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Mieux préparées, adaptées, diversifiées… Cette deuxième vague, plus souple que celle de mars, a moins secoué les start-up du secteur des technologies publicitaires. La tendance serait même à l’innovation et aux solutions alternatives.

«Le 17 mars dernier, au lendemain du discours d’Emmanuel Macron annonçant la mise en quarantaine de tous les Français, entre 50 et 80% des campagnes publicitaires furent coupées, se souvient Damien Peponnet, directeur général France & Benelux d’Adyoulike, ad tech spécialisée dans le native advertising. Ce 29 octobre, à l’annonce d’un deuxième confinement, nous étions plus proche de 10 à 30% d’interruption».

Les acteurs de la publicité digitale sont unanimes, l’effet de cette seconde phase est clairement moindre que la première. La raison est simple: la plupart des secteurs annonceurs continuent de fonctionner, d’une manière ou d’une autre, en physique ou en ligne. Côté consommateurs, par peur de manquer ou pour occuper les journées d’isolement, les achats ne ralentissent pas. «En ce moment, nous faisons des journées équivalentes en volume à certains premiers jours de soldes, témoigne François Deltour, président d’Effinity et du Collectif pour les acteurs du marketing digital. C’est presque le double d’une journée ordinaire. Et le gros des clients ce sont des commerçants, pas que des e-marchands.» Pour autant, ce spécialiste tient à apporter une nuance à ses propos: «Il y a croissance, mais cette croissance est aussi à relativiser. Dans un contexte où l’ad tech ressent déjà les effets des nouvelles mesures de la Cnil, sur le recueil du consentement, qui rendent le business plus complexe. Ce qui contrebalance un peu l’effet de cette vague dans le marketing à la performance.»

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Mais si les investissements sont fragilisés, au cœur d’un quatrième trimestre traditionnellement crucial pour le secteur de l’ad tech, avec le Black Friday et les fêtes de fin d’années, dans l’ensemble, le secteur se dit «optimiste». «Même si nous ne ferons pas les mêmes chiffres qu’attendus, et que nous avions espéré un Q4 qui rattrape le reste de l’année, les brief continuent de rentrer», confie pour sa part Christophe Collet, le CEO de la plateforme drive-to-store S4M.

Des lendemains qui chantent

Dans le détail, on observe que certains marchés tirent leur épingle du jeu, voire explosent: le secteur bancaire, via des sollicitations plus nombreuses en temps de crise pour contracter un crédit à la consommation ou renégocier un crédit immobilier, par exemple. Ou le retail, notamment alimentaire, et la grande distribution, qui sont flamboyants. D’autres domaines sont, bien-sûr, plus en difficultés, à l’instar du tourisme ou de l’automobile. «Ce dernier secteur a pris le contrepied de la première période, où il ne communiquait plus. À la réouverture des concessions, les carnets de commande ont enflé, avec un décalage important sur la chaîne de production. Ainsi, ce quatrième trimestre représente l’opportunité de réguler ce retard. La stratégie est donc très différente: les concessions restent ouvertes, l’occasion de travailler sur l'image de marque», examine Damien Peponnet.

Et c’est là l’un des phénomènes de cette deuxième vague: la volonté chez les annonceurs de chercher des alternatives, des opportunités. «L’impact favorable que cette crise a sur notre activité, c’est la relation de proximité qu’entretiennent de plus en plus les marques avec leurs consommateurs, indique Jean-Pierre Remy, fondateur et président directeur général de DeepReach, qui développe une plateforme de communication locale pour les agences et les annonceurs. Le click and collect, le drive, le back to store ou le circuit court, sont des tendances de fond de la communication digitale.» Même son de cloche chez Adyoulike: «De bons enseignements ont même été tirés, multi-sectoriels, pour adapter les modèles, avec des chatbots, de la mise à disposition de conversationnel, de nouveaux formats innovants… Avec un objectif commun: maintenir le lien de communication avec les clients.»

«Cette période doit être saisie comme l’opportunité de communiquer différemment, de se montrer solidaire, d’aller toucher les gens là où ils sont, et ne pas se conforter dans une dépendance à un seul réseau, un seul type de média», recommande Christophe Collet de S4M, qui entrevoit déjà «des lendemains qui chantent». «En tant que plateforme drive-to-store, nous aurons notre rôle à jouer. Au lendemain du premier lockdown, on se souvient des files d’attente monstre devant les magasins.» L’ad tech doit se préparer aussi à être le partenaire du déconfinement.

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Les modèles pour survivre

Avant de lancer DeepReach, Jean-Pierre Remy a passé des mois à étudier le secteur des technologies publicitaires pour dégager les modèles gagnants. Des tendances que la crise ne fait d'accélérer, révéler. Voici les 7 conseils pour adapter son modèle.

  • Prendre le parti annonceurs. Face au duopole publicitaire Google et Facebook, il est préférable de se placer du côté de la demande plutôt que du côté médias, car la concurrence y est trop forte.
  • Etre partenaire des agences. En tant que fournisseurs de technologie, rien ne sert de vouloir jouer le rôle d’agences, déjà trusté par des acteurs historiques. Mais au contraire, avoir les agences comme clients.
  • Viser local. Google et Facebook sont très forts au niveau national et international. Ils captent les plus grands annonceurs mondiaux. Au niveau local, la concurrence reste plus ouverte.
  • Diversifier les médias. Les ad tech concentrées sur un seul type de média sont en difficulté. Il est recommandé d’être cross-média: réseaux sociaux, display, search, etc.
  • Ne pas se baser sur les données personnelles. Les consommateurs ne le tolèrent pas et les règles se renforcent de plus en plus. Il est dépassé de voiloir fonder son activité sur l’utilisation des donnés personnelles. D’autres datas sont tout aussi pertinentes telles que l’analyse de marché, des campagnes… Viser l’étude de segments médias, géographiques, statistiques, contextuels, et ne pas cibler une personne en particulier.
  • S’emparer du machine learning. Les ad tech des années 2010 utilisaient des algorithmes figés, qui n’apprenaient pas de toutes les campagnes traitées. aujourd'hui, des algorithmes d'intelligence artificielle plus évolutif ont bouleversé le secteur, il faut s’en saisir.
  • Concevoir des interfaces les plus simples possibles. L’ad tech doit désormais pouvoir parler à n’importe quel patron de PME. Transparents, optimisés, déployables, sans jargon technique lié au marketing digital, les tableaux de bords doivent être accessible à tous.
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