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Une nouveauté sur Safari 9.0 a provoqué l’inquiétude du monde de la publicité mobile. Le navigateur par défaut de l’Iphone est désormais ouvert aux développeurs qui vont pouvoir créer des extensions bloquant certains contenus... et donc les publicités.

Le paragraphe «Content Blocking Safari Extensions», caché dans les nouvelles fonctionnalités de Safari, n’est pas très bavard. Mais on y lit que cette fonction «permet aux extensions de bloquer les cookies, les images, les ressources, les pop-ups et tout autres contenus, d’une manière rapide et efficace».

Jusqu’à présent, Ad Block et consorts épargnaient l’Iphone. Pour bloquer les publicités, l’utilisateur devait passer par des navigateurs alternatifs de type Ad Block Browser. Le nouveau service devrait être intégré à la version 9 du système IOS, prévue pour septembre-octobre 2015.

C’est un ingénieur de Safari chez Apple, Ricky Mondello, qui a fait remonter à la surface cette information via Twitter en juin, et a soulevé l'inquiétude des observateurs. La publicité étant la base du modèle de nombreux acteurs du numérique, faut-il s'en alarmer? Non, selon Renaud Menerat, président de User Aggents et de la Mobile Marketing Association France, pour qui ce blocage relève du «détail». En effet, il ne concerne que les utilisateurs de Safari sur IOS, soit moins de 5% du marché mobile. Rappelons que le trafic sur mobile provient à 80% des applications et non du navigateur.

Echec des procédures judiciaires

Il n’empêche, les ad blockers sont prisés d'un quart de la population connectée en France, soit 13,4 millions d'utilisateurs, selon Page Fair. Pour les éditeurs, c’est le risque de perdre une audience précieuse. Ils peuvent soit céder à Ad Block Plus, qui demande de payer pour faire figurer son site sur une «liste blanche», soit empêcher l’accès de certains contenus aux détenteurs d’un bloqueur de pubs… mais à leurs risques et périls. «Les bloqueurs de pubs ne sont ni plus ni moins que des pirates, et représentent un vrai danger pour tous les acteurs d'internet», estime Renaud Menerat. Pour l'heure, aucune action en justice n'a porté ses fruits.

Pourquoi Apple participe-t-il à ce jeu des bloqueurs de pubs? «En toile de fond, il y a la guerre avec Google. Actuellement, les deux acteurs sont en négociations sur l’accord qui fait de Google le moteur de recherche par défaut d’Apple, qui arrive à échéance. Google paye très cher pour conserver ce deal. L’enjeu, c’est de se positionner sur le trafic mobile, qui sera majoritaire dans les prochaines années…», explique Renaud Menerat.

Repenser le système

Google est le premier à pâtir de l’engouement pour les bloqueurs de pubs. Selon Page Fair, la perte est estimé à 6,6 milliards de dollars en 2014, soit 10% de son chiffre d'affaires (voir l’étude publiée le 3 juin). Pourtant, pour préserver ses liens sponsorisés, Google fait partie de ceux qui ont choisi de payer Adblock Plus pour être inscrits sur la liste blanche.

Le modèle économique d’Apple n’est pas fondé sur la publicité. Sur Safari, les cookies tiers pour tracer les internautes sont bloqués par défaut. Il s'agit aussi de militer pour une certaine qualité de la publicité sur internet. Son PDG Tim Cook s’est récemment illustré par une diatribe contre les méthodes de certaines start-up de la Silicon Valley, aux publicités toujours plus intrusives. «Peut-être que cette pression va accélérer le développement de formats plus intégrés et du native advertising, plus respectueux du consommateur, et repenser en profondeur un modèle publicitaire en bout de souffle», conclut Renaud Menerat.

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