Interview
Delphine Bouclon, présidente de la Clé, nouvelle association représentant les lieux d'événements, exprime son inquiétude.

Quel bilan dressez-vous de la crise de ces derniers mois pour les lieux événementiels ?  

C’est différent selon les lieux, selon leur taille et la typologie des événements accueillis. Tous les grands sites de congrès, foires, salons sont complètement à l’arrêt depuis mars. Les plus «petits» tournés vers les séminaires ou les réunions de moindre taille ont pu repartir très timidement avec des réunions de dix, vingt personnes pendant une période courte [entre les deux confinements, ndlr]. Tous, nous avons perdu, en moyenne, 60 % de notre business sur l’année 2020. Certains ont perdu 100 %.

Lire aussi : Reconfinement : ce qu'en pensent les acteurs de l'événementiel

Tous les gestionnaires de sites ont eu recours au chômage partiel. C’est une grosse inquiétude. A date [le 24 novembre], nous n’avons aucun signe que le gouvernement nous aiderait l’année prochaine aux mêmes conditions. C’est une inquiétude grandissante car si ce n’est pas le cas, on verra 50 % des entreprises mourir dans les six premiers mois de 2021. Pour l’instant, nous sommes sous perfusion, grâce au chômage partiel, aux aides du gouvernement et aux prêts garantis par l’Etat (qu’il faudra toutefois rembourser).

A l’image des événements, qui se sont digitalisés, quelles alternatives avez-vous trouvées pour pouvoir continuer votre activité ?

Beaucoup d’entre nous, du moins ceux qui ont pu prendre des partenaires techniques, ont créé la possibilité de réaliser des images pour les événements digitaux des entreprises. Une quarantaine de studios ont vu le jour rien qu’à Paris. Nous nous sommes mis en action pour que nos clients puissent venir. Cela a un coût même si les partenaires techniques jouent le jeu, mais globalement la location d’un plateau TV, de 5 000 à 30 000 euros pour les plus gros, ne peuvent pas absorber les charges. C’est une solution pour répondre aux besoins des clients mais cela ne sert pas à sauver nos entreprises.

Quelle est votre vision pour la suite ?

Le déconfinement ne sera pas «plug and play». Quand les restaurants rouvriront, ils auront du monde, même s’ils devront revoir leur taux de remplissage, respecter des consignes sanitaires strictes. Nos carnets de commandes sont vides pour la période de janvier à mars 2021. Nous tablons sur une reprise en septembre. Les petits événements de dix, vingt, trente participants seront toujours possibles entre janvier et mars mais il y en aura moins et pour une partie ils seront hybrides. Il n’y aura pas d’événements de plus de cent personnes avant juin voire septembre 2021. Nous sommes interdépendants de la «frilosité» des entreprises. Par exemple, ce n’est pas parce qu’elles pouvaient se réunir en septembre-octobre qu’elles le faisaient.

Quoi qu’il en soit, ce temps de latence [les clients ne reviendront pas du jour au lendemain] nous fait dire que si on n’a pas d’aides réelles et engagées, la survie des entreprises est engagée à moins de huit mois pour 70 % des entreprises de la filière événementielle. Nous sommes reconnaissants de vivre en France et d’avoir un gouvernement qui a pris des mesures pour nous aider. On a vraiment besoin d’un plan de relance qui accompagne le secteur pour éviter que nos entreprises ne mettent la clé sous la porte. L’autre sujet porte sur le protocole sanitaire toujours très flou nous concernant. On en parle pour le commerce mais pas pour l’événementiel. Il vaudrait mieux parler en densité (par exemple : une personne sur deux dans un auditorium) et plus en jauge. Nous travaillons également là-dessus.

Lire aussi : Ces mesures qui donnent des sueurs froides aux organisateurs d'événements

Les lieux événementiels se rassemblent et lancent la Clé

Misant sur l’unité du secteur par temps de Covid, les gestionnaires de sites de séminaires et événements se sont rassemblés à travers une association de loi 1901 baptisée La Clé (pour Collective des lieux événementiels), officialisée au mois de novembre. Présidée par Delphine Bouclon, directrice de l’événementiel de Châteauform’, La Clé veut s’associer aux autres assos du secteur pour défendre la filière tout en faisant valoir d'autres revendications non liées à la crise (accueil du public, valorisation du patrimoine…). Elle travaille actuellement, entre autres, à collecter des données sur la réalité économique du métier. La Clé représente aujourd'hui 150 lieux. 

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.