CMO World Tour

Stratégies est partenaire du CMO World Tour de Frédéric Colas, vice-président de Fullsix, réalisé avec le soutien de la World Federation of Advertisers et de Facebook. Tous les mois, nous publierons l'entretien d'un directeur marketing d'une marque mondiale, interrogé sur l'impact du numérique dans son activité. Chris Burggraeve, Global Chief Marketing Officer du brasseur AB-Inbev et président de la WFA, inaugure cette série. 

 

 

Comment a été appréhendée la révolution numérique chez AB-Inbev? 

C.B. L'ambition est de transformer une machine «focalisée sur les ventes» en une machine «focalisée sur les clients» prête pour l'ère numérique. Le challenge a été d'adapter l'organisation, du sommet à la base, pour faire comprendre que la TV devenait un média secondaire. Pas si simple dans un secteur où 80% du mix média était dépensé en TV. Un grand plan de formation a été lancé.

 

Reste-t-il des obstacles à l'utilisation des médias numériques?

C.B. Beaucoup moins. Le principal est macroéconomique: ce sont des outils nouveaux, si bien que lorsque la situation économique se détériore, comme en 2008-2009, les gens retournent vers ce qu'ils maîtrisent. Nous devons résister à cette tentation. Pour autant, il ne s'agit pas de faire du 100% digital, mais d'utiliser différemment les médias traditionnels.

 

Comment utilisez-vous les médias numériques selon les régions et les marques?

C.B. Nous avons environ deux cent cinquante marques dans le monde. Nous nous concentrons sur les «focus brands» qui doivent chacune trouver une façon intelligente de repenser leur «connection mix».

 

Par exemple?

C.B. À New York et Toronto, Stella Artois a invité des lanceurs de tendance à devenir des ambassadeurs de la marque en leur donnant des infos et des avantages exclusifs. Nous comparons l'impact entre les influenceurs qui sont dans ce club et ceux qui n'y sont pas, pour savoir si leur attitude est significativement différente et justifie l'investissement. La réponse est «oui»: ils aiment plus la marque, sont plus fidèles et parlent d'elle autour d'eux. C'est la force de vente la plus efficace que nous ayons. Donc, nous étendons ce programme à d'autres marchés.

 

AB-Inbev donne-t-il des directives globales sur les niveaux de dépenses dans les médias numériques?

C.B. Nous n'avons pas de dogmes. Rien ne nous dit que 5, 10, 30 ou 100% du budget est le chiffre magique. Ce qui compte, c'est le résultat. Le digital nous aide à nous connecter différemment à nos consommateurs. En tant que marketeur, je suis obsédé par la santé de mes marques, pas par les moyens d'y arriver.

 

Avez-vous conclu des accords globaux avec les géants des médias digitaux?

C.B. Oui, avec Google, Facebook et Microsoft. Parmi nos dix-huit «focus brands», nous en avons trois qui sont mondiales (Budweiser, Stella Artois, Beck's) et si nous pouvons utiliser notre taille pour générer un avantage concurrentiel, nous n'hésitons pas. Pour la Coupe du monde de foot, nous avons travaillé avec ESPN, mais aussi avec Microsoft, Yahoo et d'autres comme annonceur sur les pages d'accueil de leurs sites. Les marques globales et multilocales qui ont des messages globaux doivent conclure des accords de ce type.

 

Quel est le rôle des marques dans les réseaux sociaux tels que Facebook?

C.B. Les médias sociaux ne sont pas des médias «push», c'est ce que les marques sont en train de comprendre. Leur présence y est acceptée si elles respectent les règles de ces écosystèmes. C'est notre approche. Il s'agit là encore de s'organiser en fonction des clients. Si on y arrive avec ses gros sabots pour diffuser des messages commerciaux, le mécanisme d'autorégulation de la communauté poussera très rapidement la marque dehors.

 

Comment voyez-vous l'évolution du métier de directeur marketing dans les dix ans?

C.B. Avant, il fallait un an pour comprendre l'évolution des consommateurs qui étaient des recepteurs passifs. Aujourd'hui, dix secondes suffisent. C'est plus de pression, mais c'est plus enrichissant. Via les technologies, il faut trouver une relation équilibrée de type «ying-yang» entre les consommateurs et les marques, c'est-à-dire bénéficier de la puissance des réseaux sociaux tout en laissant une part du contrôle sur nos marques aux consommateurs.

 

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