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La campagne présidentielle passera aussi par Internet
18/05/2006 - par Alexandre DeboutéÀ moins d'un an de l'élection présidentielle, les partis politiques multiplient les initiatives sur le Web. Le cadre juridique de leur action devrait être fixé avant l'été.
En matière de communication, l'élection présidentielle de 2002 n'était pas allée bien loin. Celle de 2007 s'annonce plus relevée. Comme aux États-Unis, lors de la dernière présidentielle, la France devrait assister, dans les mois qui viennent, à la première véritable bataille politique sur Internet. Courriels, bannières, sites, blogs, webfilms, podcasts... toutes les techniques vont être exploitées pour occuper l'espace public « virtuel ». Dernier épisode en date, la mise en ligne sur le site du PS d'un webfilm inaugural dont la facture ne laisse aucun doute sur l'intention. On y voit la couverture d'un Code du travail littéralement « lessivée » au Karcher...
« Cela ennuie beaucoup les socialistes, mais l'UMP a pris une fieffée longueur d'avance sur Internet », constate Yves Jégo, secrétaire national de l'UMP en charge des nouveaux adhérents. Ce député proche de Sarkozy, blogueur depuis février 1995, avait réagi en septembre à la polémique soulevée par le PS sur l'utilisation de courriels par l'UMP. Il avait alors demandé solennellement au PS de s'engager à ne jamais y avoir recours d'ici à 2007. « Après nous avoir copieusement critiqués, ils s'apprêtent à faire la même chose. La vérité, c'est que nous avons défriché un nouveau terrain pour faire de la communication politique. »
Internet, l'UMP s'y est mis tôt. Dès son élection à la tête du parti en novembre 2004, Nicolas Sarkozy s'est empressé de trouver une agence pour sa stratégie en ligne. Lancé début 2005, l'appel d'offres a été remporté par L'Enchanteur des nouveaux médias, une agence fondée en 1999 par Arnaud Dassier et Bruno Walther (ce dernier est parti depuis chez FCB), à l'origine des actions en ligne du parti, et notamment de ses envois massifs de courriels. Depuis septembre 2005, L'Enchanteur a orchestré six vagues pour l'UMP, de 200 000 à 300 000 envois, sauf une de 2 millions, soit au moins trois millions de courriels au total. Mais l'UMP va plus loin, en utilisant le référencement et l'achat de mots-clés. Quinze mille euros seraient dépensés chaque mois pour mettre en avant le site. Pour ses campagnes de liens sponsorisés, 800 mots tournent en permanence sur Google. Parmi ceux-là, des noms génériques comme « Sarkozy » ou « éducation », mais aussi des mots plus opportunistes comme « banlieues » ou « CPE ». Ce dernier aurait généré 100 000 visites sur le site en mars. Une technique qui irrite le PS, surtout quand elle utilise des noms de personnalités de gauche qui renvoient sur le site de l'UMP.
Pourtant, les techniques utilisées par l'UMP sont en voie de l'être par le PS. Alors que Ségolène Royal mise sur le Web contributif avec son blog et que Jack Lang fait une campagne d'adhésion au PS via son propre site, le parti de François Hollande a entériné le principe d'un programme de recrutement via Internet et la centralisation des bases de données est en cours. Et si le PS s'interdit d'utiliser des noms issus de partis adverses, il se dit favorable à l'usage de mots-clés liés à l'actualité. Les socialistes ont aussi conscience qu'il faut s'appuyer sur des réseaux virtuels pour investir Internet. « Nous sommes en train de constituer un réseau d'activistes du Web », confirme Julien Bézille, chef de projet Internet au PS.
Les sites, premiers recruteurs
Le Web a prouvé son efficacité. Les sites des partis sont devenus le premier canal de recrutement des militants : 120 000 personnes auraient ainsi rejoint les rangs de l'UMP depuis septembre, selon ce parti. Celui-ci et le PS en revendiquent chacun un millier par jour. Quant au site du PS, qui aurait coûté 12 000 euros, il aurait déjà rapporté 580 000 euros de cotisations. Chacun devrait par ailleurs prochainement lancer son site de don en ligne. La guerre en ligne aura donc bien lieu, même si certaines lacunes subsistent. Notamment la question des fichiers et de leur utilisation. Avant l'été, la Cnil (Commission nationale de l'informatique et des libertés) devrait préciser le cadre législatif des envois de courriels et de l'usage des SMS de prospection, a priori condamnés car ne permettant pas à leurs destinataires de se désabonner. Concernant les tracts en ligne, la Cnil a a recommandé d'appliquer le régime des courriels commerciaux, soit la règle de l'« opt-in ». Mais certains demandent que l'acceptation d'envoi de courriels politiques soit distinguée par une case spécifique.
« Les coups bas, on n'y coupera pas, prévient Stanislas Magniant, directeur conseil chez Publicis Consultants NetIntelligenz. On verra beaucoup de choses, notamment de la vidéo. » Mais ce prévisible déchaînement - banni de la télévision - soulève bien des questions. Pour Frédéric Maillard, animateur du collectif Démocratie et communication, « d'autres instances comme le CSA, le BVP ou le Forum des droits sur l'Internet sont appelées à prendre position. Car au rythme où vont les choses, les campagnes TV seront vite ringardisées par les spots sur Internet. »