Trésorerie
Les conseils de Guillaume Cornu, responsable du restructuring et du Middle-Market chez EY, pour traverser cette crise, sans y laisser trop de plumes.

« Cette crise est inédite d’un point de vue économique et financier : à la différence de celles de 1991, 2001 (explosion de la bulle internet) ou 2008, cette récession est d’une violence inouïe parce que la plupart des activités s’arrêtent en même temps. Distribution (non alimentaire), hôtellerie, tourisme, automobile…, partout le business est au point mort. Aujourd’hui cela s’applique à une grande majorité des PME ou ETI (entreprises de taille intermédiaire). La plupart de ces sociétés étaient en pleine santé et en croissance jusqu’en 15 mars, et se retrouvent confrontées à des difficultés du jour au lendemain.

Elles doivent assurer leur survie à court terme et préparer le rebond à moyen et long terme. Dans toute situation de tensions, de crise, il faut en premier lieu savoir acheter du temps. Pour cela il faut essayer de rester le plus indépendant possible, et donc le plus « riche » en trésorerie. Cela permet de prendre le recul suffisant pour réfléchir et préparer « le jour d’après ».

 

« La trésorerie c'est le nerf de la guerre »

 

Pour assurer sa survie à court et moyen terme (fin décembre 2020), il faut d’abord porter une attention particulière aux trois prochains mois. Dans cette phase, la trésorerie est plus que jamais le nerf de la guerre, on s’occupera de l’EBITDA après. Mettez en place une prévision de trésorerie hebdomadaire à 13 semaines, qui doit être un outil de pilotage mais aussi de communication avec les parties prenantes. Il est important d’avoir une vision de ses besoins de trésorerie bruts, avant tout financement ou mesures d’optimisation du cash : je dois positionner toutes mes échéances comme si je devais les payer, mais j’ajuste mes encaissements et décaissement en fonction de mon niveau d’activité et de la variabilisation de mes charges.

 

« Un tableau de trésorerie sensibilisé »

 

Puis je dois prendre des mesures immédiates : décalage de capex (capital expenditures), arrêts ou reports de projets consommateurs de cash, suppression de tous les coûts non nécessaires à l’exploitation à court terme… mais en s’assurant que cela n’aura pas d’impact négatif durable sur le business.

Ce travail permet d’afficher un besoin brut ajusté qu’il faut couvrir d’une part par les financements courts termes qu’il est important de « tirer ». Puis il faut intégrer les mesures gouvernementales : activité partielle, décalages fiscaux et sociaux, mise en place du prêt garanti par l’Etat et négocier des décalages de charges avec tous ses partenaires : bailleurs, fournisseurs… Tout cela doit permettre d’optimiser son cash. Ce tableau de bord nécessite d’être « sensibilisé » (ajuster les hypothèses) et réactualisé en permanence.

 

« La confiance c'est de la trésorerie »

 

Cet outil de pilotage de la trésorerie doit aussi devenir un outil de communication et de préservation de la confiance avec ses partenaires. La pire erreur à ce stade serait se couper de ses partenaires : banquiers, fournisseurs, assureurs crédits, salariés... La confiance c’est de la trésorerie ; la défiance c’est une perte de cash. Il faudra bien sûr les rassurer en leur démontrant que l’entreprise était alignée avec ses prévisions de croissance et de budget jusqu’au 15 mars et que ces difficultés sont bien liées au covid-19. Puis leur partager votre plan pour la suite et les mesures de management déjà prises pour optimiser votre cash à court terme. En leur expliquant que vous reviendrez les voir très vite pour leur présenter un plan de redressement plus complet très prochainement. »

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