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Le nouvel eldorado des publicitaires
17/05/2002Ces derniers mois, le secteur du luxe a suscité des vocations dans l'univers de la publicité. Plusieurs enseignes indépendantes ou liées à des groupes ont vu le jour.
C'est une véritable poussée de fièvre que connaît le petit monde de la publicité. La cause de cette agitation ? Le luxe, nouvel eldorado aux yeux des publicitaires. Créations de petites structures indépendantes, ouvertures de départements au sein des grands groupes: les initiatives sont suffisamment nombreuses et concomitantes pour qu'on puisse parler d'une tendance. Talents Aiguille, Vox Populi, Frierson Mee and Partners, Devarrieuxvillaret (Havas Advertising) et J. Walter Thompson (WPP), autant d'enseignes qui, depuis quelques mois, tentent ou poursuivent une incursion sur un secteur jusqu'alors relativement fermé, sous le regard curieux et parfois amusé de quelques précurseurs déjà bien implantés sur le secteur.
Relancé par « le pape du luxe »
Qui a ouvert le bal ? Difficile de le dire. En tout cas, la danse, qui prend ici des allures de farandole, semble avoir été relancée par un directeur artistique, Maurice Betite, qui, au sein de Devarrieuxvillaret, vient de créer son agence, By (lire l'entretien ci-contre). À l'évocation du sujet, son nom est sur toutes les lèvres. Auteur des campagnes Vuitton chez Euro RSCG Works, le « pape du luxe », comme ses confrères le surnomment parfois, prend acte d'une véritable ouverture d'un marché qui pourrait se révéler fort rentable. Mais l'expérience et le talent de cet homme qui, à cinquante-deux ans, se considère comme un dinosaure de la profession, ne sont pas forcément les clés du succès.
« Il y a de la place pour tout le monde », affirme Tho Van Tran, directeur d'Air, agence créée en 1998 sur ce créneau et qui travaille, entre autres, pour Dior et Cacharel.« L'univers du luxe a beaucoup évolué,poursuit-il.Aujourd'hui, cela pourrait être avant tout un moment très agréable que l'on s'offre. »Définition pour le moins vaste...« Aujourd'hui, c'est tout ce qui est glamour », résume Françoise Engerville, directrice associée des Ateliers ABC, l'une des agences pionnières en la matière avec des clients comme Cartier, Piaget ou Baume et Mercier.« Il y a dix ans, le luxe était encore un secteur confidentiel,analyse la publicitaire.Mais ses frontières ont explosé avec le boom des grands groupes capitalistiques qui ont multiplié les rachats et les regroupements. Les agences ne peuvent pas ne pas avoir envie de se développer sur ce marché. »
Si TBWA\Paris y a beaucoup réfléchi, sans passer à l'acte pour le moment, J. Walter Thompson a d'ores et déjà sauté le pas. Le groupe présidé par Guy Chauvel a confié à Seï Sekigushi, cinquante-trois ans, ancien directeur de création notamment chez Publicis Conseil, le soin de lancer une entité, baptisée Open et destinée à travailler sur le luxe. Un domaine dans lequel J. Walter Thompson n'a, avec un portefeuille de budgets constitué quasi exclusivement de marques de grande consommation, aucune expérience.« Peu importe,répond Seï Sekigushi.Nous sommes complémentaires. À nous de faire comprendre aux annonceurs ayant développé leur image sans passer par des agences de publicité qu'ils ont quelque chose à gagner à collaborer avec des publicitaires. »Même configuration pour Devarrieuxvillaret qui« n'a jamais géré de budgets du luxe », explique son coprésident Benoît Devarrieux, car« il faut du temps pour cela, beaucoup de temps. »
Le poids des grands groupes
Ce travail, une agence comme Mafia le réalise depuis des années. Sa présidente, Marie Chauveau, considère avec amusement les démarches de ses confrères.« C'est très astucieux de communiquer sur ces petites entités, présentées comme la cerise sur le gâteau, lancées sur le seul nom d'un créatif connu, à un moment où l'on doute de la créativité des grands groupes,analyse-t-elle.Mais il ne faut pas être dupe, on n'est pas indépendant lorsque l'on est adossé à un grand groupe. Le poids de ce dernier se fait forcément sentir à un moment ou un autre. »
Un poids dont n'auront pas à pâtir les nouvelles agences indépendantes Talents Aiguille, Frierson Mee and Partners ou Vox Populi. Pour cette dernière, dirigée par Laurence Perez, une ancienne directrice artistique associée de Publicis EtNous, travailler dans le luxe, c'est avant tout oeuvrer dans le secret. Pour le moment, cette agence créée il y a quatre mois se refuse à toute communication. Jusqu'aux premiers gains de budgets. Il sera toujours temps d'expliquer notamment le choix du nom de l'agence, voulu comme un symbole de la démocratisation du luxe.
Hot-shops en bonne place
Patricia Rigaud, fondatrice de Frierson Mee and Partners, est plus loquace.« J'ai ouvert, il y a deux ans, l'antenne parisienne de l'agence new-yorkaise dans le but de travailler pour des marques à forte valeur ajoutée,raconte cette ancienne de Select, autre enseigne spécialisée dans le luxe.Parallèlement aux entreprises qui deviennent mondiales, énormes, les annonceurs du luxe cherchent de la réactivité, de la souplesse, ce que seules les petites structures peuvent offrir. En cela, ils montrent une vraie maturité que les annonceurs d'autres secteurs n'ont pas. Ils n'ont pas besoin de se rassurer avec des noms. »Martine Guénégant, ancienne directrice générale de Résonnances&Cie et cofondatrice de Talents Aiguille, renchérit :« Dans les grandes agences, c'est souvent sur le nom d'un grand directeur de création que se crée un nouveau pôle. Mais cela ne garantit pas d'avoir du sur-mesure. »Tous les espoirs sont donc permis à ces hot-shops, souvent composées de moins de dix personnes, qui entendent bien tailler des croupières à leurs aînées.