Streaming musical
Le suédois Spotify, numéro un mondial de la musique en streaming, fait ses premiers pas en Bourse mardi 3 avril à New York, au moment où les valeurs technologiques connaissent une passe difficile sur les marchés. Une entrée singulière pour une marque « cool ».

Malgré 71 millions d'abonnés payants et le boom de l'écoute musicale en ligne, le groupe qui a révolutionné ce marché n'a jamais engrangé le moindre bénéfice. Mais il jouit d'une confortable avance sur ses concurrents, Apple Music, numéro deux avec moitié moins d'abonnés, ou encore Google Music, Tidal, Deezer ou Amazon. Spotify sera coté sous le symbole « SPOT ». Certaines estimations optimistes valorisent la société à plus de 20 milliards de dollars.    

Pour son patron Daniel Ek, l'entrée en Bourse n'est qu'une étape, qui ne saurait être le jour « le plus important » de l'histoire de Spotify, a-t-il écrit lundi 2 avril dans un message aux salariés publié sur le site du groupe. « Spotify ne lève pas de capitaux et nos actionnaires comme nos salariés peuvent acheter ou vendre nos actions depuis des années. Donc même si demain (mardi) nous offre plus de visibilité, cela ne change pas qui nous sommes, ce que nous faisons et la façon dont nous fonctionnons », a-t-il ajouté dans une prise de parole inattendue, les entreprises étant habituellement priées de rester silencieuses à l'approche de leur introduction en Bourse. 

 

Une opération sans paillettes  


Daniel Ek ne viendra pas se faire interviewer mardi à Wall Street ni sonner la cloche qui ouvre la séance boursière, dérogeant ainsi à la tradition qui veut que les impétrants soient présents le jour de leur première cotation. « Spotify n'a jamais été une entreprise d'un genre normal », affirme M. Ek. 

Autre particularité : l'opération se fait via une procédure atypique dite de « cotation directe », simplifiée et moins coûteuse car sans intermédiaire. Elle est aussi plus imprévisible, le prix des titres n'étant pas fixé d'avance.      

 

Licorne musicale

         

Ses premiers pas pourraient être d'autant plus chahutés que les valeurs technologiques mordent la poussière ces derniers temps, avec le scandale Facebook/Cambridge Analytica autour de l'utilisation de données personnelles d'utilisateurs. Lundi, la Bourse électronique Nasdaq, qui concentre ses valeurs, a perdu 2,74%.  

«Spotify est une marque 'cool'. Les ados en particulier l'adorent», relève  l'analyste Paul Verna (eMarketer). Mais le groupe «va être noyé dans la masse des autres valeurs technologiques, plombées dernièrement par le scandale  Facebook», poursuit-il.

En entrant à Wall Street, Spotify rejoint d'autres «licornes» (les  sociétés technologiques non cotées valorisées au-delà du milliard de dollars) qui ont sauté le pas ces derniers mois, comme Snap, maison mère de Snapchat, ou la plateforme de stockage en ligne Dropbox. Avec des résultats mitigés : Snap cotait lundi à moins de 15 dollars, contre 24 dollars à son entrée sur les marchés l'an dernier. En revanche Dropbox, à 30 dollars, reste au-dessus de son prix d'introduction de 21 dollars le 24 mars dernier.    

 

Autre point commun : ces entreprises n'ont jamais engrangé le moindre bénéfice malgré des centaines voire des milliards de dollars de chiffre d'affaires. Spotify prévoit un revenu en hausse de 20 à 30%, entre 4,9 et 5,3 milliards  d'euros en 2018. Encore jamais rentable, la société suédoise prévoit néanmoins de ramener sa perte opérationnelle entre 230 et 330 millions d'euros, contre 378 millions en 2017.    

Mais sa priorité à court terme, c'est le nombre de ses abonnés, qu'elle espère porter cette année à 92 millions au moins. Le streaming, qui continue de redessiner le paysage de l'industrie musicale poursuit en effet sa croissance et sert de locomotive aux ventes de musique, le succès de Spotify y étant pour beaucoup.    

Mais cette ascension ne s'est pas faite sans contestation, beaucoup d'artistes lui reprochant notamment de leur reverser trop peu.

En vue de cette entrée en Bourse, Spotify a conclu récemment un accord de participations croisées avec le chinois Tencent, ce qui préoccupe certains analystes, qui s'inquiètent des liens entre Tencent et l'Etat chinois.

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