Alimentation
Empire familial depuis cinq générations, Fleury Michon prend le pli de la publicité assez tardivement. Suite à la suspicion généralisée vis-à-vis de la filière agroalimentaire, la marque invite les consommateurs chez ses producteurs.

En un siècle, l’exploitation du marché de Fleury Michon n’a cessé d’évoluer. Se plaçant en deuxième position des marques les plus vendues en GMS, les produits Fleury Michon sont devenus des indispensables dans les frigos. Parti d’une petite boutique à la Roche-sur-Yon en 1905, Félix Fleury, négociant en porc accompagné de son beau-frère Lucien Michon, charcutier de métier, montent les prémices de ce qui deviendra cent ans plus tard un empire. Des carcasses de porc au plats transformés en passant par les steaks de soja, la marque s’est adaptée, suivant sans faillir les tendances alimentaires. Seulement, l’industriel a longtemps attendu avant d’investir le terrain de la promotion commerciale. « Les premières traces remontent au sponsoring avec Philippe Poupon à bord du ketch signé Fleury Michon. Pendant dix ans, cette visibilité a marqué les esprits », raconte David Garbous, directeur de la stratégie marketing de Fleury Michon.

En 1997, une étude menée par Sorgem démontre pourtant que malgré sa forte notoriété, Fleury Michon n’a pas encore réussi à se construire une image claire. La moitié des consommateurs voient le principal intéressé comme un industriel quand l’autre moitié le conçoit comme un charcutier-traiteur. La marque fait donc appel à l’agence Business pour redéfinir son territoire de communication. Pour ce qui est du logo, l’agence Dragon Rouge fait une croix sur la tête de cochon, un peu dépassée, et opte pour une écriture stylisée de la marque. Slogan adopté ? « Fleury Michon, on sait pourquoi c’est si bon ». En 2013, DDB Paris réaffirme le côté authentique et familial de la marque avec le film « L’Authentique ». Il s’inspire des devantures du premier magasin construit dans les années 20, rue Turbigo à Paris. 
Surimi et image

La même année, la crise du cheval dans les lasagnes scandalise les foyers et crée la suspicion. Chez Fleury Michon, pas de cheval mais du surimi à la composition mystérieuse. Un temps portées par la vague des régimes Dukan, les ventes de surimis Fleury Michon chutent net. « En 2010, l’équipe DDB est allée visiter les usines et s'est rendu compte que la marque ne recyclait pas de chair de crabe ni d’arêtes de poisson mais employait une technique de conservation japonaise ancestrale. Nous avons tout simplement réaffirmé la vérité en signant “L’obsession du bon” », se remémore Vincent Léorat, vice-président de DDB Paris. Jean-Sébastien Tamisier, alors responsable marketing de Fleury Michon, entend réassurer les consommateurs. « Au départ, une campagne classique était prévue mais elle était dissonante quant à la gravité du problème. C’est pour cela que nous avons décidé d’ouvrir nos portes et donner à voir la réalité de ce produit », explique David Garbous, actuel responsable marketing. Avec la campagne « #VenezVérifier », c'est le carton. Les ventes de surimi, en chute de 5%, grimpent de 12% au cours de l’année 2014. Aujourd'hui, les Français en avalent plus de 60 000 tonnes par an.

Cette logique de transparence est poursuivie en 2015 avec la gamme « J'aime », dédiée cette fois-ci à la filière porcine. L’industriel invite les consommateurs à visiter les porcheries en Bretagne, dont la viande est garantie sans OGM et sans antibiotiques après le 42ème jour de sevrage. Nouveau succès, puisque les ventes augmentent de 10%. Pourtant, la marque décide de changer d'agence. « Avec DDB, on a marqué un gros changement dans la communication. Mais nous souhaitions passer un autre cap, nous avons donc lancé un nouvel appel d’offres, remporté par Buzzman », relate David Garbous.
Du bon « sans »

La marque choisit alors de jouer la carte du naturel et du sain avec la surutilisation de la préposition « sans ». Sans conservateur, sans nitrites, sans sel, sans couenne… « La sensibilité des Français sur l’alimentaire n’était pas aussi importante qu’aujourd’hui. Les mamans s’intéressaient plus à la qualité et l’équilibre des repas de leurs enfants à la cantine. Désormais, elles priorisent le côté bio », rappelle Vincent Léorat, vice-président de DDB Paris. 

Rappelons qu'outre son partenariat avec Joël Robuchon signé en 1987, Fleury Michon fut l’un des premiers en 1973 à vendre un jambon Label rouge. Lorsque Yves Gonnord, ancien président de l’enseigne, découvre aux États-Unis les plats frais à emporter, il réfléchit à faire de même en France. S’inspirant des techniques de cuisson sous vide des grands chefs étoilés, le premier plat cuisiné est lancé en France en 1975. Quelques années plus tard, le micro-ondes fera son apparition dans les foyers les plus aisés, une aubaine pour le traiteur.

Sur fond de déstructuration des repas et de crises alimentaires, Fleury  Michon s’emploie à s’adapter aux us et coutumes de ses clients. « Nous retravaillons notre gamme végétale afin de proposer des plats de meilleure qualité. Nous espérons que 20% de notre chiffre d’affaires sera réalisé grâce au végétal d’ici à cinq ans », prévoit le directeur marketing. Un élargissement de la gamme en accord avec la demande. D’ailleurs dans leur dernière campagne, toujours réalisée par Buzzman, les salades Jar [salades en bocal], dernières-nées de la marque, sont mises en avant pour leur côté pratique. « Trois scènes de la vie quotidienne qui démontrent comment le produit s’adapte aux consommateurs et non l’inverse », conclut David Garbous. Une recette inchangée pour Fleury Michon.

Dates-clés

1905. Félix Fleury et Lucien Michon s’associent et créent leur premier magasin charcutier.

1964. Fleury Michon investit les grandes surfaces.

Années 2000. Fleury Michon s’exporte à l’international, il est présent dans huit pays.

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