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Depuis son redressement judiciaire, le spécialiste de la maille Phildar (société PP Yarns & Co) retrouve ses lettres de noblesse. Son retour en télé confirme sa santé financière et ses ambitions en 2023, notamment celle d’installer son nouveau nom commercial, HappyWhool.

La pelote semble enfin se dénouer pour la marque historique Phildar. En juillet 2020, la société, jusque-là détenue par l’association familiale Mulliez, était en redressement judiciaire. PP Yarns & Co (Phildar Pingouin et Yarns), société créée pour l’occasion par Éric Vandendriessche, l’actuel directeur général de Phildar, et le président Pierre-Jean Cauyela, feront une proposition qui sera retenue en octobre 2020 par le tribunal de Lille de conserver 86 salariés sur un effectif de 209 et 15 magasins sur les 115, en plus d’investir huit millions d’euros. La direction annonçait également abandonner le segment du prêt-à-porter pour se concentrer uniquement sur le fil à tricoter et la laine.

En avril 2021 est survenu un événement inattendu : la pandémie de Covid-19. Confinement oblige, les foyers ont dû chercher des occupations pour passer le temps. Une aubaine pour la marque puisque de nouveaux adeptes se sont mis au tricot, notamment les jeunes, en lien avec la tendance du DIY (do it yourself). « On a très bien fonctionné pendant le covid, les gens avaient du temps et le besoin de trouver du sens à leur temps libre. Durant cette phase de recrutement, 19% de nos clients étaient des hommes », indique la directrice digitale et marketing de PP Yarns & Co, Chrysoline Deprez. Même si le covid a été clément pour Phildar – qui boucle l’année avec 30 millions d’euros de chiffre d’affaires –,  l’équipe n’a pas chômé. « Après notre rachat en 2020, nous sommes devenus une start-up de 100 personnes, très loin du Phildar d’avant. Nous nous sommes attelés à reconstruire la marque autour de quatre piliers majeurs : se recentrer sur le fil à tricoter, devenir une web company omnicanale, travailler en mode collaboratif et devenir une marque engagée avec une politique RSE. Nous préférions attendre avant de revenir sur le devant de la scène, les investissements médias n’étant pas donnés non plus », ajoute Chrysoline Deprez.

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Après trente ans d’absence, Phildar revient donc en télé. À la suite d’un appel d’offres opposant trois agences, l'enseigne de fils confie son retour au studio de création indépendant lillois Csuzon qui remporte la mise alors qu’il n’est arrivé qu’au second tour de la compétition. « Nous avions peu de temps pour répondre au brief et peu de temps pour le mettre en place. L’appel d’offres se terminait vers la fin de l’été quand tout le monde présageait déjà un hiver rude en concomitance avec l’augmentation des coûts de l’énergie, raconte la productrice et gérante de la société de production, Suzon Courchelle. Le tricot, en plus d’être un plaisir, allait devenir utile. » À l’origine, le studio voulait tourner un long film au ton décalé pour marquer le coup : « Nous sommes partis sur une scénarisation avec plusieurs personnages mais nous n’avions que quinze secondes, il a fallu se recentrer sur un seul personnage, d’où l’idée du bain de laine. Nous voulions quelque chose qui fasse du bien avec une lumière très chaude qui donne envie de s’emmitoufler », poursuit la productrice. Avec un petit clin d’œil à l’injonction passive agressive des politiques en cols roulés dans la signature « Phildar, source naturelle de chaleur ».

Contre toute attente, dans cette campagne de quinze secondes, très belle au demeurant, pas de grande annonce. Juste une piqûre de rappel de leur existence sur le marché. « Ce retour en télé était la première étape de notre plan de communication. Nous souhaitions réaffirmer notre notoriété pour préparer le terrain avant d’en dévoiler plus », explique la directrice marketing. En effet, à partir du 19 janvier, la société PP Yarns & Co, qui rassemble les marques de tricots Phildar et Pingouin, prévoit de changer son nom commercial pour devenir HappyWhool. Un choix étonnant voire détonnant pour une marque patrimoniale française. Mais la marque historique balaie les doutes d’un revers de la main. « Il fallait redonner un coup de force à la marque et moderniser son image, montrer que le tricot n’est pas qu’une activité de grand-mère », poursuit Chrysoline Deprez. Rappelons tout de même que la marque est avant tout achetée à 97% par des femmes, dont la moyenne d’âge est entre 50 et 55 ans.

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Avec cet anglicisme, la « laine heureuse » espère toucher de nouvelles parts de marché en Europe, en plus d’une clientèle plus jeune. À Toulouse, la société avait déjà commencé cette transition en installant une boutique rassemblant des produits en lien avec la laine où certains de ses concurrents comme l’enseigne Anny Blatt ont accepté d’être vendus sous le concept de HappyWhool. Résultat, la moyenne d’âge s’est déportée vers les 35 ans. « C’est le résultat d’un nouveau nom. Phildar sonnait comme quelque chose d’ancien, c’est l’héritage d’une marque centenaire, ça pose forcément un cadre. Avec ce nouveau nom, nous voulons bouger les lignes, gagner une nouvelle clientèle sans perdre l’ancienne, c’est un véritable travail d’équilibriste », rappelle la directrice marketing.

En plus d’avoir retravaillé avec l’agence Register ses logos, son site e-commerce et le stylisme de ses modèles, l’enseigne a recruté quinze nouvelles collaboratrices, âgées entre 25 et 30 ans. Si elles ne sont pas les bâtons de vieillesse de l’entreprise, elles aident au développement de la stratégie sur les réseaux sociaux. Sur Facebook et Instagram, Phildar s’est déjà essayé au live shopping. Sur TikTok, avec leur marque de laine Pingouin, les community managers suivent les tendances en lien avec la laine et le crochet et ont d’ailleurs réalisé une collaboration avec le tiktokeur @Edoucrochet pour la réalisation d’amigurumi, des peluches d’animaux crochetés très « kawaii ». Même si la majorité de leurs ventes s’effectuent via leurs distributeurs (Zodio, Mondial Tissus…) et les merceries indépendantes (1000), 40% d'entre elles sont réalisées sur leur site internet et 15% au sein de leurs treize derniers points de vente. L’enseigne ne dit pas quand elle reviendra pour se présenter sous son nouveau jour mais elle affirme qu’une enveloppe est prévue pour réaliser d’autres communications. Avec la volonté de perdurer en continuant de développer les arts du fil.

Chiffres clés 

30 millions Chiffre d’affaires en 2021.

100 Nombre de salariés.

13 Nombre de points de vente.

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