Année de la publicité 2012
La réélection de Barack Obama, en novembre, a mis en lumière l'importance de la communication numérique et de l'exploitation des donnés recueillies en ligne.

Quand Barack Obama a remporté l'élection de 2008 face à John McCain, l'Iphone d'Apple venait tout juste de sortir, Facebook commençait son expansion et Twitter n'était quasiment pas utilisé. Quatre ans plus tard, les chiffres de la campagne digitale sont impressionnants: 500 millions de dollars de dons, plus d'un million d'électeurs inscrits sur les listes électorales en ligne, des bases Facebook et Twitter de plus de 45 et 33 millions de personnes, plus de 100 millions de visionnages de vidéos, plus de 300 000 événements de terrain organisés par quelque 150 000 volontaires. Le 6 décembre 2012, à Paris, des responsables américains chargés du numérique durant la campagne Obama For America (OFA) étaient les invités du Personal Democracy Forum, organisé par La Netscouade et Spintank. Retour d' expérience (lire aussi l'interview de Joe Rospars page 40). 

«Au démarrage de la campagne, le président avait 34 millions d'amis sur Facebook, raconte Teddy Goff, «digital director». Et ces gens attendaient qu'on les contacte.» L'équipe digitale d'OFA s'y est employé, utilisant tous les canaux numériques pour lever des fonds, persuader les Américains de s'enregistrer sur les listes de vote, montrer l'intérêt de réformes comme l'Obamacare. «Sur Reddit.com, un site de levée de fonds, le président a tapé lui-même ses réponses lors d'un tchat et, du coup, quelque 30 000 personnes se sont inscrites sur Gottaregister, le site d'enregistrement pour voter», poursuit Teddy Goff. Le Quick Donate a été un autre dispositif efficace. Une fois les données personnelles des donateurs sauvegardées sur le site du candidat, des SMS leur étaient envoyés et ils n'avaient plus qu'à cliquer sur la somme qu'ils désiraient donner. Plus de 1,5 million de personnes ont utilisé ce système pour des dons à hauteur de 115 millions de dollars.

Les réseaux sociaux ont également été décisifs pour communiquer avec les équipes de terrain (2,2 millions de volontaires). «Nous avons créé Dashboard, une plate-forme d'organisation en ligne pour se connecter aux teams locaux dans une relation one-to-one», détaille Betsy Hoover, «director of online organizing». Là encore avec des résultats significatifs: 1,8 million de votants enregistrés dans cinq Etats clés (Floride, Colorado, Virginie, Ohio et Nevada), dont 1 million qui se sont inscrits en ligne.

Rôle majeur dans la victoire

Le président et son équipe ont si bien compris le caractère déterminant du numérique qu'ils ont installé un bureau «spécial techno», le Technology Field Office, à San Francisco. Un seul article dans le San Fransisco Chronicle a suffi pour attirer 1 800 ingénieurs, développeurs et techniciens. Douze projets ont ainsi vu le jour, dont le Trip Planner, un site de partage de voitures et d'appartements pour les volontaires, le Map Marker, graphique mettant en lumière l'action d'Obama, ou encore des e-cards partageables sur Facebook. «C'est la première fois qu'une équipe de campagne a eu à sa disposition un tel département 100% technique», note Catherine Barcy, codirectrice du Technology Field Office.

L'exploitation des données a joué un rôle majeur dans la victoire d'Obama. «Les 2,2 millions de volontaires ont engendré plus de 24 millions de conversations personnelles qu'il a fallu décrypter», souligne Ethan Roeder, «data director». Le travail de cette «data team» (107 membres dans 19 Etats) a visé notamment à combattre les fausses rumeurs contre Obama. Un «data mining» qui a aussi permis d'abaisser le coût de recrutement à 1,8 dollar par vote, contre 6 dollars pour le candidat républicain, Mitt Romney. Une base de données (3 millions de personnes et plus de 300 millions de données) qui comprend des informations détaillées, comme les nom, adresse, numéro de téléphone, âge, sexe, revenus, niveau d'éducation, possession d'un véhicule, etc. a été créée. Des informations impossibles à collecter en France, pays de la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés). «Chez nous, le niveau de protection des données personnelles est très différent. Certains États, comme le Texas, vendent même ce genre de données à des entreprises privées», précise Ethan Roeder. Mais l'équipe d'OFA l'assure, «ces informations ne seront vendues à personne». C'est le trésor de guerre digital du prochain candidat démocrate à la présidence. 

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