Dossier DNVB
Certaines marques viennent de se lancer, d’autres sont nées avant l’invention du sigle DNVB. Portraits de huit jeunes pousses qui titillent les grandes boîtes.

Tediber, le matelas en circuit court

L’idée. Inspiré par l’américain Tuft & Needle, Julien Sylvain a fondé Tediber en 2015 avec la volonté de « disrupter » le marché du matelas, opaque sur les marges et la fabrication. Tediber vend en direct sur internet sans marge de distributeur et fait fabriquer chez les spécialistes de la literie haut de gamme, en Belgique. Ainsi la marque vend 650 euros sans promotion un produit qui serait affiché à 1 600 euros dans un circuit classique. « Avec un seul modèle en plusieurs tailles, nous réduisons les coûts et offrons un bon produit qui répond à l’essentiel des besoins du marché », explique le fondateur. Celui-ci est à l’origine du collectif France DNVB, qui rassemble des sociétés représentatives d’un « modèle d’entreprise en direct avec le consommateur où on simplifie tous les flux ».

La suite. Aujourd’hui, Tediber vend toujours à 90 % sur internet, même s’il a ouvert un concept store, La Boîte de Nuit, dans le Marais à Paris, qui propose des couettes et des oreillers fabriqués en France. Il garantit la livraison en une journée, avec l’option à vélo dans la capitale. Malgré le coup d’arrêt de mars 2020, l’entreprise a doublé son activité l’année dernière. Elle a réalisé 25 millions d’euros de chiffre d’affaires, avec 40 employés.

Le plus. Si Tediber est très proche de ses clients sur les réseaux sociaux, il teste tous les formats de communication : référencement naturel et payant, affiliation, affichage dans le métro et même télévision, avec l’agence My Media.

 

Le Slip Français, la start-up à mission

L’idée. Le Slip Français a déjà dix ans et a évolué d’une start-up de la mode vers une entreprise à mission engagée pour le renouveau du textile hexagonal. « On a démarré comme une DNVB avec un bon produit, un bon service, l’écoute des clients et une démarche d’innovation constante, se souvient Guillaume Gibault, le fondateur. Mon idée de départ était de distribuer une marque de mode sur internet mais ce n’est pas suffisant, il faut raconter une histoire. Celle du Slip est de défendre un savoir-faire, d’où notre mission formulée en 2020 : réinventer avec panache l’industrie textile française. »

La suite. Le Slip Français réalise désormais 25 millions de chiffre d’affaires avec 120 salariés et 21 boutiques en propre ainsi que des revendeurs. Elle participe à plusieurs projets de relance du textile : renouveau de la filière laine, recyclage du coton… Elle a aussi organisé un réseau de fabrication de masques pendant le premier confinement.

Le plus. Début 2020, un scandale raciste causé par deux salariés a éclaboussé la réputation de toute l’entreprise. Des employés de boutique ont même été agressés. Guillaume Gibault a réagi en s’entourant des associations Diversidays et Mozaïk RH pour favoriser la diversité des recrutements. « Par ce triste épisode, je me suis remis en question. J’ai pris conscience du manque d’inclusivité dans notre écosystème, souvent issu des mêmes écoles de commerce. »

 

Jimmy Fairly, les lunettes à prix juste

L’idée. Encore un vétéran des DNVB, créé il y a bientôt dix ans. Les fondateurs Sacha Bostoni et Antonin Chartier sont partis du constat que le marché de l’optique était absent de la vente en ligne et sont arrivés avec une proposition toute simple : « des lunettes cools à prix juste et de qualité ». Chez Jimmy Fairly, on ne paye pas la licence d’une marque de luxe, on n’est pas noyé sous le choix, les montures sont sans phtalate et assemblées en France (les verres viennent d’Asie) et pour une paire achetée une autre est donnée à une ONG.

La suite. Dès sa deuxième année, Jimmy Fairly a ouvert une boutique, car le marché français de la lunette est propice au commerce physique au contraire des États-Unis et du Royaume-Uni. La marque compte désormais une cinquantaine d’adresses, dont trois à Londres. Son chiffre d’affaires est supérieur à 40 millions d’euros pour 250 salariés.

Le plus. Les boutiques de Jimmy Fairly participent à la communication de la marque : d'une surface de 20 à 30 m2, elles sont situées dans les rues les plus commerçantes et permettent de tester la relation client en conditions réelles.

 

Les Petits Bidons, la lessive plus verte

L’idée. Les Petits Bidons est une jeune DNVB puisqu’elle est née en 2018 à travers un financement participatif sur la plateforme Tudigo. Son fondateur, Cyril Neves, est un ancien de l’industrie traditionnelle, qui voulait créer une lessive vraiment naturelle et transparente. « Contrairement à la cosmétique, les lessives n’ont pas l’obligation d’afficher leur liste d’ingrédients. Les consommateurs ne savent pas par exemple qu’elles contiennent souvent de l’huile de palme et des substances non filtrées par les stations d’épuration, explique-t-il. J’ai travaillé avec un laboratoire des Bouches-du-Rhône pour développer une formule simple et efficace, avec des tensioactifs à base d’huile de tournesol, d’olive et de ricin. »

La suite. En un an, Les Petits Bidons a dépassé le million d’euros de chiffre d’affaires et est passé de quatre à dix employés. La gamme s’est étendue aux produits vaisselle, aux détachants, à la lessive en poudre en baril de carton pour réduire le plastique. Elle compte 80 000 abonnés sur les réseaux sociaux.

Le plus. Davantage qu’une DNVB, Les Petits Bidons se définit comme une ONVB (O comme omnicanal) car elle est distribuée aussi bien par abonnement sur son site internet qu’en magasins spécialisés : Naturalia, Les Nouveaux Robinsons, BVH Marais, La Grande Epicerie, quelques pharmacies…

 

Merci Handy, opération mains propres

L’idée. Lorsqu’ils ont fondé Merci Handy en 2014, Louis Marty et Roland Jais-Nielsen étaient adeptes de la « finger food », les repas avalés avec les doigts. Ils cherchaient un gel pour se nettoyer les mains à la fois pratique et désirable. « Les femmes ont leur rouge à lèvres Chanel et leur fond de teint Terracotta dans leur sac, pourquoi pas un gel iconique, avec un parfum, une couleur, un storytelling spécifiques ? », explique Maud Cariddi, directrice marketing. C'était avant le début de la crise sanitaire, qui a généralisé l'usage du gel hydroalcoolique à travers le monde. Contrairement à la logique de proximité, les gels Merci Handy, moins désinfectants que le gel hydroalcoolique, sont fabriqués en Chine, auprès d’un fournisseur capable de produire des petits volumes, mais qui est resté le même depuis le début. La marque s’est rapidement étendue aux cosmétiques (crèmes pour les mains, déodorants, savon, soin visage au chanvre et à l’aloe vera), fabriqués eux en France.

La suite. Merci Handy a tout misé sur les réseaux sociaux. Elle vient de dépasser les 500 000 abonnés sur Instagram, avec un taux d’engagement exceptionnel de 19,6 %. « Quand on hésitait sur le nom d’un nouveau gel, on a posé la question à la communauté et on a reçu 15 000 réponses en 12 heures, relate Maud Cariddi. Dans une grande entreprise, on aurait organisé des focus groups, cela aurait été beaucoup plus long. » Côté distribution, tout est bon à prendre : site internet, Sephora, Marionnaud, Monoprix, et pop up stores.

Le plus. En 2019, la marque a quitté Facebook au profit de TikTok. Elle compte déjà 350 000 abonnés sur la plateforme musicale où elle communique avec des influenceurs, conseillée par la société Reech.

 

Koosh, jeunes parents et entrepreneurs

L’idée. Andréa Isak et Simon Picca, les parents de Koosh, sont avant tout ceux d’une petite fille de 3 ans qui cherchaient les meilleurs produits pour leur enfant. « Les couches écologiques existaient mais on les a améliorées avec une barrière anti-fuite à base de canne à sucre et on a ajouté les produits complémentaires d’hygiène sans parfum de synthèse », explique Andréa Isak. Parmi les nombreux engagements de la marque, on compte des packagings biosourcés, des lingettes en Tencel, une matière issue de la pulpe d’eucalyptus, une fabrication française dans les Vosges… L’absence d’intermédiaires permet de baisser les prix et une formule d’abonnement dégressive rend l’offre compétitive par rapport aux concurrents (notamment Joone, autre DNVB de la couche).

La suite. Koosh a lancé son site en janvier 2020, deux mois avant la crise sanitaire, mais celle-ci n’a pas freiné sa croissance. La société est devenue rentable en moins d’un an. Tous les jeudis, les fondateurs donnent rendez-vous à leurs abonnés sur Instagram (près de 6 000 à ce jour), ce qui personnalise la relation. Prochaine étape : l’international.

Le plus. Contrairement à ses petits camarades, Koosh est 100 % internet et n’envisage pas d’être présent en boutique physique.

 

Chefclub, le pure player de la cuisine

L’idée. À l’origine de Chefclub, trois frères, Thomas, Jonathan et Axel Lang, plus doués pour les affaires que pour la cuisine. Alors que la vidéo commençait à exploser sur les réseaux sociaux, fin 2015, ils ont l’idée d’une chaîne qui fédèrerait une large communauté. Grâce à des recettes spectaculaires et à un rythme de production soutenu, Chefclub atteint 100 millions de followers sur les réseaux sociaux et plus d’un millard de vues mensuelles dans une dizaine de pays. Tout est conçu dans ses studios parisiens, près de la place de la République.

La suite. Chefclub a rapidement monétisé son contenu par l’édition de livres de recettes et de produits en co-création avec sa communauté. Elle s’est lancée dans la commercialisation d’ustensiles, de coffrets et maintenant de mélanges d’épices, le tout sans aucun achat média. Avec 70 salariés, elle est en croissance constante depuis ses débuts, malgré une activité à l’arrêt lors du premier confinement (impossible de tourner en télétravail).

Le plus. Début 2021, le groupe Tefal a pris une participation minoritaire via sa société d’investissement Seb Alliance, qui va se traduire par une gamme de produits sous licence à l’international, Chefclub by Tefal.

 

Bergamotte, les fleurs du bien

L’idée. Venu du tourisme, Romain Raffard a changé d’activité après les attentats de 2015. Il s’est intéressé à l’horticulture, avec l’envie de proposer autre chose que les bouquets ronds et serrés traditionnels. Design soigné, renouvellement des collections tous les deux mois, livraison impeccable, la DNVB de la fleur était née, même si le cofondateur récuse ce terme. « Cela plaît surtout aux investisseurs. Je préfère parler de marque verticale ou intégrée », justifie-t-il.

La suite. « Nous avons eu la chance d’arriver au moment où Instagram commençait à exploser, cela nous a permis d’acquérir une communauté très rapidement. Mais la plateforme représente une part très faible de nos ventes, qui se font directement sur le site internet, grâce à la notoriété et au bouche-à-oreille », poursuit Romain Raffard. Les différents confinements ont été propices à l’achat de fleurs en ligne, mais la société souhaite désormais se développer dans les plantes, au fort potentiel de croissance.

Le plus. Pour le commerce physique, Bergamotte privilégie les pop-up stores. Malgré le Covid, il en a ouvert 65 en Europe en 2020. « C’est le modèle du retail de demain, sans les contraintes d’une boutique permanente. On l’envisage comme un véritable business, pas comme une opération de communication. »

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