressante pour OC Sport Pen Duick. Pour cette édition 2016, les images de la Transat AG2R La Mondiale ont été cédées à Infosport+… gratuitement. Ce ne sera peut-être plus le cas les années, et les courses, à venir.
