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E.Leclerc sur le gril
10/11/2005Face à l'affaire des steaks hachés contaminés, E.Leclerc a fait un parcours sans faute, aidé par une marque pare-feu : Chantegrill. Effet paravent garanti... Mais jusqu'à quand ?
Près de 95 % des consommateurs contactés en quelques jours grâce, notamment, à la carte de fidélité... E.Leclerc et son agence-conseil I&E Consultants ont fait preuve de rapidité et d'efficacité pour gérer la crise alimentaire survenue jeudi 27 octobre, suite à la découverte de steaks hachés contaminés ayant provoqué l'intoxication de plus d'une vingtaine de consommateurs. Yves Jeambu-Merlin, responsable de la communication de crise chez Euro RSCG C&O, va même jusqu'à évoquer une communication adulte qui tranche avec les anciens réflexes des distributeurs. « E.Leclerc n'a pas rejeté la faute sur son fournisseur ni nié tout problème comme en 1993 lorsque des rillettes de la marque Tradilège, distribuées exclusivement dans ses magasins, avaient généré une vague de listériose », rappelle-t-il.
Fusible
Jean-Christophe Alquier, directeur général d'Harrison&Wolf, pose pourtant la question de la responsabilité du distributeur. E.Leclerc aurait-il agi de la même façon si la marque de steaks hachés Chantegrill, dite « marque repère », fabriquée pour son compte par Soviba, ne lui avait pas appartenu ? Selon lui, cette crise souligne l'ambiguïté d'une marque d'enseigne aujourd'hui. « Les distributeurs sont devenus acteurs de l'industrie agroalimentaire sans avoir ni le savoir-faire, ni les moyens, ni l'expertise de ceux dont c'est le métier », analyse-t-il. Ce qui, dans le cas présent, offre bien des avantages à E.Leclerc. Et d'ajouter : « Soviba, dont la communication doit certainement être coordonnée par E. Leclerc, son employeur, lui sert de fusible. L'enseigne ne tient pas en effet le discours d'un fabricant, elle ne s'exprime pas sur les procédures qualité, ni sur le cahier des charges qu'elle a pourtant elle-même défini. E.Leclerc est ainsi protégé de tous les aspects négatifs attachés au produit. Quant à la marque Chantegrill, sa mort certaine aura peu d'impact puisqu'elle n'a jamais eu beaucoup d'épaisseur. Il suffira à E.Leclerc de commercialiser des steaks sous un autre nom. » Jean-Christophe Alquier est par ailleurs persuadé que la crise n'est pas finie. Passé le temps de l'action et de l'urgence médicale, les plaintes des consommateurs, poussés par des avocats, ne sauraient tarder.
En attendant, toute la filière viande garde les yeux rivés sur les chiffres de vente des steaks hachés, voire des produits surgelés. La sanction du consommateur risque en effet d'être rude dans les jours qui viennent. Les professionnels déconseillent pourtant aux concurrents de sortir du bois pour vanter leur procédure qualité. « Le risque zéro n'existe pour personne. Mieux vaut faire preuve d'humilité », conseille Téa Pesloüan, responsable du département crise de Burson-Marsteller. À terme, cependant, une prise de parole collective, au nom de la profession, sera certainement inévitable. Pour montrer que toutes les mesures sont ou ont été prises et que le risque est bel et bien réduit au minimum.