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Après Le Monde, ce sera au tour du Parisien de fermer sa dernière rotative à Saint-Ouen, début octobre. La fin d'un modèle où il fallait avoir la propriété de son imprimerie.

Le 5 septembre, Le Monde a imprimé le dernier exemplaire fabriqué par ses soins. C'est désormais l'indépendant Riccobono qui imprime le journal pour le Nord et la région parisienne, tandis que La Dépêche du Midi et Midi libre se partagent la moitié Sud. Après des accords signés avec les syndicats fin juillet, ce sont pas moins de 120 ouvriers qui sont licenciés. En perte de 3,6 millions d'euros, Le Monde Imprimerie, qui a compté jusqu'à 340 employés et des clients comme Les Echos ou Le JDD, est désormais fermée. «J'aurais pu diminuer les effectifs en supprimant cinquante postes, explique Louis Dreyfus, le patron du Monde, mais l'évolution des tirages fait que nous sommes en surcapacité de production. Les outils de production sont de plus en plus obsolètes, et il nous aurait fallu investir 18 millions d'euros pour les renouveler en 2020.» Injouable, selon lui, alors même Metronews s'est arrêté et que les imprimeries risquaient de se retrouver toutes déficitaires. «On est en train de sortir du credo selon lequel un journal, pour être indépendant, doit détenir son outil de production, ajoute-t-il. L'identité de la rotative ne change rien à l'indépendance qui se mesure à travers la rédaction et les moyens mis à sa disposition.»

Le plan social s'accompagne de mesures d'accompagnement – on parle d'une vingtaine de millions d'euros –, avec une petite participation de l'Etat. Le Parisien, qui vient de fermer une rotative à Saint-Ouen et fermera la seconde sur son site début octobre, est également concerné. Pour lui, ce sont soixante salariés qui sont touchés, le quotidien ayant désormais vocation à être imprimé à Mitry-Mory sur une imprimerie du groupe Amaury, alors qu'Aujourdhui en France et L'Equipe rejoignent un site de Riccobono, à La Courneuve. «Cela n'aura aucun impact sur les délais de bouclage des trois titres», précise Richard Metzger, directeur général industriel du groupe Amaury.

Roccobono devenu incontournable

Si ces départs seront, là aussi, accompagnés – dans l'enveloppe négociée avec ceux du Monde –, ou donneront lieu à des reclassements, ils attestent tous d'un changement d'époque: «C'est une mutation qu'ont connu le Royaume Uni ou, il y a dix ou vingt ans, les magazines. Selon Wan-Ifra, les commandes en rotatives ont été divisées par sept en dix ans. Chacun se concentre sur les contenus et sous-traite volontiers les fonctions annexes ou techniques, explique Jean-Clément Texier, financier et expert de la presse, les investissement se font de plus en plus sur les technologies ou l'algorithme au détriment de l'imprimerie. Cela va de pair avec un changement de nature des produits.»

 

De fait, seul Ouest France investit encore lourdement dans son imprimerie. En investissant 32 millions d'euros dans deux rotatives allemandes dernier cri en 2014, le groupe de presse de Chantepie, dans la banlieue de Rennes, se prépare à mettre en service sa deuxième rotative, début 2016. Il s'agit d'imprimer plus vite un tiers de ses 780 000 exemplaires de tirage.

 

En région parisienne, Riccobono a pris le contrôle en 2011 de l'imprimerie de Tremblay-en-France, qui fabrique Le Figaro. L'imprimeur se retrouve ainsi en position incontournable. Cela ne lui a pas échappé lorsqu'il a négocié des contrats de sept ans avec Le Monde.

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