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Pour mieux coller à ses enjeux stratégiques, la Matmut fait évoluer son identité visuelle avec l’agence FutureBrand et déroule un appel d’offres pas tout à fait comme les autres.

« Quand on pense assurance, on pense sinistres, problèmes, embêtements, drames… » Stéphanie Boutin, directrice générale adjointe du groupe Matmut en charge de la communication et de la RSE, l’admet volontiers. C’est pour soigner l’image de l’assureur tout en renversant cette pensée commune qu’elle a, en 2021, entamé un chantier autour de l’identité visuelle de l’entreprise. Une démarche inscrite dans un projet global. « À l’occasion de nos 60 ans, l’année dernière, nous avons dévoilé notre raison d’être. Tous nos engagements y compris en matière de communication sont revus à l’aune de cette raison d’être », explique la dirigeante.

Le positionnement de la Matmut a largement évolué au fil du temps puisque, au départ assureur voiture, l’entreprise mutualiste se présente désormais comme un groupe complet d’assurance. Il fallait refléter cela aussi. La précédente identité visuelle, notamment le logo, avait une vingtaine d’années. « L’actuelle fragmentation des médias nous oblige à retravailler notre impact graphique », complète Stéphanie Boutin. Sans compter les évolutions du marché de l’assurance, où de nombreuses start-up (la licorne Alan, Luko, Leocare…) ont fait leur apparition.

Un appel d’offres est lancé au dernier trimestre 2021. C’est à cette étape que réside la particularité la plus étonnante du projet. Ici, pas de « long list » d’agences sollicitées pour pitcher sans être défrayées. « Il faut que cela colle avec notre secteur d’activité, l’ESS [économie sociale et solidaire] et de mon côté, je viens du monde des agences. On ne fait pas travailler les gens pour rien… », lance celle qui, avant de passer chez l’annonceur, a notamment été la directrice générale de MKTG (groupe Dentsu Aegis Network). Lors d’une première phase, quatre d’entre elles, W, Pulp, Lonsdale et FutureBrand, sont ainsi invitées non pas à se pencher sur un brief mais à venir présenter « leur équipe, leur méthodologie, leur état d’esprit ». Sur ces quatre, la moitié peut ensuite présenter un projet de manière plus classique.

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Et même alors, ce n’est pas le top management qui départage les deux finalistes, W et FutureBrand. Une vingtaine de collaborateurs représentant les différentes directions de l’entreprise (marketing, immobilier, informatique…) et autant de sociétaires mélangés avec des prospects et aux profils diversifiés (jeunes et moins jeunes, urbains et ruraux, avec une fibre écoresponsable plus ou moins prononcée…) sont inclus dans le processus. Des focus groupe sont organisés.

L’idée était de valider une idée, une direction. « Nous avons accepté de jouer le jeu car dès le début ils ont fait preuve de franchise et de transparence sur la façon dont cela allait se passer », témoigne Jérôme Lhermenier, directeur général de FutureBrand, l’agence spécialisée en stratégie de marque et branding qui a finalement, au mois de mars dernier, séduit l’assureur. « Le tout a rajouté un mois et demi au processus », précise Stéphanie Boutin. C’est la première fois que les deux sociétés collaborent.

Validé plutôt deux fois qu’une en interne, le projet de FutureBrand vise notamment à « reconnecter la marque avec l’époque », selon les termes du brief, synthétisé par Jérôme Lhermenier. Rénovée sur l’ensemble des volets (institutionnel, commercial, marque…), la nouvelle identité visuelle, à travers un logo qui évolue sans rompre non plus avec le précédent, souhaite véhiculer plusieurs valeurs ou messages : l’idée d’un « mutualisme en mouvement », une vision « optimiste et inclusive » du monde – à travers une symbolique du pétale, de l’éclosion, ainsi que des couleurs soigneusement choisies et un côté « vibrant » –, une image de marque « chaleureuse, accessible, ancrée dans la vie des gens ». La forme hexagonale, enfin, marque l’ancrage dans les territoires. « FutureBrand a compris que l’on s’inscrivait dans une pétillance. Ce ton de marque était déjà présent dans les publicités avec Chevallier et Laspalès, marquées par l’humour, montrant la vraie vie des gens. Nous souhaitions retrouver cette pétillance », souligne la DGA communication.

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Le résultat reflète en même temps une volonté de trancher avec les codes des assureurs traditionnels tout en évitant d’emprunter ceux des « assurtech », les nouveaux entrants sur le marché, plus digitalisés. « Pour caricaturer les codes des assureurs traditionnels, l’on note globalement une absence de symbolisme de marque ou au contraire des marques avec beaucoup de symbolisme, comme la Matmut, sur la diversité, l’inclusivité », détaille Jérôme Lhermenier.  « Au début, nous étions une mutuelle pour ceux qui n’en ont pas [hors instituteurs, agents de la fonction publique…], quelque part entre Benetton et McDonald’s, le côté inclusif et le côté ‘‘Venez comme vous êtes’’ », rebondit Stéphanie Boutin. Quoi qu’il en soit, « il existe une troisième voie... », note-t-elle. La Matmut se projette à dix ans avec cette nouvelle identité. Elle souhaite lui laisser le temps d’asseoir son aspect « rassurant, sécurisant » pour le public.

Dévoilée le 19 octobre en interne, la nouvelle identité sera progressivement déployée sur l’ensemble des supports de communication, jusqu’au fronton des 450 agences du territoire. Par ailleurs, elle intègre la dimension RSE, avec « une réduction du taux d’encrage jusqu’à 30% et des niveaux de contraste élevés sur le digital pour favoriser l’accessibilité », relève Jérôme Lhermenier. Si le montant global du projet n’est pas communiqué, l’investissement consenti n’est « pas neutre », lâche simplement la Matmut, et sera étalé sur trois exercices.

L’étape d’après ? « Nous voulons faire évoluer notre plateforme publicitaire », indique Stéphanie Boutin. Suite à un appel d’offres d’environ six mois qui se clôture en ce mois d’octobre, c’est Saatchi & Saatchi qui sera chargée d’accompagner la Matmut sur ce volet, avec une sortie de campagne annoncée pour mars prochain. Après « La Matmut, elle assure », et « Matmut, ma valeur sûre », l’agence devra trouver la prochaine signature de la marque. Loin, sans nul doute, de toute idée de sinistre et de drame.

Chiffres clés

6500

Nombre de collaborateurs de la Matmut.

2,4 milliards d’euros

Chiffre d’affaires 2021.

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