Dossier No Trust No Business
Incarnation, récit technologique, nouvelle temporalité, cohérence et engagement… Natalie Rastoin, présidente d'Ogilvy Paris, livre sa vision de la confiance et de ce qu’elle signifie pour les marques.

La confiance, finalement, qu’est-ce que c’est?

Natalie Rastoin. C'est un facteur de simplication extrême pour notre quotidien. C’est un contrat social fondateur, qui permet de ne pas réinterroger à chaque fois l’ensemble des données disponibles pour prendre une décision. La marque est une cristallisation symbolique de la confiance, une incarnation qui facilite le passage à l’acte pour l’individu.

 

Comment la transformation numérique a-t-elle pu impacter cette notion de confiance?

Les individus se sont emparés de la technologie pour reprendre le pouvoir et acter un pacte de confiance entre eux plutôt qu’avec la marque. La parole commune a créé des courts-circuits ainsi qu’un état de méfiance envers tous les corps constitués.

 

Face à ce bouleversement des hiérarchies, quelles sont les réponses pour les marques?

On attend d’elles des engagements et de la cohérence, posture contrôlable à tout moment grâce à l’apparition d’outils technologiques citoyens. Elles ne peuvent donc désormais plus raisonner en silo mais en valorisant une culture homogène, lisible et explicite pour satisfaire un individu devenu citoyen, consommateur et employé en même temps. Elles doivent aussi apprendre à gérer de nouvelles temporalités, se retrouvant maintenant à égalité avec le consommateur en termes de production de contenus et de cadence de diffusion. Enfin, l’incarnation n’est plus une option, car plus on digitalise, plus on a besoin d’humain. Le dirigeant doit porter lui-même cette parole, et s'il ne le fait pas, il prend le risque que d’autres le fassent à sa place.

 

Comment gérer les doutes de plus en plus forts de l’opinion publique sur l’utilisation des données personnelles?

À l’image du récit environnemental qu’elles ont déjà, nous croyons beaucoup à l’existence prochaine d’un récit technologique pour toutes les entreprises. Il éclairera les consommateurs sur la manière dont elles utilisent la data, nouvelle responsabilité contemporaine des entreprises.

 

Est-ce la fin d’une époque?

C’est plutôt le début d’une nouvelle étape décisive. Nous sortons de quinze ans de magie technologique où tout était miraculeusement plus simple, plus accessible, plus rapide et plus intelligent. Nous commençons seulement à comprendre ce que cela signifie en termes d’enjeux personnels, politiques et sociétaux et cela nous fait peur. Je mise sur le retour des tiers de confiance, que les gens réclament de plus en plus fort pour les protéger. Les marques en font partie, et ce qu’elles décideront maintenant déterminera notre avenir. Il y aura des gagnants et des perdants, mais l’excellente nouvelle, c’est que rien n’est joué pour personne. Les perdants ne viendront pas forcément de l’ancien monde, ni les gagnants du nouveau. Car le premier garde un avantage énorme sur le second, celui de l’histoire.

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