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Vingt ans après, la marque de prestige renoue avec l'égérie qui l'a accompagnée dans son accession au premier rang mondial du secteur de la beauté. Un coup de maître, selon les observateurs.

C'est un cas rare, surtout pour un annonceur de cette envergure: presque vingt ans après la fin de la saga publicitaire qui l'a lié à Isabella Rossellini de 1983 à 1997, Lancôme signe à nouveau avec l'actrice et mannequin. À 63 ans, elle rejoint l'équipe d'ambassadrices de la marque de L'Oréal Luxe (Julia Roberts, Kate Winslet, Penélope Cruz, Lupita Nyong'o…) pour des prises de paroles corporate sur l'âge et la confiance en soi.

Lors d'une rencontre avec la presse à Paris début mai, l'intéressée s'est confiée en toute sincérité (dans un français parfait) sur ce contrat: «Dans les années 80, les mannequins étaient des "girls" anonymes. Aujourd'hui, ce sont des femmes qui ont une carrière. Au début, je devais représenter la marque pendant deux ans, avec des visuels différents selon les pays. Finalement, je l'ai incarnée au niveau international pendant quatorze ans et cette fidélité, en rupture avec la culture de la nouveauté permanente, a été perçue de façon très positive par les femmes.» Sans compter que la marque est passée du cinquième au premier rang mondial du secteur de la beauté prestige dans le même temps.

L'implication de l'égérie allait au-delà d'une séance photo: «Je participais aux réunions sur les packagings et les formules car cela me permettait de donner de meilleures interviews. J'ai fait le choix final du parfum Trésor. Par la suite, sa créatrice Sophia Grojsman m'a raconté qu'elle en avait eu l'idée en regardant Casablanca La figure écrasante de ses parents, le réalisateur Roberto Rossellini et l'actrice Ingrid Bergman, a été déterminante: «J'avais peur de faire le même métier qu'eux. Avoir du succès comme mannequin m'a donnée la confiance pour franchir le pas. La publicité a popularisé mon image aux États-Unis et m'a permis d'avoir une carrière internationale, malgré mon accent. Lancôme m'a donné cette dimension de carrière, pas seulement de job.»

Années assumées

Lancôme et Isabella Rossellini, c'est plus qu'une relation d'affaires. «C'est une famille, assure le publicitaire Olivier van Doorne, directeur de création de Select NY, qui a travaillé sur la campagne Trésor chez Publicis dans les années 90. Elle était capable de passer des heures avec des clientes en plein tournage ou lors d'un lancement de produit, avec une générosité rare. Lorsque le contrat s'est arrêté, elle en a été profondément blessée.»

À l'époque, 42 ans était un âge canonique pour représenter une marque de beauté. Aujourd'hui au même âge, Penélope Cruz incarne Trésor et Julia Roberts, 48 ans, est le visage du parfum numéro un en Europe, La vie est belle. «Lancôme a véhiculé l'idée que pour être attirante il fallait forcément être jeune. Aujourd'hui, les femmes rêvent d'être élégantes, embellies mais pas d'être plus jeunes», souligne Isabella Rossellini, qui assume les années avec un sourire rayonnant. D'autant que le segment de l'anti-âge est celui qui assure la croissance du marché du soin actuellement (+1% en France en sélectif en 2015, selon NPD). «Lancôme est une marque positive et Isabella Rossellini l'incarne parfaitement: elle est épanouie, saine et n'a pas eu recours à la chirurgie esthétique. C'est très aspirationnel pour toutes les femmes», affirme Charles Georges-Picot, coprésident de Publicis 133 qui gère le budget publicitaire. «C'est un coup de génie», renchérit Olivier van Doorne, surtout pour se différencier du grand rival aux États-Unis Estée Lauder, en pleine vague de jeunisme avec la «it girl» Kendall Jenner.

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