Tribune
En s'associant à des athlètes qui font vibrer les Français ou à des sports pour certains en transition, les marques travaillent non seulement leur branding, mais aussi leur communication interne voire même leur image en matière de RSE ou d'innovation. Une stratégie gagnante.

Alors que L’Equipe a consacré ses plus belles unes de l’été aux exploits des athlètes français à Tokyo, les témoignages d’admiration ont abondé de partout. On a salué les larmes de Clarisse Agbegnenou. Dans ce dépassement de soi, on a vu l’emblème de la résilience dont le monde a besoin. Dans ses gestes fairplay envers sa rivale, un rêve d’inclusion et un modèle de victoire collective.

Le Comité national olympique et sportif français ne s’y est pas trompé en la faisant porte-drapeau. Ni le gouvernement français, en la choisissant parmi les «109 Marianne» pour incarner le visage de la nation en 2021. Ni le Ministère de la Défense en glorifiant son appartenance à la gendarmerie nationale sous le hashtag #Armeedechampions.

Il n’est pas facile d’activer un partenariat sportif en période de crise sanitaire. La reprise progressive des grands événements sportifs invite à s’interroger sur l’impact réel de ces sponsorings. Le bénéfice est-il à la hauteur des investissements consentis par les marques ? Sous quelles formes est-il perçu ?

Une forme de réciprocité

Le principe de ces partenariats de branding est connu : l’association doit bénéficier aux deux parties et s’enraciner dans un ADN suffisamment commun. Le contrat présuppose une forme de réciprocité : la solidité et l’empreinte mondiale des marques versus l’émotion portée par les athlètes. La réputation et l’éthique des marques versus la notoriété et la rigueur personnelle des sportifs. En contrepartie de leur soutien financier, les marques espèrent que rejaillira sur elles cette proximité unique qui provient d’expériences clients «délocalisées» au stade, en famille devant la télévision, ou entre amis devant un écran géant.

Si les entreprises adressent un message subliminal à leurs propres collaborateurs en soutenant des profils ultra-performants, elles leur permettent surtout de prendre part au rêve des plus grands athlètes en rediffusant à leur attention les exploits des sportifs «soutenus par la maison» - un cadeau aux employés, catalyseur de fierté et levier d’engagement.

A n’en pas douter, le sponsoring sportif crée une communion et une effervescence parmi les collaborateurs qui valent tous les exercices d’intelligence collective. Ce n’est pas nouveau : une large part de la politique d’engagement des collaborateurs repose sur des propositions externes, en partenariat avec des associations, qu’il s’agisse de courir pour lutter contre les violences faites aux femmes ou de pédaler pour faire avancer la recherche sur le cancer.

Un vivier d’égéries de la diversité

En matière de «role models», le sport a cette capacité de générer ferveur collective et engagement individuel. Source d’émulation et d’innovation, rien ne remplace le sport avec ses valeurs connexes au monde de l’entreprise : intégrité, résilience et compétence. Le biais sportif offre ainsi un raccourci idéal pour faire entrer dans l’entreprise des problématiques d’éthique personnelle et collective, de confiance, de gouvernance, de leadership.

Le sport ouvre d’autres portes encore : sa sociologie inclusive et méritocratique en fait un vivier d’égéries de la diversité. Le sponsoring sportif permet aux entreprises d’exercer indirectement leur mission sociétale. Les sportifs le savent et multiplient les engagements personnels : pour l’égalité des chances dans le sport, le handicap, contre le sexisme et le harcèlement, pour la non-discrimination. Michaël Jeremiasz, ancien numéro un mondial de tennis en fauteuil, a co-fondé et préside Comme Les Autres, une association d'aide à la reconstruction suite à un accident de la vie. Clarisse Agbegnenou soutient une association de prématurés, SOS Prémas, en écho à sa propre histoire et est marraine l’opération «Sport féminin», qui milite pour une meilleure exposition médiatique des sports féminins et la réduction des écarts salariaux avec les hommes. Soutenir ces athlètes, pour une grande entreprise, relève à la fois du partenariat d’image et d’une démarche de «giving back».

Enfin, soutenir un sport choisi, pour une marque, c’est bien souvent s’associer à l’innovation technique qui accompagne ses mutations – on pense à la transition de la Formule 1 à la Formule-E pour le sport automobile, un laboratoire bien connu de R&D pour les constructeurs. Le sport émergent que constitue la course de drones est  aussi un bel exemple. Il s'agit là d'autant d’éléments cohérents qui font du sponsoring sportif une sorte de «serious game» où se mêlent rayonnement de marque, RSE et innovation.

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