L'approche d'élections est souvent l'occasion de voir fleurir les prises de parole de telle ou telle entreprise, collective, syndicat et autre confédération pour défendre ses intérêts. Les législatives des 11 et 18 juin prochains n'échappent pas à la règle. Parmi les nombreuses initiatives du genre, on notera celle du groupe Avril. Ce géant industriel et financier des filières françaises des huiles et protéines végétales qui possède de nombreuses marques comme Lesieur, Puget, Matines ou Sanders a décidé de relancer sa marque de biodiesel, le Diester, via une campagne dans la presse et auprès des élus qui a débuté le 6 juin. Ce biocarburant produit à partir d’huile de colza permet de réduire de 60% les émissions de gaz à effet de serre.
«Ce produit est encore méconnu. Nous souhaitons donc en faire la pédagogie auprès du grand public mais aussi des politiques qui ont la totale maîtrise de ce dossier au niveau réglementaire», explique Sébastien Delerue, directeur de la communication. De fait, au niveau européen, Bruxelles prépare un projet de directive visant à réduire le taux d'incorporation du biodiesel dans le carburant de 7% actuellement (8% en France) à 3,8% en 2030. Le groupe Avril compte donc sensibiliser et si possible mobiliser les nouveaux députés français sur le sujet. «Il est important que nous mettions en avant le biodiesel made in France qui génère 20 000 emplois directs et induits non délocalisables et permet de contrecarrer l'essor de l'huile de palme importée. Sans compter que cette prise de parole a aussi pour ambition de redonner de la fierté à la filière et de la remobiliser», ajoute Sébastien Delerue pour qui le décision de Donald Trump de sortir de l'accord de Paris sur le climat ne fait que légitimer l'initiative du groupe Avril.
Réaliser un «reset» de la marque Diester
Pour mener à bien cette campagne d'opinion destinée à promouvoir la contribution environnementale, économique et sociale du Diester, le groupe Avril s'est entouré d'experts en communication. Au terme d'un appel d'offres lancé fin 2016, le groupe que préside Arnaud Rousseau depuis le décès en février dernier de Xavier Beulin, qui était également président de la FNSEA, principal syndicat agricole, a retenu le duo d'agences Alquier Communication et St John's. Ces dernières ont été choisies face à Elan Edelman, Manifeste, Parties Prenantes et W associée à Burson Marsteller.
L'agence corporate de Jean-Christophe Alquier pilote l'ensemble du dossier. «L'objectif est de réaliser un "reset" de la marque Diester en la rendant plus visible et en expliquant ses bénéfices», précise Jean-Chistophe Alquier. Son agence aura aussi vocation à gérer la communication sensible et de crise ainsi que les relations avec les ONG. Car le biodiesel a longtemps prêté le flanc aux critiques pour la concurrence faite à la production alimentaire. «Le débat "fuel vs food" n'est pas un sujet, en tout cas en France où la culture de biodiesel ne concerne que 1% des terres arables et participe de la rotation des cultures», tranche Sébastien Delerue qui souligne à ce propos l'intérêt du «made in France».
La carte du «made in France»
C'est autour du thème d'une production 100% française qu'a justement été axée la campagne presse conçue par l'agence St John's. «L'expression "made in France" est au coeur de la campagne. L'idée est de montrer que ce concept ne se résume pas aux secteurs du luxe et de la gastronomie», déclare Bruno Fradin, co-président de St John's. Les trois visuels (un champ de colza, un agriculteur et une vache) jouent sur cette opposition avec pour accroches: «Le Made in France ne se trouve pas que sur les Champs-Elysées», «Le Made in France ne concerne pas uniquement quelques couturiers célèbres» et «L’alimentation Made in France ne satisfait pas uniquement l’appétit des Hommes». Une campagne d'activation sur les réseaux sociaux complète le dispositif, les agriculteurs seront directement sollicités via le hashtag #fiersdediester et des modules de partage sur le site diester.fr.
Si la finalité de cette campagne est de sensibiliser le public et les décideurs politiques, le groupe Avril espère sur le fond obtenir au moins un maintien du niveau d'incorporation actuel de biodiesel dans les carburants. Autre enjeu: obtenir l'affichage à la pompe d'ici 2018-2019 de l'utilisation de cet additif. La partie ne fait donc que commencer.
