Start-up
Le salon Viva Technology, qui ouvrira à Paris du 30 juin au 2 juillet, est le premier consacré à la collaboration entre les grands groupes et les start-up dans une logique d’open innovation. Explications d’Axel Dauchez, son artisan, qui quittera la présidence de Publicis France en juillet.

Peut-on d’ores et déjà dire que Viva Technology sera un succès pour sa première édition?

Axel Dauchez. Nous voulons être l’un des cinq grands salons mondiaux autour de la tech, et le seul consacré à la collaboration entre les entreprises et les start-up. On est en train de concevoir le plus beau rendez-vous jamais créé sur la tech. C’est la première fois qu’on a un enjeu de lisibilité de l’expérience aussi assumé que dans Viva Tech. Réunirons-nous 20 000 ou 35 000 personnes? On le saura sur place. Plus de 15 000 personnes sont déjà inscrites. Et plus de 6 000 start-up l'ont été sur les challenges (voir encadré). On en attend 5 000 sur le salon.

 

Comment les thématiques ont-elles été déterminées ?

A.D. On a travaillé avec EY et McKinsey pour identifier les enjeux clés de transformation digitale, que les entreprises étaient prêtes à ouvrir à l’open innovation. On a sur chaque «lab», cinq à dix challenges qui représentent tous ces enjeux de transformation critiques. PMU, qui a un lab «gaming enrtertainment», s’est, par exemple, beaucoup investi dans Viva Tech. On sent que c’est devenu un projet d’entreprise.

Au total, on a processé 150 challenges de rupture de l’économie mondiale auprès de 400 000 start-up dans le monde. Soixante ambassadeurs, qu’ils soient incubateurs ou intermédiaires de l’écosystème, ont reporté sur leur base respective ces challenges. Quand LVMH dit qu’il a un problème sur la contrefaçon, vous avez des start-up – qui n’auraient jamais pensé bosser dans le luxe – qui répondent à la problématique. Chaque partenaire en extrait cinquante par lab. Celle qui a la solution sera appuyé par un investissement, un financement, une distribution ou l’intégration dans un accélérateur. On traquera toutes les collaborations initiées dans Viva Tech.

 

Le principe d’un découpage par lab, comme par exemple sur le luxe, ne limite-t-il pas les possibilités de coopération transversale des start-up ?

A.D. La lisibilité du salon ne crée pas de l’enfermement, mais de la transversalité. Le sésame, ce n’est pas le luxe, le retail et l’assurance, c’est d’avoir les cinq enjeux clés du luxe. Des enjeux que l’on comprend et qui rendent possible cette porosité. L’un des challenges qui a le mieux marché, c’est celui de Valeo sur la cyber-sécurité des voitures connectées. Il s’adresse à des gens qui ne pensent pas voiture, mais sécurité informatique. Le fait qu’il y ait de la visibilité sur cinq sujets à craquer fait qu’il y a une préqualification.

 

Est-ce qu’un Blablacar peut sortir de cela? Un acteur installé n’a pas intérêt à faire émerger son concurrent, ni l'économie du partage…

A.D. Tous mes clients chez Publicis savent tous qu’ils sont en face d’une transformation radicale de leur marché. Et que ce n’est pas une transformation marginale, mais existentielle. Il n’y a plus de déni. Certains allaient être disqualifiés, d’autres sont requalifiés par cette transformation.

Sans que ce soit une réponse magique, l’un des ingrédients nécessaires, c’est l’open innovation, c’est de réussir à accoucher d’enjeux stratégiques qu’on publie de façon à collaborer explicitement avec des acteurs extérieurs. Sur les Fortune 500, aux États-Unis, il y a 45% qui ont des programmes d’open innovation. Sur le CAC 40, c’est 92%. Il y a une spécificité européenne de ce rapport à la transformation. Peut-être parce que les entreprises se sentent plus vulnérables.

 

Quel est le groupe le plus avancé, selon vous, dans cette transformation?

A.D. Le plus avancé est aussi celui qui est le plus exposé: Accor. Il est attaqué par Booking et Airbnb. Son patron, Sébastien Bazin, est sans doute celui qui est le plus dans le braquet de la transformation. Quand il a commencé à distribuer des hôtels pour concurrencer Booking, qui est son principal distributeur, il est à la table de la vraie transformation. Les autres sont encore à construire leur propre trajectoire dans ce sujet-là.

 

N’est-ce pas aussi un moyen de communiquer sur un positionnement digital?

A.D. Aucun groupe n’est là pour la com. Ils sont là parce qu’ils sont vraiment à la recherche de solutions. Il y a un modèle californien de développement des start-up, très pur, prépondérant, qui consiste à lever beaucoup d’argent sur des valeurs de plus en plus élevées et de se développer de façon de plus en plus autonome, quitte à perdre beaucoup d’argent. Ce sont des logiques de cavalerie capitalistique avec des boîtes qui lèvent de plus en plus de millions ou de milliards tant qu’elles ont accès au capital. Mais ce peut-être comme un château de cartes en cas de down valuation.

 

C’est ce qui a amené le financement des licornes…

A.D. Oui, mais ce modèle est challengé aujourd’hui, notamment en Europe. L’alternative est beaucoup plus en osmose avec l’écosystème. Il s’agit de faire du business development, de travailler son produit et de collaborer en même temps avec d’autres. Cela a été ma stratégie chez Deezer quand j’ai commencé à faire des deals avec des opérateurs télécoms. C’est l’option de l’investissement ou du chiffre d’affaires avec une valeur industrielle.

Là où est en train de déplacer la création de valeur, c’est dans ces écosystèmes-là. C’est un parti-pris: la valeur est en train de se construire autour d’une collaboration mixte, et non pas autour d’une grosse boîte qui bouffe une petite. Depuis deux cents ans, on pense que la valeur vient de l’entreprise. On sait mesurer cela. On est à un moment où les lieux de cristallisation de la valeur sont des écosystèmes. Des plateformes peuvent valoir 10 milliards, même si elles perdent de l’argent, parce qu’elles sont à un nœud de passage. Le positionnement de Viva Tech, c’est d’être le lieu où émergent ces écosystèmes-là. Le blockchain, par exemple, tout le monde le regarde.



Pourquoi avoir convié le grand public? 

A.D. Le dernier jour est consacré au B to C. Il permet de créer une dynamique au-delà des professionnels. Le carrefour mondial de la techno se transformera en portes ouvertes pour le grand public, avec un cœur de cible 18-28 ans.

Un budget de 10 millions d’euros

Fruit d'un joint-venture entre les groupes Publicis et Les Échos, Viva Technology se tiendra du 30 juin au 2 juillet, à Paris, dans le hall 1 du Parc des expositions de la porte de Versailles. Le cœur de ce salon consacré à la high-tech est constitué par 17 entreprises, leaders sur leurs marchés, couvrant les 17 secteurs de l’économie mondiale. Chacune a déboursé 300 000 euros pour avoir son «lab» sur un espace de 500 m2 et lancer des challenges auprès des start-up autour de l’avenir de leurs métiers.

Une centaine d’entreprises viendront présenter leurs objets technologiques et solutions digitales. La Google Car sera à l’honneur: ce sera sa première sortie européenne. Hackathon, course de robots, espaces entièrement en hologrammes… 1 000 événements sont prévus. Quelque 400 intervenants (dont 40% de femmes) sont attendus pour 300 débats et conférences sur trois jours.

Viva Technology rassemble 200 partenaires, 100 fonds d'investissement et bénéficie d’un budget d’environ 10 millions d’euros.

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