stratégie de marques
Olivier Klein, directeur général du groupe Banque populaire-Caisse d'épargne (BPCE), revient sur les grands enjeux qui attendent le secteur bancaire et ses propres marques commerciales.

Ne craignez-vous pas que la crise financière affecte durablement l'image du secteur bancaire?

Olivier Klein. La crise a provoqué une sorte de rupture entre les Français et la banque en général. Une rupture datée de 2008, selon les enquêtes, et qui perdure. Mais il faut nuancer ce constat. Lorsque l'on parle aux Français de leur banque en particulier, ils répondent: «Oui, mais ma banque,  ou mon banquier, c'est différent.» Il y a donc une dissociation entre les banques d'investissement, à l'origine des scandales financiers, et les banques de détail classiques.

 

Quelles sont les réponses du groupe BPCE à cette altération de l'image du secteur?

O.K. L'autre conséquence de la crise est la montée de l'exigence des clients vis-à-vis de leur banque. Ceux-ci attendent une banque plus pratique et des conseillers pertinents. Mais ils veulent aussi participer au choix des produits qui leur sont proposés. Ils veulent être acteurs. Nous sommes donc en train de mener un travail de fond stratégique, tant sur les Banques populaires que sur les Caisses d'épargne, afin de sortir d'une logique produit pour une logique davantage orientée client.

 

En termes de communication, comment cela va-t-il se traduire?

O.K. Nous allons changer de positionnement et d'image sur nos deux marques commerciales. Deux compétitions sont en cours. Pour la Caisse d'épargne, la consultation doit se terminer d'ici la fin du mois [trois agences sont encore en lice: BBDP & Fils, Leo Burnett et V, la sortante Ogilvy est hors course]. Pour Banque populaire, notre décision interviendra courant janvier [cinq agences en lice: Euro RSCG C&O, Hérézie, La Chose, McCann Paris et Sid Lee Paris]. Les premières prises de parole démarreront en février pour la Caisse d'épargne et à la fin du printemps pour la Banque populaire.

 

Qu'attendez-vous de cette remise à plat?

O.K. Jusqu'à présent, Banque populaire évoluait dans l'univers du conte. Or, ce thème n'est pas bien perçu en interne, nos collaborateurs ne s'y reconnaissent pas. De plus, le taux de notoriété de la marque n'en a guère profité. Nous allons donc davantage travailler sur l'esprit d'initiative et d'entreprise. Quant à la Caisse d'épargne, la saga animalière déclinée depuis huit ans a un excellent taux d'attribution (70% en moyenne). Mais si ce fut une campagne novatrice et pleine d'humour pendant les cinq à six premières années, il y a désormais un effet d'usure. Notre priorité est de rattraper le retard d'image de cette banque en matière de modernité et de dynamisme tout en montrant que cet établissement offre aussi des produits et services «haut de gamme». Il y a trente ans, les Caisses d'épargne, c'était le Livret. Aujourd'hui, ce sont des banques qui font tout, y compris l'entreprise et la gestion de fortune.

 

Ce changement d'image présage-t-il d'une communication plus massive?

O.K. Nous comptons augmenter nos investissements publicitaires en 2011. Pour les Caisses d'épargne, nous allons investir environ 50% de plus par rapport à 2009 [?? millions d'euros investis dans les médias en 2009, selon Kantar Media]. Nous allons en fait revenir à des niveaux antérieurs. Du côté de Banque populaire, nous allons quasiment doubler nos investissements [?? millions d'euros en 2009]. En part de voix, nous espérons remonter au niveau de nos parts de marché. Avant même la fin des appels d'offres, nous avons lancé une campagne publicitaire de transition réalisée en interne. Visible dans le métro et dans la presse, elle a pour but de travailler sur la modernité de nos banques: Internet, Iphone, mobile banking, etc. Mais elle joue aussi sur l'humour. Même si les temps sont graves, je ne crois pas à une publicité trop sérieuse. Si la banque montre sa capacité à avoir du recul et à faire un peu rêver, pourquoi pas?

 

Mais comment résoudre une des difficultés de communication majeures du secteur bancaire: ses faibles taux d'attribution publicitaire?

O.K. C'est vrai, la moyenne du taux d'attribution n'est que de 50%, ce qui est faible. Une chose est certaine, les banques ne se différencient pas par leurs produits, qui peuvent être copiés par la concurrence en moins d'un mois. Bien sûr, il faut avoir les meilleurs de ceux-ci, mais ce n'est pas ce qui est différenciant, contrairement au relationnel et au service client. Une banque, ce n'est pas un supermarché. Ce que nous demandent de traiter nos clients, ce sont leurs projets de vie et d'entreprise à moyen et long terme. Il faut donc obtenir leur confiance. Ils veulent rencontrer dans nos agences des conseillers généralistes qui comprennent leurs besoins de manière globale, et non des bornes ou des corners spécialisés.

 

Avec l'essor des acteurs en ligne, n'envisagez-vous pas, toutefois, de réduire le nombre de points de vente de vos réseaux?

O.K. Il ne faut pas oublier une donnée importante dans notre métier: la proximité paie toujours. Si vous fermez une agence, vous avez plus de soucis que si vous en ouvrez une. La BPCE n'a pas de problème de réseaux. Si vous cumulez nos deux marques commerciales, nous sommes le deuxième réseau bancaire en France. Aujourd'hui, les gens qui vont exclusivement sur la banque en ligne ne représentent que 2 à 3% des Français. C'est pour cela que nous avons monté des banques en ligne à l'intérieur même de nos agences régionales classiques. Avant la fin 2011, toutes nos Caisses d'épargne et Banques populaires auront leur relais en ligne. Mais il est vrai qu'il faut tenir compte des habitudes de nos clients les plus jeunes qui, de fait, fréquentent moins les agences.

 

A l'exemple de Foncier Home, récemment lancé par votre filiale Crédit foncier, le groupe envisage-t-il une nouvelle approche des points de vente bancaires?

O.K. Cela fait bien longtemps que les Caisses d'épargne comme les Banques populaires ont supprimé les guichets où l'on vient juste retirer de l'argent liquide. Nos agences ont déjà beaucoup changé de format ces dix dernières années. Le but: avoir beaucoup plus de bureaux de conseil, mais aussi un accueil différent lors de l'arrivée du client en agence. En revanche, je ne pense pas qu'il soit pertinent de faire des agences autre chose que des lieux de service bancaire. Certains ont tenté la cafétaria, l'espace high-tech…, mais on s'aperçoit que ces lieux fonctionnent seulement comme des vitrines.


L'appel de l'ancien footballeur Eric Cantona à retirer son argent des banques vous inquiète-t-il?

O.K. C'est un épiphénomène, et heureusement, car c'est un discours totalement déraisonnable. Si jamais cet appel au retrait était entendu et suivi, ce serait l'auto-destruction du système bancaire français. Un système dans lequel les Français ont toutes leurs économies… Ce serait très dangereux, cela voudrait dire que l'on retournerait à l'économie de troc. Et ce n'est pas en banquier que je parle, mais en simple citoyen.


En sponsoring sportif, si Banque populaire poursuit dans la voile, quel va être le territoire d'expression de la Caisse d'épargne, qui a abandonné le cyclisme et le football?

O.K. La Caisse d'épargne va s'intéresser à deux nouvelles disciplines sportives: le ski et la course à pied. Cette politique de sponsoring va se faire dans le cadre du partenariat de la BPCE avec le Comité national olympique et sportif français. Nous allons également soutenir la candidature française pour les Jeux olympiques d'hiver d'Annecy en 2018 et la campagne olympique de l'Equipe de France lors des JO d'été de 2012.

 

Chiffres clés

2e groupe bancaire en France.

?? millions d'euros d'investissements publicitaires en 2009 (?? millions pour la Caisse d'épargne et ?? millions pour la Banque populaire).

74% des revenus réalisés dans la banque commerciale et l'assurance.

37 millions de clients.
127 000 collaborateurs.
8 200 agences bancaires.

Les principales marques: Banques populaires, Caisses d'épargne, Crédit foncier, Crédit coopératif, Banque Palatine, Natixis, Banque privée 1818…

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