MEDIAS. Frédéric Daruty, nouveau directeur exécutif de Prisma Média, en charge des activités digitales, regarde le court et le long terme: il est l'homme des acquisitions du groupe. Amaury de Rochegonde @derochegonde

Ne dites pas à Frédéric Daruty qu'il est le numéro deux de Prisma Média, après le départ de Pierre Riandet et sa nomination au poste de directeur exécutif. Et d'une, il n'est pas seul au comité de direction. Et de deux, cela n'a pas porté chance à Renaud Lepic, lorsqu'il s'est vu à la deuxième place des robinets Binet dans Fais pas ci fais pas ça.

 

Cet ancien proctérien qui a pris goût au digital dès 1998 n'est pas du genre à se précipiter. «A bientôt cinquante ans, je réfléchis avec plus de recul et à plus long terme. Mais quand je suis lancé, je ne lâche jamais», dit-il. Un processus en deux temps: «Je me demande ce que je vais gagner tout de suite, puis ce que je ne vais pas perdre dans la durée», explicite-t-il.

 

Délivrer du cash immédiatement et construire pour le futur, c’est sans doute ce qui a séduit Rolf Heinz, le PDG du groupe de presse magazine, lorsqu’il a fait appel à lui en 2010 après avoir hésité avec un profil d'éditeur. Frédéric Daruty vient alors de fermer AOL France, où il dirigeait 84 personnes.

 

Cyrille Franck, ancien coordinateur éditorial du portail, se souvient de l’annonce faite devant les salariés: «Cela a un peu surpris les gens, surtout à la régie, qui gagnait de l’argent. Les équipes étaient très contentes de lui. C’est quelqu’un qui délègue, qui fait confiance et qui laisse beaucoup d’initiatives aux gens.»

 

A Prisma, l'homme hérite toute de suite d’un périmètre large sur le digital: la régie, les audiences des sites, le développement technologique et mobile mais aussi les acquisitions. Il comprend qu'il ne sera crédible qu’à condition d'engendrer une croissance des revenus de 30 à 35% par an sur le display.

 

«Je regarde beaucoup les chiffres, les audiences, mais aussi le niveau d’engagement, dit-il. A partir du moment où ils sont bons, je laisse faire sur les moyens, le mode de recrutement... J’essaye d’être un chef d’orchestre et de ne pas rentrer dans les sujets propres à chaque activité. Je me demande toujours: est-ce qu’il est meilleur que moi? Plus on a des responsabilités, plus il est difficile d’être au fait de tout.»

 

Partition globale

 

Sa seule crainte: la difficulté de faire le bon choix ou de «ne pas discuter du bon sujet». Un enjeu d’autant plus crucial que lui revient le soin de cibler les start-up à acquérir, comme cela a été le cas avec Ma TV pratique, Hellocoton, Mob Value ou Ad Videum.

 

Pour ces deux dernières, il s'agit d’acheter des compétences tout en laissant agilité et autonomie à des sociétés qui ont pour clients des concurrents. Pour le reste, la partition doit être globale: «Ce qui peut tuer, ce sont les verticalités. Il faut que les gens bossent ensemble, on va plus vite et on profite de toutes les forces du groupe.»

 

Le bureau de Frédéric Daruty est situé entre la régie publicitaire, une équipe collaborative de dix-neuf développeurs et les produits. Ses thématiques-cibles? L'entertainment et l’e-commerce, avec la volonté d’aller plus loin dans la digitalisation des abonnements («On peut le faire pour d’autres éditeurs»).

 

Les rédactions devraient aussi prendre connaissance de son goût pour les chiffres: un test de suivi en temps réel des audiences des articles en ligne est mené avec des outils comme Parseny ou Chart Beat. «Il n’est jamais intrusif dans les contenus, mais il est sensible à la courbe, conclut Cyrille Franck. Avec lui, il faut une bonne synergie. S’il n’y pas de répondant, ça peut être compliqué.»

 

«Je me demande ce que je vais gagner tout de suite, puis ce que je ne vais pas perdre dans la durée»

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.