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Les stratégies d'influence sont au cœur de la bataille qui oppose taxis et « voitures de tourisme avec chauffeur ».

Cela a tout d'un nouveau conflit des Anciens contre les Modernes. Depuis quatre ans, les «voitures de tourisme avec chauffeur» (VTC), telles Uber ou Snap Car, roulent sur les plates-bandes des taxis traditionnels profitant d'un certain flou réglementaire. Ces créateurs de start-up ont pour principal atout la géolocalisation et les applications mobiles ad hoc portées par l'explosion des smartphones.

En téléchargeant une application VTC sur son téléphone mobile, le client peut localiser en un clic la disponibilité d'une voiture à proximité, la réserver et la suivre sur son écran en l'attendant.

Pionnière sur cette nouvelle offre: Uber et son appli de chauffeurs. Lancée en 2009 à San Francisco, désormais présente dans 74 villes dans le monde, elle a débarqué en France fin 2011. Google y a investi 361 millions de dollars (265 millions d'euros) en août dernier. Mercredi 5 février, elle inaugurait un nouveau service de covoiturage à Paris: Uber Pop, une application mobile permettant à ses utilisateurs d'entrer en relation avec des chauffeurs amateurs, pour une course limitée aux trajets courts, entre 4 et 12 euros.

Uber, qui compte 12 salariés dans l'Hexagone, maîtrise toutes les ficelles de la communication: «Nous nous sommes lancés en France en étant partenaire des conférences Le Web [s'adressant aux start-up] en décembre 2011. Depuis, nous multiplions les accords avec des marques et des évènements pour nous faire connaître», précise Pierre-Dimitri Gore-Coty, patron d'Uber France.

 

Essor de la «sharing economy»

Face à ces start-up offensives, les chauffeurs de taxis (18 000 à Paris, 73 000 en province) ont bien besoin de leur puissant lobby. Le jour même où sortait Uber Pop, le Conseil d'Etat annonçait la suspension d'un décret qui imposait aux VTC un délai de 15 minutes entre la réservation et la prise en charge d'un client. Un coup dur pour les taxis, même s'ils gardent des prérogatives par rapport aux VTC, comme la possibilité de prendre des clients à la volée (les VTC ne travaillant que sur réservation).

«Les VTC n'ont pas les mêmes contraintes que les taxis qui ont une carte professionnelle et une licence à payer [240 000 euros à Paris]. Le gouvernement laisse déraper la situation», regrette André Alogna, président de la Fédération nationale des taxis indépendants. Plusieurs syndicats de taxis ont organisé une grève lundi 10 février, une autre est annoncée le 13 mars.

Activement soutenus sur les réseaux sociaux par leurs utilisateurs notamment, les VTC se fédèrent aussi. En janvier a été lancée l'Union nationale des chauffeurs courtois, accompagnée par l'agence Expression RP. «Nous souhaitons professionnaliser nos chauffeurs, c'est pourquoi nous avons monté un centre de formation», explique Michael Beck, vice-président de l'association. L'an dernier, Snap Car, Chauffeur-privé et Le Cab avaient déjà lancé la Fédération française du transport de personnes sur réservation.

L'«économie du partage» (sharing economy) est au cœur de ce changement. «Ces nouvelles start-up offrent des services rendus possibles par les nouvelles technologies et surfent sur une insatisfaction globale de l'expérience taxi», conclut Leslie Griffe de Malval, analyste chez Fourpoints.

 

(encadré)

 

Chiffres clés

 

18 000 taxis à Paris.

73 000 taxis en province.
240 000 euros. Coût d'une licence de taxi à Paris.

5 300 entreprises de voitures de tourisme avec chauffeur, exploitant plus de 9 800 véhicules (chiffres à mi-2013).
3,5 milliards de dollars. Valorisation de la société Uber à la suite de sa levée de fonds auprès de Google Ventures.

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