Communication extérieure
L’inventeur de l’Abribus publicitaire et des vélos en libre-service, décédé le 27 mai, a bâti en cinquante ans un groupe devenu leader mondial de la communication extérieure.

Il a au moins trois inventions à son actif : l'Abribus financé par la publicité, les Sanisettes et les vélos en libre-service. En cinquante ans, l’autodidacte Jean-Claude Decaux, mort le 27 mai 2016 à 78 ans, a fait de l'entreprise familiale qui porte son nom le leader mondial –hors Amérique du Nord– de la communication extérieure (affichage, mobilier urbain, publicité dans les aéroports et les gares), présent dans 75 pays. En 2013, il avait cédé les rênes de son groupe (3,21 milliards d’euros de chiffre d’affaires) à Jean-Charles et Jean-François, ses fils ainés, rejoints depuis par Jean-Sébastien, le plus jeune. Manuel Valls lui a rendu un hommage appuyé. «Il avait la fibre des grands industriels, innovateurs, conquérants. Il a bâti un groupe, une marque, symboles de la France.» «Sa plus grande réussite est d’avoir transmis à ses enfants sa fibre de bâtisseur», abonde Stéphane Dottelonde, président de l'Union de la publicité extérieure, interrogé par Stratégies.
Colleur d’affiches à 15 ans, Jean-Claude Decaux doit son succès à une idée de génie: proposer gratuitement aux villes des Abribus (le concept et le mot sont alors inventés) qu’il financera par la publicité apposée sur leurs faces. Un principe étendu à tout un mobilier urbain (colonne Morris,  kiosques à fleurs et à journaux, bancs publics, candélabres, etc.) proposé aux municipalités en échange de l’exploitation de l'affichage publicitaire sur leur territoire.

Appels d’offre sur mesure

C'est en 1964 qu'il signe son premier Abribus publicitaire avec Louis Pradel le maire de Lyon, puis Chaban à Bordeaux, Mauroy à Lille, Chirac à Paris… «Comme tous les titulaires de marchés publics, Jean-Claude Decaux a su s’attirer les faveurs des élus, du PCF au RPR, avant que la loi dans les années 90 n’interdise aux entreprises de financer des partis politiques», raconte un professionnel.

La force du système mis en place est ailleurs, et réside dans le fait qu’étant actionnaire de son entreprise, Jean-Claude Decaux peut choisir d’investir massivement, avec un retour sur investissement à plus long terme que ses concurrents, et proposer du coup aux villes un mobilier urbain coûteux mais de belle qualité –signé par de grands designers– moyennant des contrats… de longue durée. Ces concurrents ont pu déplorer des appels d’offre sur mesure notamment à Paris, quand Lille ou Bordeaux cherchent à équilibrer les forces en présence.

«À un certain niveau, seul le détail compte, me disait-il», raconte Jean-François Curtil, PDG de l’afficheur Exterion Média, qui a passé quinze ans au groupe JC Decaux et «salue l’ambition, l’exigence de performance et le talent visionnaire de ce général d’armée». Patron autoritaire –les cadres régionaux connaissaient la règle: perdre une convention de mobilier urbain majeure, c’était perdre son job–, Jean-Claude Decaux était aussi un homme d’affaires apprécié pour sa courtoisie. Après la mise en place de vélos en échange de l’exploitation de panneaux d’affichage, sa dernière idée –non aboutie– pour fidéliser ses marchés était de proposer aux villes de développer des ruches et accompagner ainsi la politique environnementale des élus. Visionnaire? Assurément….

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