Data
Alors que les cookies tiers sont en voie de disparition, les données de paiement attirent l'œil. Tout l'écosystème se structure pour les faire fructifier et accéder à une connaissance client inégalable.

Quand il n'y en a plus, il y en a encore. Alors que les données se feront de plus en plus rares sur internet pour le monde du marketing avec la disparition du cookie tiers, les professionnels tentent de trouver d’autres solutions pour connaître leur client et optimiser leurs campagnes. Et un nouveau filon arrive en force: les données de paiement. Kesako? Le détail des entrées et sorties d’un compte courant. Chasse gardée des banques depuis des lustres, elles n’ont jamais été vraiment travaillées en marketing... Et constituent pourtant le Graal de la connaissance client, plus déterministe encore que toutes les données déterministes, reliant un consommateur à un acte d’achat effectif.

«Deux éléments favorisent l’émergence des données de paiement, observe Charles de Gastines, CEO et fondateur de Paylead, une société spécialisée dans le domaine. La loi DSP2, de janvier 2018, qui en exigeant la portabilité des données de paiement a créé aussi tout un cadre légal clair autour de ces données. C'est ainsi dans la sérénité que les professionnels évoluent. En outre, les géants du web commencent de plus en plus à investir dans le secteur du paiement. Tous ont leur Wallet, et les consommateurs payent de plus en plus via leur mobile. Les banques qui possèdent tout cette mine d’informations sont dans l’obligation de les valoriser si elles ne veulent pas voir les Gafa prendre la place.» Et quoi de mieux que de les mettre à la disposition des campagnes marketing ?

Du cash pour le consommateur

Mais contrairement aux cookies des années 2000, les consommateurs ne sont plus dupes : hors de question qu’ils laissent quelqu’un lever le voile de leurs dépenses mensuelles sans contrepartie. À données livrées, monnaie rendue: les consommateurs veulent du cash. Cashback, promotions, offres personnalisées... «Alors qu’avant les Google et Facebook se sont enrichis sur le dos des internautes, il faut remettre le consommateur au centre», estime Julien Mas, fondateur de Gold Circle, une jeune pousse qui se lancera officiellement le 25 avril. Son concept ? Une application qui au-delà des réductions peut offrir une offre de services. «Nous nous voyons comme un coach de consommation», ajoute le jeune entrepreneur. Le client télécharge l’application, s’inscrit et se fixe des objectifs de consommation selon ses domaines: il peut choisir seulement du made in France, des budgets, des objectifs responsables etc. L’application lui présente alors des offres adaptées.

Mais là où elle va plus loin, c’est que le consommateur peut choisir une “marque partenaire” pour devenir premium, avec laquelle il a une affinité et qui, elle, aura accès à ses informations. Il synchronise alors son compte bancaire sur la plateforme – d'où l’importance de la portabilité et de la loi DSP2 – et peut soit se faire créditer ses offres sur son compte, soit reverser à une ONG. Il peut en sus gérer ses cartes de fidélité. «Nous donnons l’opportunité aux marques de se créer une communauté de consommateurs, qu’elle pourra ensuite activer via différent leviers, ajoute Julien Mas. Nous sommes recommandés auprès des marques via un partenariat avec les agences du groupe Dentsu.» Une alliance qui prouve bien que l’on parle de média. Gold Circle a déjà signé avec plusieurs gros acteurs de la grande conso, dans la beauté, notamment.

Un ciblage perfectible 

Pour sa part, Paylead a une tout autre stratégie. Présente sur le marché depuis plus longtemps, elle fait alliance dès le départ avec les banques, et via leur programme de fidélité, permet aux marques de réaliser des campagnes en allant offrir des réductions aux consommateurs. Concrètement, un titulaire d’une carte se voit proposer de participer au programme de fidélité. En partageant ses données, il a accès à des offres. «Le consommateur voit directement qu’il gagne du pouvoir d’achat. Et ce n’est pas rien, 80% de la valeur du payment marketing est en moyenne renvoyée aux consommateurs. Cela crée une différence majeure dans la perception d’utilisation du service», argumente Charles de Gastines. Paylead, qui revendique être la première à avoir répandu le terme de payment marketing, gère à ce jour 1 million de cartes bancaires, et sept nouveaux programmes sortiront dans les prochaines semaines.

Les enseignes gèrent un budget sur une plateforme dédiée. Une enseigne de grande distribution peut faire croître de 42% sa fréquentation en moyenne par client, avec des réductions de 4%. Les banques, elles, choisissent pour le moment de reverser la totalité de leur gain au client. Mais elles y gagnent sur l’utilisation de leur carte, à chaque fois, c’est une nouvelle commission. Pour certains types de carte, cela peut aller jusqu’à 14% de croissance. Si pour le moment, les données d’achats ne sont pas assez granulaires pour entrer dans le détail des produits, et ne concernent qu’un panier global, une loi est en train de germer pour que les tickets de caisses détaillés remontent directement (cela va de pair avec la dématérialisation de l’acte d’achat). Ce qui ouvrira la porte à de nouvelles données, directement associées aux marques cette fois-ci. C’est peut-être sur ce terrain qu’aura lieu la prochaine bataille du marketing.

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