Deux ans après une banqueroute mémorable, que reste-t-il de la marque historique de photographie Kodak ? Quatre sociétés indépendantes exploitent chacune à leur manière un capital de marque qui reste très fort.

Etrange renaissance pour le mythique logo Kodak, à l'ère du culte des photos prises depuis un smartphone et des selfies. Depuis quelques jours, des applications mobiles « Kodak Moments », disponibles sur I-OS, Android, et via Facebook et mobile, permettent de retoucher ses photos numériques, puis de les faire imprimer sur papier photo ou sur un objet (calendrier, livre photo...) pour en garder une trace physique, en passant commande auprès du magasin affilié physique le plus proche.

 

Le groupe Kodak Alaris est à l'origine de ces nouveaux services, lancés via un réseau affilié de 80 points de vente, « des boutiques photo indépendantes, et le réseau Carrefour », précise Pascale Philbert, qui dirige la division Personalized Imaging de Kodak Alaris. Un groupe spécialisé notamment dans les solutions d'impression photo, qui rebondit sur l'engouement autour de la photo sur smartphones : « 50% des Français ont un smartphone, et l'institut FutureSource estime que seuls 2% impriment leurs photos mobiles », poursuit-elle. Elle lancera sa première campagne publicitaire sur les réseaux sociaux en fin d'année, accompagnée par l'agence Neo@Ogilvy.

 

Kodak Alaris est un géant né sur les cendres du géant historique de la photo, qui compte aujourd'hui 3 400 salariés dans 33 pays et 450 brevets Kodak dans son portefeuille. Le fonds de pension anglais derrière Kodak Alaris fait partie des quelques géants qui se sont partagé les dépouilles de Kodak, soit ses quelques milliers de brevets, lors de sa banqueroute historique en 2012.

 

Un virage numérique raté

 

Née en 1888, Eastman Kodak Company, assise pendant des décennies sur le juteux marché des pellicules photo et qui a accompagné les débuts de la photo instantanée avec le fameux slogan « Clic clac, merci Kodak ! », a raté le virage du numérique et commencé à afficher des pertes abyssales en 2007. Bon an mal an, après avoir frôlé la disparition, en 2010, la marque a tenté de se refaire une santé en vendant certains de ses brevets.

 

Aujourd'hui, Kodak se résume à une société B to B, spécialisée dans l'impression pour les entreprises du secteur de l'industrie graphique. Indépendante de celle-ci, Kodak Alaris a récupéré la branche impression ainsi que l'activité de production de pellicules photo grand public et cinéma. La division appareils photo est quant à elle dans le giron du géant industriel taïwanais Asia Optical Co Inc., via une société de droit américain JK Imaging, dont la recherche-développement est partagée entre Taïwan et le Japon.

 

Mais la marque, elle, reste une pépite jalousement gérée par l'entreprise historique Kodak. « Le groupe licencie son nom auprès de certaines entreprises, comme JK Imaging, qui paie des royalties pour chaque produit lancé sous la marque Kodak », précise Claude Desbrugères, directeur général de Kodak France. Kodak Alaris, quant à elle, a conclu un accord lors de la cession au fonds de pension en septembre 2013, qui lui a donné « le droit d'utiliser la marque Kodak sous la forme d'une licence perpétuelle exclusive », précise Pascale Philbert.

 

Mais si la marque dispose d'une riche histoire et d'un gros capital de notoriété, « elle n'évoquera rien sur une appli mobile aux générations technophiles qui ne l'ont pas connue, même si elle est encore présente sur des devantures de magasins », craint Jean-Marc Lehu, enseignant chercheur à l'université Paris-I Panthéon Sorbonne. « Il reste deux exploitants de Kodak : ceux qui capitalisent sur ses brevets, et ceux qui utiliseront la marque comme un faux-nez sur certains marchés pour crédibiliser un peu plus leur offre », tranche-t-il.

 

 

Kodak en 2014

Kodak (secteur graphique) : 8 000 personnes, 2,2 milliards de dollars de chiffre d'affaires

Kodak Alaris (impression photo) : 3 500 employés dans 33 pays, 1,2 milliard de dollars de chiffres d'affaires, prévisions décembre 2014

JK Imaging/Asia Optical Co Inc. (appareils photo)

Trusense Imaging (capteurs photo)

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