Communication de crise
Lancé fin 2015, Linky, le nouveau compteur communicant d'Enedis (ex-ERDF) n'a cessé de faire polémique. L'opérateur a dû réviser de fond en comble sa communication. Retour d'expérience.

Linky. Ce nom a le don de susciter la polémique. Mais qu'est-ce au juste? Un compteur électrique communicant. Il reçoit et envoie des informations qui lui permettent d'effectuer des opérations à distance (sans rendez-vous avec un technicien). Il connaît la consommation exacte et non plus estimée. Enfin, il permet à Enedis, ex-ERDF, le gestionnaire du réseau d'électricité en France, de visualiser les pannes en temps réel. L'opérateur aime aussi à rappeler que les compteurs électriques sont la propriété des collectivités locales, seuls les élus sont donc décisionnaires (1,6% ont refusé Linky sur les 2 millions installés au 16 novembre 2016). 

Mais en ces temps de méfiance, notamment vis-à-vis du big data, l'arrivée de cette nouvelle génération de compteurs fait l'objet d'un intense «bad buzz». Pour ses détracteurs, à commencer par Stéphane Lhomme, militant associatif de la mouvance antinucléaire, Linky est une menace pour la santé: «Il fait circuler des ondes électromagnétiques porteuses de dangers. Il coûte au contribuable. Les citoyens sont en droit de refuser un compteur communicant.» Sans compter, selon lui, la remise en cause les normes françaises et européennes ainsi que celles de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil).

 

Virage à 180°

 

Enedis rappelle que Linky perçoit uniquement la consommation globale en électricité d'une habitation... même si on peut savoir quel type d'appareil est utilisé et à quel moment. Linky utilise comme ses prédécesseurs le CPL (fils électriques) pour transmettre ses données émettant donc de très faibles ondes électromagnétiques. Ces données arrivent à un data concentrateur (1 pour 50 compteurs) qui les retransmet par le réseau GPRS (téléphone) au serveur d'Enedis qui les utilisera pour la facturation. Les données détenues ne peuvent être transmises à un fournisseur (EDF, Direct Energie...) à des fins commerciales qu'avec l'accord du client, souligne également Enedis. Enfin Enedis ne connaît pas l'identité de ses clients mais uniquement les «points de livraison».

Lors de son lancement le 1er décembre 2015, Linky a été présenté au grand public comme une avancée technologique majeure. Mais face à la virulence de la polémique qu'Enedis n'a visiblement pas anticipée, l'entreprise, conseillée par Havas Paris, a dû opérer un virage à 180° en terme de communication. Le groupe a dû passé de la simple promotion de son produit à un travail de justification et d'argumentation. «Sur la communication, on apprend en marchant», reconnaît Bernard Lassus, directeur du programme Linky, lors du salon Utility Week 2016 qui s'est tenu à Barcelone du 15 au 17 novembre.

 

Mise en avant des avantages

 

Enedis a donc mené des études auprès de panels de consommateurs afin de sonder leurs véritables interrogations. L'idée étant de partager les informations les plus claires et pédagogiques possibles à propos de ce nouveau compteur. Deux grandes inquiétudes sont ressorties: la peur des ondes et la peur de la data. Si, techniquement, il est aisé de battre en brèche la première, apporter des preuves tangibles est beaucoup plus difficile. Enedis s'est donc appuyé sur la caution de l'Agence nationale des fréquences et affiché la conformité du compteur aux normes européennes et françaises. Quant aux craintes liées à la data, Enedis a réaffirmé son respect des exigences de la Cnil.

Par ailleurs, l'opérateur ne s'est pas privé de rappeler que certains assureurs demandent l'installation de Linky, qui offre un système de sécurité en cas de surtension. De même, il a mis en avant l'intérêt des fournisseurs qui développent des offres plus avantageuses pour les clients professionnels grâce au compteur communicant. 

 

Pédagogie

 

Toutes ces démarches se sont traduites par de nombreuses initiatives de communication: contenus vidéo («Questions aux élus» sur You Tube réalisés par les agences Ligne de front, The Messengers et Born TV), organisation de voyages de presse (agence Publics), sponsoring du Tour de France et du Trophée Andros électrique, sensibilisation interne des 38 000 salariés...

Enfin sur les réseaux sociaux, Enedis s'emploie depuis à répondre à chaque question du public. En communication, mieux vaut ne pas mettre la charrue avant les boeufs...

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