Justice

Le parquet de Dax a requis la relaxe lundi 20 juin dans le procès de la société Herta, poursuivie devant le tribunal correctionnel pour homicide involontaire après la mort en 2014 de Lilian, un garçon de presque trois ans étouffé avec un bout de saucisse. La décision est attendue pour le 11 juillet.

Les vérifications menées au cours de l’enquête « n’ont pas permis de mettre en exergue des éléments suffisants » pour condamner Herta, a expliqué la vice-procureure Aude Le Hérissier, lundi 20 juin. Le ministère public, qui a réclamé la relaxe comme à la précédente audience en janvier 2021, a estimé qu’un « doute subsistait sur la marque de saucisse ingérée par Lilian », faute de preuve d’achat.

Le groupe Herta, dont le PDG Marc Auclair était absent au tribunal, est poursuivi pour « homicide involontaire par violation manifestement délibérée d’une obligation de sécurité ou de prudence » après la mort par étouffement du jeune Lilian, lors de vacances d’été avec ses parents, Florence et Vincent Lerbey.

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Lilian, âgé de 2 ans et 11 mois, est mort le 11 août 2014 dans un camping de Messanges, sur la côte landaise, où cette famille bordelaise séjournait. Ce jour-là, au menu : des haricots verts et des saucisses industrielles que la maman avait découpées en fines rondelles, des Knacki selon elle. Mais après quelques bouchées, Lilian s’était étouffé, victime d’une « fausse route » et n’avait pas pu être réanimé par les secours malgré l’intervention immédiate d’une amie infirmière anesthésiste et plusieurs manœuvres : méthode de Heimlich, tapes dans le dos, suspension de l’enfant par les pieds… Un morceau de trois millimètres de diamètre avait ensuite été retiré de la gorge de l’enfant décédé au moyen d’une pince spéciale apportée par les secours.

Les parents de Lilian avaient porté plainte en 2017 contre Herta, demandant l’euro symbolique pour éviter que le drame ne se reproduise. À l’époque, un message apposé au dos des paquets de Knacki par Herta recommandait de couper les saucisses en « tout petits morceaux » pour « les plus jeunes ». Depuis 2015, à la demande de la famille Lerbey, une nouvelle mention est présente sur l’emballage : « pour les enfants de moins de 4 ans, couper la saucisse dans le sens de la longueur puis en tout petits morceaux afin de prévenir les risques d’étouffement ».

« Le message [d’avant 2015, ndlr.] n’était pas suffisamment clair, explicite sur les dangers d’étouffement d’un enfant de moins de 4 ans », a souligné l’avocat de la famille Me Philippe Courtois. Selon lui, « toutes les publicités Herta depuis les années 1980 mettent en scène des enfants » et « aucune » ne montre des saucisses coupées « en petits morceaux ».

Un cas isolé, affirme Herta

À l’audience, la défense de Herta a fait valoir que Lilian aurait très bien pu ingérer une saucisse d’une autre marque. « On parle de Knacki pour tout type de saucisses », a relevé Me Julien Vernet, l’avocat du groupe Herta. Mais pour la famille, « c’était bien une saucisse Herta, il n’y a pas d’ambiguïté ». « Maintenant pénalement que Herta ne puisse être considéré responsable de la mort de notre fils parce qu’on n’a pas le ticket de caisse, on l’acceptera », a réagi à l’issue de l’audience le père, Vincent Lerbey.

Lors de la première audience de 2021, le tribunal avait ordonné une expertise pour mesurer la caractère spongieux (susceptible de gonfler une fois avalé) et collant des Knacki. Selon l’expertise lue à l’audience, si « un morceau découpé en dés de 1 à 2 mm ne représente pas de danger dans les voies aériennes » des enfants, la dangerosité du produit en général n’a pas pu être ni confirmée ni écartée en raison d' « impossibilités techniques » pour la mesurer.

Pour la mère de Lilian, Florence Lerbey, de telles dimensions « ne sont jamais inscrites » sur les paquets car elles reviendraient à découper « une Knacki en 500 petits morceaux ». « Personne ne fait cela », pas même « la cantine l’école maternelle » où devait être inscrit Lilian deux semaines après le drame, s’est encore indigné cette enseignante, assurant que quatre enfants dont son fils sont morts étouffés par des saucisses Herta depuis 1993. Des cas et une dangerosité que refute Me Vernet, l’avocat la défense en affirmant que, excepté Lilian, il « n’y eu aucun cas d’étouffements » sur les 2 millions de saucisses produites quotidiennement par l’entreprise.

La recommandation présente sur les paquets en 2014 « a été soumise à la DGCCRF, qui est plutôt connue pour aller dans le sens de la protection des consommateurs », a encore plaidé Me Vernet.

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