Consommation

Lancé il y a un an par Yuka et un collectif de neuf acteurs, l’Eco-score veut sensibiliser les consommateurs à l’impact environnemental. Une année après le lancement de son expérimentation, Julie Chapon, co-fondatrice de Yuka, dresse le bilan pour Stratégies.

Pourquoi intégrer l’Eco-score dans l’application Yuka ?

Nous avions énormément de demandes sur le sujet. Aujourd’hui, la production alimentaire mondiale représente 28% des émissions de gaz à effet de serre, 70% de la consommation d’eau et 60% de la déforestation dans le monde. Si demain, on peut avoir un impact sur la dimension environnementale, ce serait une réussite pour l’Eco-score. Cet indicateur évalue l’impact environnemental en classant les produits en 5 catégories (de A à E). Il prend en compte l’ensemble des éléments qui peuvent avoir une conséquence sur l’environnement (production agricole, transformation du produit, emballage). Pour calculer ce score, on s’appuie en grande partie sur la base de données Agribalyse publiée par l’Ademe. C’est le fruit de travaux menés depuis 11 ans par des centaines de scientifiques. Ils proposent l’Analyse du Cycle de Vie (ACV) de 2 500 catégories de produits alimentaires. En plus de cette base de données, plusieurs critères, mal pris en compte par Agribalyse, viennent s’ajouter au calcul (impact sur la biodiversité, label, recyclabilité).

Quel est l’objectif attendu ?

Avec cet Eco-score, il y a un double projet. Le premier objectif est de permettre aux consommateurs de s’orienter vers une alimentation plus durable en les informant mieux. Le second objectif est d’inciter les industriels à améliorer l’empreinte environnementale de leurs produits. C’est un objectif à double niveau donc : à la fois auprès des comportements d’achat mais aussi, et surtout, auprès des industriels car on estime que c’est de leur responsabilité de réduire l’empreinte carbone de leurs produits. Nous souhaitons vraiment avoir le même résultat qu’au niveau de l’impact sur la santé. Les industries changent aujourd’hui certains ingrédients de leurs produits pour réduire les conséquences sur la santé. Et bien, nous voulons reproduire cela avec l’environnement cette fois-ci.

Est-ce que l’Eco-score peut ramener les industries vers un marché plus local ?

Aujourd’hui, il y a une très forte demande des consommateurs pour une consommation plus locale. Le producteur doit adapter son offre à la demande. Si la tendance évolue vers des produits plus locaux, il doit aller dans le sens de cette demande. De notre côté, on le ressent déjà. Il est encore un peu tôt pour dire s'il a eu un impact sur les industriels, mais on remarque quelques changements. Indiquer l’origine des ingrédients n’est pas obligatoire et pourtant, depuis l’Eco-score, les industriels nous envoient de plus en plus l’information d’eux-mêmes. Une plus grande transparence se fait déjà ressentir.

Le covid a-t-il favorisé cette tendance ?

De manière générale, le covid a effectivement modifié notre façon de consommer. Durant le confinement, beaucoup d’entre-nous ont remis en question notre alimentation traditionnelle. La demande des consommateurs est exigeante aujourd’hui : ils veulent savoir ce que l’on met dans l’assiette et quel est l'impact que le produit peut avoir sur la santé. Donc oui, la crise sanitaire a aussi joué un rôle dans notre manière de consommer et de produire.

Quel bilan pouvez-vous faire de cette expérience de l'Eco-score, un an après son lancement ?

Aujourd’hui, deux consommateurs sur trois (67%) déclarent avoir déjà renoncé à un achat à cause d’un Eco-score défavorable. Cela montre le potentiel d’impact qu’il peut y avoir. Neuf consommateurs sur dix précisent que l’empreinte carbone du produit est un facteur important dans leur décision d’achat. Malgré tout, ce qui reste le plus conséquent dans la réduction de l’impact environnemental, c’est évidemment de réduire la consommation de viande. Aujourd’hui, 15% des personnes sondées déclarent que l’Eco-score les a aidées dans cette réduction. Selon nos informations, en prenant en compte ces 15%, l’Eco-score permettrait une atténuation d’émission de gaz à effet de serre dans le secteur alimentaire de 6,3%. Ce n’est pas rien. Même si l’Eco-score est récent, il a un niveau de notoriété assez fort. Le bilan auprès des distributeurs qui l’ont adopté est aussi très positif, notamment Carrefour, qui était parmi les premiers à adopter l’Eco-score et qui l’affiche directement sur son site. Lorsque vous faites vos courses en ligne dans cette enseigne, vous pouvez constater que la majorité des produits présentent l’Eco-score. Se dire que les distributeurs prennent cette responsabilité de l’afficher, c’est une belle avancée.

Comment voyez-vous évoluer l’Eco-score par la suite ?

L’évolution que nous attendons le plus pour l’Eco-score, c’est qu’il soit tout simplement rendu obligatoire, que le consommateur puisse accéder à celui-ci directement sur l’emballage, sans devoir passer par l’application ou en scannant le produit. Aujourd’hui, 92% des personnes sondées considèrent qu’un indicateur environnemental comme l’Eco-score peut devenir obligatoire sur tous les produits alimentaires. Il y a une vraie attente du consommateur d’avoir quelque chose pour l’aiguiller. Si la personne n’a pas besoin de passer par Yuka pour connaître l’Eco-score, c’est encore mieux pour nous. L’objectif n’est pas que tout le monde utilise Yuka mais bien d’améliorer le monde dans lequel on vit. La vraie attente de l’Eco-score est de le rendre obligatoire sur l’ensemble des produits alimentaires et de le dupliquer dans plusieurs pays, un peu comme le Nutri-Score, qui n’est pas obligatoire mais qui est affiché de plus en plus.

L'Eco-score a été créé par La Fourche, Yuka, Marmiton, Etiquettable, Eco2 initiative, Open Food Facts, ScanUp, Foodchéri, Seazon et Frigo Magic.

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