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Les agences françaises reviennent cette année de Cannes avec un record de Lions. Mais l'avenir du Festival est-il dans la perpétuelle multiplication des prix ?

Pour les agences françaises, la 61e édition du Festival international de la créativité à Cannes aura été «fenomenal» comme on dit au Brésil. Elles remportent en effet un nombre record de Lions : 86 au total, contre 55 l'an dernier et 32 en 2012. La France revient notamment avec un Grand Prix dans la catégorie Cyber attribué à la société de production Iconoclast pour le site «24 Hours of Happy» de Pharrell Williams (réalisé avec Anonymous et We are from LA)

Elle comptabilise au total 19 Lions d'or (15 en 2013) dont 5 pour Iconoclast, 3 pour Marcel avec Intermarché «Les Fruits et légumes moches», 2 pour Leo Burnett avec la Fondation Mimi «Ne serait-ce qu'une seconde» et 2 pour Sid Lee avec BNP Paribas «We were there» et Ubisoft «Assassin's Creed». Quelques déceptions toutefois, notamment «Le Grand Saut» de Lacoste/BETC qui a du se contenter d'un Lion d'argent et «Le monolithe» de Mercedes/CLM BBDO qui n'a même pas été shortlisté.

Les agences françaises obtiennent également 33 Lions d'argent et 33 de bronze (voir ci-dessous). Elles se sont particulièrement illustrées dans les catégories Cyber, Direct, Promo & Activation et Press. A noter le premier Lion français (argent) dans la catégorie Radio avec Les Gaulois pour Orpi mais l'absence de récompenses en Design, Design Product et Creative Effectiveness.

Mais ce tableau idyllique ne doit pas cacher les dérives d'une manifestation, très rentable (plus de 26 millions de dollars de recettes pour les seuls dossiers inscrits à la compétition), mais qui est devenue de moins en moins lisible. Avec 17 catégories, près de 450 sous-catégories et au final 1 142 Lions décernés, le Festival de Cannes est aujourd'hui davantage une distribution de hochets qu'un concentré du meilleur de la création mondiale.

Et, sans surprise, la tendance n'est pas près de s'inverser. Déjà, les organisateurs du Festival réfléchissent à la création d'une 18e catégorie dédiée à la data. L'intérêt bien compris du Festival n'est toutefois pas seule en cause : de nombreuses agences militent aussi régulièrement pour de nouvelles catégories (shopper marketing, BtoB, musique...). Celles-ci devraient cependant être intégrées dans des catégories existantes.

Quant à l'édition 2014, on constatera à nouveau la forte présence des problématiques d'intérêt général et sociétales : «Scarecrow» de Chipotle/Creative Artists (Grands Prix PR et Cyber), «GayTMs» d'ANZ/WhyBin TBWA Melbourne (Grand Prix Outdoor), «Guilt trip» de V Line/McCann Melbourne (Grand Prix Creative Effectiveness), «Raw for the Oceans» de G-Star Raw/FHV Amsterdam (Grand Prix Product design), Bergen Festival/Anti Bergen (Grand Prix Design)... «Les campagnes sont saturées par l’humanitaire. Cela se fait au détriment des marques qui permettent pourtant de réaliser ces oeuvres socially correct. A un moment, il faut aussi penser aux créateurs de pots de yaourts, de tubes de dentifrice…, tempête Sylvia Vitale Rotta, présidente de Team Creatif, dans Design Fax, cette année, les Cannes Lions Design, c’est encore plus l’élite de l’élite. Cela n’a rien à voir avec le quotidien de millions de designers dans le monde.»

Vincent Leclabart, président de l'AACC et de l'agence Australie, abonde : «Il y a depuis quelques années une tendance générale à faire des campagnes bien pensantes. Je pense aux “Fruits et légumes moches” d'Intermarché, à la campagne pour Guy Cotten, à l'opération pour la Fondation Mimi ou au “Dernier carré” de Milka. A l'international, il y a la campagne Nivea avec le bracelet pour surveiller les enfants et la plus extrême, celle de Coca-Cola au Pérou avec les cabines photo activables avec un sourire. Ce qui me réjouit davantage, ce sont ces campagnes un peu moins bien pensantes comme la non-publicité de Newcastle Brown Ale “Christmas” d'Harvey Nichols.»

Cette dernière, couronnée de 4 Grands Prix (Promo & Activation, Press, Film et Integrated) et réalisée par l'agence londonienne Adam & Eve DDB, élue «agence de l'année», apparaît de fait comme le grand vainqueur de cette édition 2014. La tendance, ces dernières années, aux campagnes muliprimées – en 2013, «Dumb Ways to Die» de Metro Train Melbourne/McCann avait décroché 5 Grands Prix «The beauty inside» d'Intel et Toshiba/Pereira & O'Dell San Francisco 3 Grands Prix – témoignent en tout cas de l'essor et du succès des campagnes intégrées. N'est-ce pas justement l'occasion de remettre un peu d'ordre dans ce grand bazar des breloques qu'est devenu Cannes ?

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