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Le Conseil national du numérique, créé par le gouvernement, vient de présenter sa déclaration d'intention. Perçu par les uns comme un coup de com et par les autres comme une initiative constructive, le CNN divise.

Installé le 27 avril dernier par Nicolas Sarkozy, le Conseil national du numérique (CNN), qui a pour mission «d'accompagner et d'accélérer la croissance et l'usage du numérique dans la société française», a publié le 19 mai sa déclaration d'intention signée par son tout nouveau président Gilles Babinet, cofondateur de Captain Dash, MXP4 et Eyeka.

 

Le CNN s'assigne quatre priorités : «favoriser et soutenir le numérique [...] afin qu'il soit une source de dynamisme économique pour la nation; soutenir la création artistique, entrepreneuriale ou technologique d'entreprises ou d'initiatives citoyennes sur Internet [...]; développer l'éducation via le numérique et l'apprentissage d'Internet ainsi que la formation aux métiers du numérique; respecter la liberté de connexion et d'expression, et favoriser l'accès aux données publiques».

 

Un organe consultatif

De louables ambitions que nombre d'observateurs mais aussi d'acteurs du Net ne manquent pas de brocarder, estimant que le CNN n'est qu'une énième coquille vide destinée à occuper le terrain... politique. Les plus sceptiques vont jusqu'à lui prédire le même avenir que le Conseil de la création artistique présidé par Marin Karmitz et enterré le mois dernier, deux ans après sa création.

 

Ses détracteurs l'ont accusé de présenter une vision strictement économique d'Internet, à l'image du e-G8 qui s'est tenu à Paris les 24 et 25 mai et réunissait les géants du Web (Google, Facebook, Amazon, Ebay...). Les associations de consommateurs, les éditeurs de contenus et les ayants droit, notamment, se sont plaint en effet de ne pas être représentés au sein du CNN. De fait, ses membres, élus pour deux ans, sont composés de dirigeants d'entreprises du secteur de l'Internet et des télécoms.

 

Sur le papier en tout cas, les sujets relevant du CNN ne manquent pas, à commencer par la transposition de la directive européenne dite «Paquet Télécom», sur laquelle il vient de rendre un avis, sans parler de l'épineux dossier de la loi Hadopi. Appartenant à un organe purement consultatif, ses membres auront-ils seulement les moyens de faire bouger les lignes ?

 

Un e-entrepreneur

NON. Gilles Babinet, président du CNN et cofondateur de Captain Dash, MXP4 et Eyeka.

 

«Pour les sujets souvent très pointus traités par le CNN (fiscalité du Net, compétitivité des entreprises, e-éducation...), il est indispensable d'avoir des professionnels de l'Internet. Mais, évidemment, nous consultons tout le monde. Il n'y a pas un sujet sur lequel nous sommes déjà intervenus sans avoir consulté très largement. Mais cela dépend des dossiers. La compétitivité des entreprises, par exemple, ne concerne pas les consommateurs, que je sache. Le CNN n'est pas une chambre de lobbying. Pour ma part, je ne roule pour personne et sûrement pas pour le gouvernement qui, au final, devra prendre ses responsabilités.» 

 

Un analyste

NON. Thomas Husson, Principal Analyst chez Forrester Research

 

«La déclaration de principes qui vient d'être publiée va dans le bon sens. La difficulté va être de mettre en œuvre les recommandations qui seront faites par le CNN. Gilles Babinet, juste avant de devenir président du CNN, avait fait des recommandations très pertinentes, notamment sur le besoin de formation. Si seulement une de ces recommandations était mise en œuvre, ce serait déjà un grand pas en avant. Le principal danger est que l'administration elle-même et les cabinets ministériels bloquent la situation et ne prennent pas la mesure des enjeux. Ce sera alors la faute du politique et sûrement pas du CNN.»

 

Un associatif

OUI. Alain Bazot, président de l'UFC-Que Choisir

 

«Le CNN sera consulté sur saisine et pour simple avis consultatif. Et il n'aura qu'une faible légitimité. En effet, devant constituer une refonte du forum des droits de l'Internet avec les principaux acteurs de l'économie numérique et de la société civile, il n'est au final qu'un e-medef, composé de quelques industriels. Les consommateurs devraient être un minimum consultés par le CNN. Il est à craindre qu'ils soient poliment écoutés mais jamais entendus. Pourtant, les consommateurs sont directement concernés et l'UFC-Que Choisir très engagée sur les différents débats relatifs à l'économie numérique.» 

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