événementiel
La maison de maroquinerie du groupe LVMH avait prévu d' organiser une exposition dans une malle géante, dressée sur la place Rouge, devant le Kremlin à Moscou, à l'occasion des 120 ans du magasin Goum. Sans mesurer le risque de faire scandale...

La photo marque les esprits. Sur la place Rouge de Moscou, face au Kremlin et au mausolée de Lénine, se dresse, depuis quelques jours, une malle de 9 mètres de haut, 34 mètres de long et 20 mètres de large. Une malle Louis Vuitton portant les initiales PWO, réplique géante de celle ayant appartenu au prince Wladimir Orloff, ami du tsar Nicolas II.

Cette installation accueillera, à partir du 2 décembre et pendant un mois, une exposition intitulée «L'âme du voyage». Frédéric Winckler, directeur monde des activités communication et événements de Louis Vuitton, a fait appel à l'agence Herezie pour la direction artistique et la scénographie de cet événement, dont la production et l'exécution ont été déléguées à l'agence Marcadé. Rappelons que BETC est l'agence publicitaire de la maison de maroquinerie.

«Cette exposition célèbre l'esprit d'aventure à travers la présentation des malles originales d'une vingtaine de propriétaires prestigieux comme Ernest Hemingway, Greta Garbo, Karen Blixen, le tsar Nicolas II, Tamara de Lempicka, Isadora Duncan...», explique Andréa Stillacci, coprésident de Herezie. C'est aussi une expérience multimédia, poursuit cet amateur d'art, car nous avons demandé à des artistes contemporains de créer des œuvres vidéo, inspirées par ces personnalités, qui seront projetées sur des fils de soie tendus derrière les vitrines des malles.»

 

La Russie, un marché prioritaire

Pour Vuitton, le marché russe, comme l'asiatique, compte parmi ses priorités.

Cet événement - à l'instar du défilé de prêt-à-porter de Dior en juillet dernier, également sur la place Rouge - participe aux festivités organisées pour les 120 ans de la célèbre galerie marchande Goum située face au Kremlin, ouverte en 1893 sous la monarchie, magasin universel d'Etat sous l'ère soviétique et aujourd'hui temple de la consommation et du luxe.

Ce projet, on s'en doute, n'est pas du goût de tous. Le 26 novembre, un député communiste s'indignait «La Place rouge est un endroit sacré de l'Etat russe.....qu'il ne faut pas banaliser et dénigrer...». Un élu de la majorité considérait, lui, que «les dimensions gigantesques de la construction ne sont pas justifiables, [...] cela gâche la vue sur des monuments du patrimoine culturel». Quant au chef de la commission culture au sein de la chambre civile, il réclame un réglement sur les «lieux sacrés ayant une importance historique» estimant que la présence de cette malle est «une honte».

Pour parer à toute polémique, la maison Vuitton avait prévu et fait savoir que «les bénéfices des droits d'entrée de l'exposition seraient intégralement reversés à la Naked Heart Foundation, organisation en faveur des enfants défavorisés en Russie, soutenue depuis cinq ans par la maison»... et fondée en 2004 par la mannequin russe Natalia Vodianova, aujourd'hui compagne d'Antoine Arnault, patron de Berluti et fils du président de LVMH.

 

Démontage de la malle

Mais ni le Kremin qui a donné toutes les autorisations (on ignore les termes financiers du contrat de "location" de la Place Rouge) ni Louis Vuitton ne semblent avoir anticipé la réaction des russes. Sans doute, du fait de la campagne déjà ancienne de la marque sortie en 2007, dans laquelle, l'ancien président du pays, Mikhaïl Gorbatchev, se prêtait au jeu de l' égérie publicitaire. 

Le 27 novembre, des discussions commencées le matin continuaient la nuit venue, entre LVMH, le Kremlin et le magasin Goum. Aucune décision n'étant arrêtée, aucun démontage, annoncée par la presse le matin, n'avait en réalité commencé. «Toutes les options sont ouvertes, indiquait-on de source LVMH. Soit le maintien sur la Place Rouge, soit son déplacement au Gorki Park, ou dans un autre lieu à Moscou. Le projet de l'exposition n'est pas abandonnée».

Le 28 novembre en fin de journée, après deux journées de discussions, Louis Vuitton publiait une communiqué de presse annonçant «le déplacement de son exposition moscovite» précisant en préambule que «la maison Vuitton avait accepté avec joie de participer à la célébration des 120 ans du Goum, prestigieux magasin situé sur la place Rouge à Moscou». Une façon de renvoyer la responsabilité de ce fiasco sur les partenaires russes. Pour autant Michael Burke, Pdg de Louis Vuitton, tient à rapeller «les liens anciens et étroits avec la Russie. Cette exposition avait pour objectif d'approfondir encore cette relation importante pour la maison Vuitton. C'est naturellement ce à quoi s'attacheront nos équipes dans les mois qui viennent. »

Louis Vuitton indique que l'exposition sera déplacée «dans un des lieux parmi les nombreuses propositions qui se sont manifestées ces derniers jours pour l'accueillir».

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