Tourisme
Touché frontalement par la crise du coronavirus, Club Med s’appuie sur sa nouvelle agence Moonlike M&C Saatchi pour entretenir la proximité avec ses publics et le ton qui singularise sa communication.

Le timing a de quoi faire rager. Et plomber les 70 ans d’un acteur phare du tourisme mondial, dans un contexte où la stratégie de montée en gamme déployée depuis le milieu des années 2000 portait ostensiblement ses fruits. Pour Club Med, ses 68 villages aux quatre coins de la planète, ses 12 000 salariés et ses près de 1,5 million de clients enregistrés en 2019 – un record depuis 2002 –, le coup est dur à encaisser. Comme pour l’ensemble des poids lourds de la filière, la crise actuelle née de la pandémie de coronavirus contraint le groupe à l’arrêt quasi-total de ses activités. Sans parler de l’illisibilité scientifique, politique et économique qui subsiste aujourd’hui quant à une éventuelle reprise. Une situation qui affecte par ricochet la communication de l’inventeur du all inclusive, forcé de composer avec le digital pour principale option ainsi que le concours de Moonlike M&C Saatchi (M&C Saatchi.GAD), sélectionnée fin janvier.

Baptême du feu

« La collaboration a débuté le 1er mars. Autant dire que nous avons été directement dans le vif du sujet », rappelle son CEO Jacques-Édouard Duffour, à propos d’un véritable baptême du feu pour l’agence, choisie au terme d’une compétition cousue main par l’entreprise tombée en 2015 dans le giron du chinois Fosun. « Le rôle de l’agence consiste à assurer le pilotage et la cohérence créative de l’ensemble des leviers commerciaux : CRM et animation, contenus, social media… L’idée avec cet appel d’offres mené en trois tours est de passer de cinq agences et des freelances à une seule pour limiter le ping-pong continuel qu’entraîne la multiplication des partenaires », recontextualise Aline Ducret, directrice marketing Europe et Afrique de Club Med, en référence à des volets gérés jusque-là par des agences comme FF Paris, Disko ou MullenLowe One.

« L’enjeu principal est de réinjecter une tonalité éditoriale en ligne avec la marque et son historique tout en apportant une modernité dans le ton. La tonalité de Club Med est très particulière. C’est un subtil équilibre entre premium et décontraction. Or la difficulté vis-à-vis de notre secteur est de garder cet angle qui caractérise la marque et sa communication. Il est aisé de tomber dans le piège du banal ou des dénominateurs communs en termes de communication commerciale. Et c’est un combat quotidien que d’entretenir cette image », poursuit-elle. « Le but n’est pas de révolutionner Club Med, qui dispose d’une plateforme de marque déjà bien établie, mais de conserver cette identité à la fois haut de gamme et conviviale », appuie Jacques-Édouard Duffour, dont le quotidien – comme celui de son client et d’une grande partie de la population mondiale – a radicalement changé avec le confinement.

Club Med à la maison

À la clé, une collaboration paradoxalement plus étroite que jamais, en témoignent les « 20 à 30 interlocuteurs avec lesquels l’agence compose côté Club Med », une « coordinatrice dédiée à 100% aux différentes équipes » ou encore les « trois créatifs travaillant en permanence sur le sujet », pointe Mylène Cabrera, directrice conseil chez Moonlike. « En équivalent temps plein, cela représente cinq à six personnes qui travaillent exclusivement pour Club Med en ce moment », chiffre Jacques-Édouard Duffour, qui souligne également les gains en termes de réactivité. « Cela faisait partie du processus d’évaluation mis en place lors de la consultation d’agences, à savoir disposer d’outils de suivi de projet et d’animation extrêmement digitalisés reflétant le côté presque “SSII” de notre organisation », confirme la directrice marketing.

Car si l’activité de la griffe est en suspens, les sujets, eux, ne manquent pas. « Après avoir beaucoup œuvré autour du rapatriement courant mars, nous sommes entrés dans une nouvelle phase. Alors que nous étions en campagne au début de la crise, nous avons débranché la majorité des budgets et réduit nos investissements prévisionnels globaux à hauteur de 80%, sachant que nous avons déjà basculé une partie de nos investissements vers les canaux numériques au cours des 18 derniers mois », éclaire Aline Ducret au sujet du modus operandi adopté par la marque au trident ces dernières semaines. Une stratégie qu’incarne plus spécifiquement l’opération Club Med à la maison, donnant accès de chez soi à un panel d’activités allant de séances de yoga en live à des jeux de société en passant par des recettes à réaliser issues des cuisines des complexes du groupe. En résumé, « tout ce qui permet de se réinventer et d’entretenir le lien déjà fort entre nos GO et nos publics en cette période de pré-vacances », observe Aline Ducret, pour qui le « principal défi consiste à produire des contenus sans resorts ouverts ».

Hypothèses roulantes

Une mission qui ne change toutefois pas le fond du message, comme l’explique Mylène Cabrera. « On adapte et on décline la communication mais le storytelling reste le même que celui développé dans le cadre du pitch. Et cela fonctionne puisque l’opération a permis de toucher plus de 1,5 million de personnes sans médias et que le recrutement est même en légère augmentation sur des réseaux sociaux comme Facebok et Twitter », illustre la directrice conseil, pour qui « cette prise de parole propriétaire fait partie des initiatives de nature à faire la différence » en ces temps de confinement.

« On ajuste notre communication mais pas seulement. On travaille beaucoup à l’aveugle, avec des hypothèses roulantes et différentes vagues de communication envisagées de manière à préserver les budgets et à être en mesure d’assurer le rebond et la sortie de crise », complète Aline Ducret, citant des pistes de réflexion sur lesquelles capitaliser comme la « volonté de s’affranchir de toute logistique » ou celle plus évidente encore de « voyager après avoir été longuement confiné ». En attendant des jours meilleurs, Club Med va donc continuer à s’appuyer sur un versant digital aux allures de figure de proue. Un choix somme toute logique pour affronter la tempête déclenchée par le Covid-19.

Chiffres clés

68 Nombre de villages Club Med dans le monde.

67% Part de la clientèle étrangère en 2019.

12 000 Nombre total de salariés du groupe (5 000 en France).

1,49 million Nombre de clients enregistrés en 2019, soit le niveau le plus élevé depuis 2002.

18 millions d'euros Investissements publicitaires bruts en 2019 (+9% sur un an) selon Kantar Media, principalement en TV (8,6 millions), cinéma (5,6 millions) et digital (2,3 millions).

1,7 milliard d’euros Volume d’affaires 2019 de Club Med.

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